Un anniversaire qui fait Tâche!
35 ans, on ne se sent pas encore tout à fait vieux même si on n'est déjà plus trop jeune, alors, ça se fête! Cela fait quelques années que les miens sont derrière moi, mais ce n'est pas une raison pour laisser les potes dans la détresse de mettre une année de plus au compteur. Surtout quand ce copain dispose d'une cave dont je n'aurais même pas osé rêver quand j'avais 35 ans et qu'il est tout disposé à marquer le coup de façon indélébile. Et, pour sûr, on s'en souviendra encore longtemps, des 35 ans du Seb!
Cuvée William Deutz Rosé 1996
Beaucoup de classe et d'élégance dans ce champagne rosé très vineux qui
a eu pour seul tort de passer en vedette américaine. Peut-être encore
un peu fermé, également. Pas un champagne d'apéritif car il lui manque
un côté incisif et appétant, mais une néanmoins très belle bouteille à
attendre un peu en cave.
Champagne Veuve Clicquot Vieille réserve 1995
Là encore un Champagne très riche mais au nez somptueusement ouvert,
sur la viennoiserie, la bonne petite brioche bien ronde et encore toute
chaude d'un boulanger artisanal. La bulle est vive et fine, apportant
le peps nécessaire à l'équilibre de ce très beau champagne dont les
arômes persistent longuement en bouche.
Chassagne-Montrachet 1er cru Morgeot 1994, Domaine Leroy
Un magnifique vin de chardonnay dont les effluves résonnent encore dans
mes narines! Une intensité et une richesse hors du commun, où l'on sent
à la fois la complexité du cru et l'apport du vieillissement, la
grande maturité du raisin et le soin apporté à la vinification. C'est
par sa structure et sa texture qu'il impressionne encore le plus. Je me
demande si j'ai déjà bu un vin aussi parfait! Mais une perfection qui
ne lasse pas, qui n'exige pas que l'on soit à la recherche du moindre
petit défaut! Juste un instant que l'on a envie de prolonger. Une
perfection tout simplement parfaite! Un des plus grands vins blancs que
j'ai eu l'occasion de boire en cette année 2005 débutante. Un des plus
grands vins, toutes couleurs confondues, tous millésimes confondus,
depuis que je déguste du vin, même. C'est vous dire si c'est bon!
Puligny-Montrachet 1er cru Les Combettes 2000, Domaine Jacques Prieur
Un sparring-partner de 1er choix pour le Chassagne de Leroy et ce vin a
beaucoup plu, parce qu'il fait preuve d'une séduction assez immédiate,
avec ses arômes d'agrumes, d'ananas, et possédant en outre beaucoup de
fraîcheur. Dans une phase plutôt primaire, voire primo-secondaire, il
a, je pense, besoin de temps pour se magnifier, et il en a les moyens.
Même si le Chassagne l'a un peu éclaboussé de toute sa classe!
La Tâche 2000, Domaine de la Romanée Conti
Si l'on excepte la Conti 1979 que j'ai à peine eu le temps
d'entregoûter lors de la Paulée de Meursault, il s'agit de la première
bouteille de ce domaine mythique, le rêve de tout amateur de Bourgogne,
que j'ai l'occasion d'apprécier pleinement. J'avais bel et bien égaré
mon stylo mais n'avais pas non plus l'envie de prendre scolairement des
notes, juste me laisser porter par l'instant. Carafée 2 heures avant le
repas, servie en accompagnement d'un tournedos Rossini (l'accord de
choix, paraît-il!), cette Tâche est bien ouverte lorsqu'elle se
présente dans nos verres. On y décèle la pureté du fruit derrière de
francs arômes de pétales de roses fanées. Fanées, mais avec encore un
sacré éclat! La netteté dans la structure, la finesse dans la
définition, l'élégance dans la longueur, la classe qui parle, sans
épate, sans poudre aux yeux. De la finesse, toujours! L'âme d'un grand
terroir!
Ce moment fut grandiose et beau, à peine troublé par une petite goutte
de ce précieux nectar qui tomba de la carafe. Et bien vous me croirez
si vous voulez, mais il y a eu ni tache, ni Tâche sur la nappe!
Je ne sais comment ce vin se comportera dans 25 ans, probablement très bien, mais il aurait été dommage de ne pas profiter d'un petit aperçu de son potentiel actuel, avant que je sois moi-même un peu trop vieux!
Château La Conseillante 1970 (magnum)
Autre temps fort de cette soirée, l'ouverture de ce magnum de la
Conseillante, une des grandes réussites du millésime, si l'on en
croit les critiques autorisés, juste histoire de voir si un vin de
Bordeaux vieillit mieux ou moins bien qu'un solide gaillard du
Haut-Doubs. Toujours surprenant, la capacité d'évolution d'un vin dans
un grand contenant! La robe de ce 1970 en magnum n'est pas celle d'un
vin très évolué, ses arômes n'ont pas encore basculé complètement dans
le tertiaire, mêlant des effluves de havane, de cèdre, de bois noble et
d'épices, la structure du vin est encore loin de souffrir le moindre
creux en bouche et possède beaucoup d'allonge. Une sensation d'harmonie
totale, un instant d'émotion rare où l'on reste suspendu sur son petit
nuage, le verre aux lèvres.
Je ne sais comment ce vin se comportait, il y a 25 ans, probablement très bien, et il est dommage de ne pas l'avoir goûté à cette époque-là , pendant que j'étais moi-même un peu trop jeune!
Chateau Pajzos 1991 , Tokaji dry, 100 % furmint
Une originalité de plus à mettre à l'actif du Seb, ce Tokaji dry au
nez surmaturé mais sec en bouche et un peu oxydatif! Idéal sur le
fromage, même s'il a été un peu éclipsé par les monuments d'avant,
permettant de se refaire la bouche avant d'attaquer les sucreries.
Ruster Ausbruch 2001, Feiler-Artinger
Un liquoreux autrichien de la région du Burgenland, résultat de
l'assemblage de 4 cépages : Chardonnay, neuburger, weissburgunder et
welschriesling. 10 % alcool, beaucoup de fraîcheur, avec des notes
d'ananas confit, et une certaine légèreté qui n'est pas sans évoquer
celle de l'Ode à L'instant Présent d'André Ostertag. Un très beau
liquoreux, gourmand à souhait, à cueillir sur son fruit, le mariage
idéal avec un délicieux gâteau à l'ananas de Mr Poix-Daude.
Après tout cela, on a encore goûté à un ou deux trucs fortement alcoolisés, mais ma mémoire faisait défaut depuis longtemps!
Vivement les 36 ans du Seb! 36 ans, ça se fête aussi, non?
Olif