Ganevat-Boos, Alchimie jurassienne à Pontarlier
Quand
Pierre-Ivan Boos, le chef de
L’Alchimie à Pontarlier, convie à sa table Jean-François
Ganevat, le vigneron de la
Combe de Rotalier, dans le Sud-Revermont, la soirée fait des
étincelles ! Epaulé au service par Philippe
Bouvret, de la cave Essencia de
Poligny (vin et fromages), Fanfan
Ganevat nous a présenté un large aperçu de sa gamme, en deux temps, d’abord
sous forme de dégustation, puis en accompagnement du repas concocté par
Pierre-Ivan.
On
commence donc par une série de 7 vins en guise d’apéritif :
Le
vin préféré de Tonton Casa
Ce
qu’il aime bien, le Tonton Casa, c’est le mousseux rosé, brut de brut,
assemblage de 9 cépages, complantés sur une même parcelle. Du Trousseau, du
Ploussard, du Pinot, du Gamay, du Gueuche, du Béclan, de l’Enfariné, + encore
quelque autres encore moins connus, des cépages ancestraux qui n’ont plus guère
droit de cité mais qui subsistent, ça et là, au milieu des vignes. Cette cuvée,
proposée dans une version tranquille l’année dernière, a des bulles, cette
année ! Nous l’avons testée en RD, comme chez Bollinger, puisqu’elle
n’avait été dégorgée que la veille. Sans soufre, ni liqueur de dosage, c’est un
vin très fruité (groseille), un soupçon animal (légère réduction), possédant une
vivacité agréable, destiné à agrémenter les fins d’après-midi estivales, à
l’ombre sous la tonnelle. Sympa !
Côtes
du Jura Grusse VV 2003
Issu
de vieilles vignes plantées en 1950 sur des marnes rouges, ce Chardonnay
possède un nez très aromatique, sur les agrumes, un brin exotique. Beaucoup de
gras en attaque, une texture soyeuse très séduisante, sans lourdeur, car le vin
est porté par une vivacité suffisante. Très riche, opulent, long, sa finale est
marquée par une pointe d’amertume, probablement du fait de cette grande
richesse. Pour Fanfan, ses 2003 ont été préservés du fait de l’élevage long,
habituel au domaine, qui a apporté de la fraîcheur et sauvé le millésime. Aucun
de ses vins n’a été acidifié, les taux d’acidité sont plutôt bas, mais aucun
des vins ne semble en souffrir, affichant un équilibre plus que satisfaisant.
Côtes
du Jura Les grands Teppes 2002
Un
Chardonnay sur marnes blanches, issu de vignes de 45 ans d’âge, à la minéralité
tranchante (pierre à fusil), droit vif et long. Presque une épure, tellement il
est aérien. Un style que j’aime beaucoup, qui tranche d’avec le vin précédent,
mais le millésime y est certainement pour quelque chose.
Côtes
du Jura Les grands Teppes VV 2002
Des
vignes presque deux fois plus âgées (83 ans) que celles qui ont donné naissance
au petit jeunot d’avant ! 24 mois d’élevage sur lies, sans soufre !
Je lui trouve au premier nez une petite note anisée, de fenouil, mais je suis
le seul ! De la réduction fugace ? Bâti sur la même acidité
directrice que le précédent, il est à la fois plus étoffé, plus complexe,
exprimant une minéralité plus jurassienne, marneuse, mais tout en finesse, à la
manière des grands blancs d’en face. Le Montrachet n’a qu’à bien se tenir,
voilà un sérieux concurrent !
Côtes
du Jura Les grands Teppes VV 2000
Le
même, avec deux ans de bouteilles en plus, élevé et vinifié sans soufre. Au
nez, des arômes de zan, de réglisse, de thé, en bouche, une carrure
impressionnante, en longueur et en largeur, avec une finale remarquable,
longuement persistante et riche.
Côtes
du Jura Plein Sud 2004
Troisième
feuille d’un Trousseau replanté en 2001 à haute densité (10000 pieds/ha), sur
un coteau à forte déclivité (78%) exposé plein Sud, juste sous la roche qui
surplombe la maison. Un terroir qui devrait donner de grandes choses dans
quelques années ! La robe est très
colorée, rubis soutenu, brillante. Le nez est épicé, légèrement fumé, un peu
caoutchouc (réduction), la bouche est ronde et charnue, avec une finale plutôt
chaleureuse, venant atténuer légèrement la digestibilité. On peut le laisser
s’assagir un peu en bouteille !
Côtes
du Jura Cuvée Julien 2004
Un
Pinot Noir encore juvénile, qui possède une pointe de gaz à peine perceptible
mais qui vient rehausser des tanins encore un peu fermes. A attendre.
L’apéritif
s’est déjà passablement étiré, l’assemblée commence à avoir les crocs ! On
va donc continuer à table notre exploration du Sud-Revermont, avec incursion
dans divers coins du globe grâce au talent de notre alchimiste favori.
Jus de cresson gélifié, île flottante aux épices et pétales de
haddock frits
Côtes du Jura Savagnin ouillé Privilège 2003
Nez
opulent, très 2003, délivrant des arômes fruités de poire, grande richesse en
bouche, avec amertume finale, mais néanmoins une certaine fraîcheur. Puissant
et costaud ! Il s’accorde plutôt bien avec les saveurs relevées du
haddock, tonnerre de Brest !
Mousseline de crabe, croûte de pain aux céréales, neige de daikon,
graines de poireau germées,
réduction de poivron rouge
Côtes
du Jura Poulsard Allobroges 2004
Des
vieilles vignes de 1959, qui ont donné naissance à ce beau Poulsard, pas très
facile à goûter de prime abord, du fait d’une réduction marquée ! Mais de
la bonne réduction, malgré la trivialité des arômes : cour de ferme et
fiente de poule, mais d’avant l’épidémie de grippe aviaire ! Une fois les
naseaux décrottés, le vin se révèle dans toute sa splendeur, un fruité
éclatant, épicé et poivré, avec une texture magnifique, satinée, qui s’allie
magnifiquement avec la complexité du plat qui nécessitait d’assembler les
saveurs (relevées, salées, sucrées) avant la mise en bouche. Graines de poireau
germées à peine piquantes, emportant un peu la bouche, mais la neige de daikon
(radis blanc d’Asie) était intéressante à marier à la mousseline de crabe et au
poivron rouge réduit !
Gambas Camerone grillée et erigü, émulsion de panais au curry,
caviar d’œuf de hareng, huile de chanvre
Côtes
du Jura Savagnin Prestige 2001
Du
Savagnin vert (mais récolté mûr !), une variété pas toujours reconnue de ce
cépage, élevé 48 mois sans ouillage. Du bel oxydatif, très fin, au nez typique
sur les épices, le curry, les fruits secs, mais pas vraiment la noix. Puissant,
riche en alcool, il s’équilibre en finesse par sa longueur exceptionnelle qui
l’harmonise. L’accord avec le plat, une nouvelle fois très complexe, fonctionne
parfaitement. Pas convaincu par l’émulsion de panais, volontairement servie
froide, et qu’il valait mieux mélanger à la sauce pour la tiédir. Cuisson de la Gambas
Gras de cuisse de poulet simplement rôti au piment doux fumé,
peau croustillante, poêlée de couteaux au
persil arabe et artichauts braisés
Côtes du Jura Les Chalasses 2002
Du
Chardonnay sur marnes rouges, grises et violettes ! Le Jura est un
véritable arc en ciel ! Fenouil, anis étoilé, badiane, le retour !
Puis des notes qui évoluent vers l’eucalyptus, apportant de la fraîcheur à une
structure minérale solide, d’une grande droiture, à l’acidité finale mordante
mais plaisante.
Avec
ce plat-là, j’aurais presque vu un vin oxydatif, mais Les Chalasses ont plutôt
pas mal tiré leur épingle du jeu !
Pétales de vieux Comté au jus de carotte des sables caramélisé,
gressini au cumin
Côtes
du Jura Les grands Teppes VV 1999
Minéral,
tendu, épuré, à maturité, le terroir magnifié ! On sent qu’à partir de
2000, un changement de style s’est opéré sur cette cuvée, qui se rapproche plus en 1999
de l’esprit du 2002 « jeunes » vignes.
Le
Comté, du Vagne 44 mois en provenance de Poligny (visuel non
disponible !), n’est plus disponible à la vente non plus, et c’est
dommage !
Entremet au chocolat, biscuit imbibé de jus de groseille,
ficoïde glaciale au sucre, sorbet tamarios
Côtes
du Jura Vin de Paille 2002
383
g de sucre résiduel pour un Paille qui affiche ostensiblement une robe gelée de
coing. Le coing se retrouve au nez, sous forme de pâte, étant donné le haut
taux de sucre, mais l’acidité est suffisamment importante pour équilibrer le
tout. La minéralité apparaît dans des notes de graphite, mine de crayon de
papier. J’aime ce style de vin qui réussit à imprimer sa fraîcheur malgré le
sucre, qui joue sur la richesse et la concentration en évitant l’écueil de la
lourdeur !
L’accord avec le dessert est plus improbable, celui-ci se situant peut-être en deça du reste du repas. L’entremets manque un peu de fondant, la ficoïde glaciale a des allures d’algue extra-terrestre un peu insipide malgré la réussite de la réalisation.
Café,
San Pellegrino et l’addition, s’il vous plaît ! Il est déjà bien tard,
mais cette soirée en valait vraiment la peine !
Quand
est-ce qu’on remet ça ?
Olif
Commentaires
Waouw, quelle dégustation!
J'aurais voulu y être...
Félicitations pour ton site Olif!
Mes Amitiés à Fanfan, Philippe et tonton Casa
On a parlé de toi, Laurent! Et j'ai cru comprendre que Fanfan allait en Belgique le Week-end prochain? Il passe te voir?
On a parlé de moi?
En bien j'imagine...;-)
Et oui, fanfan me fait une infidélité ce week end en Belgique, un petit salon chez un ami je lui pardonne;-)
J'y fais même un saut dans une heure...
Je mettrais bien un lien de mon site vers ton blog et ce beau CR , puis-je?
@+
Laurent
Tu puis-je, Laurent! Tu puis-je! Je me suis permis de faire de même vers ton site et ta sélection de domaines aussi pointue que judicieuse! De quoi regretter de ne pas être Belge! :-)
Je découvre ce blog par hasard et il se trouve que je vais chez Fanfan ce lundi. Heureuse coïncidence.
J'ai fini mon tour de blog et reviens à la case départ. Ben faut continuer, c'est bien ici. Pas un vin d'Alain Labet...incompatibilité d'humeur?? Je sais, Alain est une tête de bois, mais il fait de grands vins. Même Fanfan le dit, alors...
Belle journée à la Combe ! Vu qu'il pleuvait dehors, on était mieux à la cave et dans le caveau. Waouh, quelle belle dégust !! 2006 sur pièce (très beau Chalasse VV), 2005, 2004, 2003 en bouteilles, puis quelques 2002, 2000, et le fameux 98 Vignes de mon Père.
A table, nous avons bu rouge (Poulsard VV 2005 superbe, Trousseau 2005 aussi, ainsi que Trousseau VV 2002 en Magnum. Et puis....dois-je le dire....Vin Jaune 1959 du grand-père Julien.
Ajoutons quand même les passerillés sur un fabuleux (et je pèse mes mots) Stilton apporté par l'ami Jason.Au final, environ 50 vins dégustés. Merci l'ami !
Eh! bien, on ne s'embête pas dans la Combe! Faut vraiment que je trouve un moment pour y aller!