Martigny-Bourg, le retour! A la bourre! Après le rap des Rappes, il s'agissait de s'engouffrer dans la tanière de l'Abbet (Christophe de son prénom) pour un nouveau beau voyage au pays de l'Ambre, ce doux royaume mystérieux qu'il faut savoir apprivoiser. Un monde à part, dans l'univers des vins valaisans, à l'image du vigneron pourtant issu d'une formation classique à l'Ecole de Changins, là où tous les œnologues suisses vont apprendre à faire du vin. Pas toujours avec un sens artistique très développé, contrairement à ce que l'on peut observer ici. Des bouteilles dans lesquelles poussent parfois de drôles de choses, une fois vidées de leur contenu liquide.
D'ailleurs, on va s'y atteler comme des bœufs, à les vider, c'est le moment de la dégustation. Des bœufs attelés à l'
Abbet Road, saisissant raccourci et petit clin d'œil éculé à l'intention des initiés.
- Chasselas de Fully 2007, Les Avasiers: une cuvée habituellement assemblée au traditionnel Chasselas de Fully mais qui, à cause d'une panne de monorail, a été vendangée 10 jours plus tard que les autres. Donc, du coup, isolée. Le nez est d'un fruité très mûr, presque exubérant, sur la pêche de vigne que l'on a envie de croquer. Bouche ronde, suave, avec du gras. Un fendant plutôt atypique et original.
- Arvine 2007: nez mûr et original, bouche très agrumes, acidulée, avec des notes d'ananas et d'écorce d'orange. Richesse en bouche, qui termine sur de beaux amers. Mystérieuse petite arvine, qu'il faut aller chercher, à défaut de l'attendre encore un peu.
- Gamay de Fully 2006, Les Avasiers: une déclinaison du Gamay dans cette fameuse combe des Avasiers, qui donne un vin fruité (groseille), épicé, concentré et charnu, acidulé et frais en finale.
- Gamay de Fully 2007, Les Avasiers: en exclusivité, un échantillon prélevé à la cuve. Structure serrée, dense, avec un joli fruit final, dans un bain de fraicheur.
- Gamay de Fully Vieilles Vignes 2007: également prélevé sur cuve, élevé sur lies et très peu soufré. Présence d'une pointe de gaz (malgré un dégazage musclé préalable, fait en coulisses). Nez épicé et fumé, bouche soyeuse, charnelle, finale nette, droite et précise.
- Humagne rouge Tradition 2006: souple et fruitée, sur des notes de sirop de fraise et cassis.
- Syrah 2007: mise toute récente, en jour "fruit", par une lune ascendante. C'était la "minute antroposophique", même si les vignes ne sont pas cultivées en biodynamie. Nez un peu lardé, riche et fruitée, bouche opulente et concentrée, une passionnante rencontre avec ce vin ayant bénéficié d'un élevage original avec une macération très longue et un pressurage début juillet.
Après cette copieuse mise en bouche, les bouteilles se sont mises à léviter, soulagées de leur contenu pourtant aérien. Un présentoir économique, classieux, artistique et joli, fait de bric, de broc et de bouts de fil métallique. Après avoir grimpé au mur, direction la cave, dans les entrailles du vieux Bourg pour une expérience hors du commun. "Vous ne serez plus les mêmes en sortant d'ici!" nous prédit l'Abbet en dévalant les marches quatre à quatre, en roulant les épaules (private joke!), avec un sourire sardonique. Dans l'antre du sorcier, il faut jouer de la pipette et ce n'est pas du pipeau. On y trouve des mixtures qui trainent depuis de longues années, parfois, sans pour autant prendre la poussière. Pour plusieurs d'entre elles, l'heure de la consécration en bouteille va bientôt sonner. Elles sont prêtes à affronter les hordes de dégustateurs aguerris, impatientes de partir à l'aventure pour vivre leur vie hors de l'utérus octodurien.
- Chardonnay-Petite Arvine 2003, sous voile: assemblage 40-60, qui devrait bientôt être dans l'Air du Temps, du nom de cette cuvée désormais classique et célèbre. Nez surmaturé sec, presque confit, caractère oxydatif indéniable, beaucoup de finesse et de profondeur.
- Marsanne 2003, sous voile: cette fois-ci, on part sur un équilibre plutôt liquoreux, avec des notes d'abricot sec et de liqueur de café. Acidité, droiture et netteté, y goûter est un moment rare et privilégié dans une vie d'amateur! Superbe!
- Marsanne-Petite Arvine 2000, sous voile: nez malté, rancio, avec une bouche riche et opulente. Le caractère oxydatif s'exprime ici un peu à la manière des Vieux Rivesaltes ambrés. Déroutant mais très beau!
- Ambre 2006: goûtée sur plusieurs barriques neuves, ne se donne pas encore. Un "bouton de fleur" qui ne demande qu'à s'ouvrir lentement.
- Ambre 2005: couleur déjà ambrée, nez sur les fruits secs et la mine de crayon, camphre et essence de pin sur une autre barrique, qui évolue sur des notes entêtantes de thym et de garrigue. Le boisé marque encore un peu, la finale est à peine chaude. Là encore, l'élevage est loin d'être terminé! A attendre patiemment.
- Ambre 2004: une approche du produit fini et un vin plus abouti, même s'il garde encore sa part de mystère. Présence d'acidité volatile plus marquée, bénéfique, qui accentue la sensation de buvabilité.
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Ambre 2002: un monument à mettre en bouteille et en cave, la sienne personnelle, et se prosterner devant, matin et soir, tant que l'on ne l'aura pas bue! Huileuse, grasse et onctueuse, mais caressante, fraiche et digeste, une
Ambre sensationnelle à réserver aux gourmands et aux amateurs de vins riches.
D'anciens comptes-rendus de dégustation chez Christophe Abbet
ici,
là et encore
là, et puis l'avis de mes compères
ici et
là.
Olif
Commentaires
Bonjour !
nous vous avons précédés samedi matin (enfin... un petit bout d'après midi aussi !), et avons eu la chance de découvrir "l'artiste". Ayant déjà lu vos commentaires à son sujet, nous avons voulu en savoir plus, et maintenant nous ne pensons qu'à y retourner ! Je ne sais trop ce qui nous a le plus enchantés, je dirais que la gentillesse (Christophe Abbet, si vous lisez ça... merci encore pour notre fils ainé, on vous tient au courant, promis !), l'écoute et l'ouverture de Christophe Abbet, sa façon de parler de son vin, sont des choses bcp trop rares chez les vignerons. Il nous a parlé de la visite de cave que vous avez eu la chance de faire, j'espère que la prochaine fois cela sera possible, et j'ai hâte !
Nous sommes en train de préparer une dégustation "Abbet" pour en faire profiter nos amis, histoire aussi de se replonger dans la dégustation de samedi ;-)
Merci de continuer à partager, au travers de ce blog, vos expériences avec d'autres fans de Christophe Abbet...
En lisant ça, on rêve de baroques abbet-ritifs à l'ambre, qui ouvrent joliment l'abbetit. Du reste, il faudrait créer une abbet-lation d'origine controlée rien que pour ce vigneron-là. Mais inutile de nous abbet-santir.
On cause aussi de l'Abbet aujourd'hui sur notre blog. Incroyable, non?
On avait oublié de vous remercier pour ce parfait abbet-cédaire
L'Ambre à l'Abbet-ritif, hum... je ne suis pas sûr que quoi que ce soit puisse passer après. Je le verrais plutôt sur un fromage (bleu tant qu'à faire), ou un dessert (mais quoi ?).
Ouvert à toute idée déjà testée avec succès !
cet Abbet me paraît bien licencieux de donner autant de plaisir à ses ouailles.
il me semble avoir déjà entendu parler de ses vins mais je n'y ai jamais goûté. tout cela donne envie d'entrer en religion !