La cicadelle et la fourmi
La cicadelle ayant doré tout l'été se trouva fort dépourvue quand l'hiver fut venu. Occupant les réseaux sociaux et les médias depuis quelque temps, il ne serait pas étonnant que certains esprits chafouins en aient ras le Giboulot. Mais, il est temps pour moi de mettre mon pied dans la fourmilière!
Que n'aura-t-on entendu, dans cette affaire! Y compris que le vigneron cherchait à faire sa propre pub! Entre ceux qui n'y connaissent rien en flavescence, mais qui ne peuvent s'empêcher de donner leur avis parce que c'est leur métier (de donner leur avis, aussi ennuyeux puisse-t-il être!), ceux qui y sont confrontés et restent malheureusement désemparés, quelques billets intelligents émergent du lot, essayant d'adopter un regard objectif sur les tenants et les aboutissants du problème. Nicolas Lesaint, d'abord, qu'il faudra sans doute canoniser un jour, tant il en est un, de le Saint, même qu'il essaie d'être lucide et clairvoyant dans la pratique de son métier (dans un château bordelais, il est vrai, personne n'est parfait!). Et puis Miss Glouglou, qui a fait un beau papier relayé en Une de Le Monde, ce qui lui a assuré plus de 15000 vues sur la seule journée d'hier, auxquels il va désormais falloir ajouter la poignée de lecteurs du blog d'Olif qui ne sont pas encore ouverts au monde de la flavescence. Auparavant, Marthe Henry avait fait l'actu du vin contaminé par la cicadelle, avec une approche très pro sur le sujet. Et puis, le taulier, présumé retraité, a aussi tenter de jouer les conciliateurs et d'apaiser les esprits. Un des commentaires de son billet est à ce titre particulièrement édifiant sur le rôle joué par la filière dans la décision d'envoyer Emmanuel Giboulot en correctionnelle! Et, au rayon "inculte, écologiste et extrêmiste", il y a même Olivier B. qui s'est fendu d'un billet de blog explicatif!
La cicadelle, deux ou trois choses que je sais d'elle. Pas grand chose en fait, c'est surtout pour la rime. Il est sans doute illusoire de l'éradiquer complètement et définitivement. Et surtout, il semble démontré que les traitement préventifs n'ont pas de réelle efficacité. Et surtout pas dans le temps. Être ou pyrèthre, là est la question! L'acte de désobéissance civile dont a fait preuve Emmanuel Giboulot ne méritait certainement une telle épreuve (passage en correctionnelle!), alors que ses vignes étaient indemnes de cicadelle au moment de l'arrêté préfectoral obligeant à traiter. Et de là à dire qu'il en a profité pour faire la promotion de son domaine et de ses vins! Combien de ceux qui glosent de façon un peu nauséabonde à ce sujet le connaissent et ont déjà goûté à la Combe d'Ève, à Lulune ou aux autres cuvées d'Emmanuel? Des vins qui n'ont nul besoin de cette pseudo publicité pour se vendre, d'ailleurs ils sont déjà tous vendus.
Emmanuel Giboulot à Lille, en 2011. L'insouciance, encore, bien loin de l'effervescence de la flavescence!
Les vignerons bio du Jura, qui soutiennent Emmanuel, n'ont pas non plus envie d'avoir le nez dans le pyrèthre. La flavescence n'a pas encore traversé la Saône, mais ils s'organisent déjà pour savoir comment faire face au problème si celui-ci arrive un jour. Sans avoir à traiter de façon complètement aléatoire et inefficace. Nul doute que lors du prochain salon du Nez dans le vert, l'affaire de la cicadelle ne sera pas encore cicatrisée!
Olif
Commentaires
an!:oufff! je crois qu' Emmanuel Giboulot vient de vivre les pires moment de sa vie !
Bonjour Olivier,
Les convictions d'Emmanuel ne datent pas d'aujourd'hui. Nous nous étions entretenus tous les deux à l'occasion d'une visite dans le Nord en 2008.
http://rivedroite.canalblog.com/archives/2011/02/07/20322333.html
http://rivedroite.canalblog.com/archives/2011/02/08/20331459.html
http://rivedroite.canalblog.com/archives/2011/02/09/20340228.html
http://rivedroite.canalblog.com/archives/2011/02/10/20349247.html
http://rivedroite.canalblog.com/archives/2011/02/11/20357477.html
http://rivedroite.canalblog.com/archives/2011/02/12/20365978.html
un peu long à lire, peut-être.
Un vigneron que j'avais eu grand plaisir à revoir lors des Vins Natures en Nord et il est venu faire un petit tour, dernièrement à Saint Emilion...
Merci de ton texte, qui synthétise bien le courage, l'abnégation de ce métier si souvent ingrat..
Que M. Giboulot ait voulu se faire de la pub, je ne le crois pas. Mais qu'il ait choisi la meilleure façon de lutter contre les traitements préventifs obligatoires, permets-moi, cher Olif, d'en douter.
Primo, pour sympathique qu'il soit, et ses idées aussi, il a violé la loi, ce que nous ne devrions pas encourager. Ce qu'il faut, c'est changer la loi.
Secundo, malheureusement, je ne suis pas sûr que son procès (très court) ait été celui des traitements préventifs ni de l'administration; ce fut plutôt celui de son refus d'obtempérer.
Ceci, bien sûr, vu des yeux d'un type dont c'est le métier de donner son avis, même ennuyeux, et même quand il ne sait pas tout. Mais à ce propos, qui peut dire qu'il sait tout sur la flavescence dorée et sa prolifération? Même pas M. Giboulot.
Tu es tout à fait libre de tes doutes, Hervé. Comme moi des miens. "Violer" une mauvaise loi, à savoir un arrêté pris au nom du définitivement insupportable principe de précaution maximum, alors que ceux qui l'ont préconisé et ceux qui l'ont fait appliquer sont autant dans le doute que toi et moi, ne devrait pas être puni par la loi, aussi mauvaise soit-elle.
Faut-il accepter, sans moufter, de répandre du pyrèthre toxique sur des vignes saines, alors que personne n'a la preuve formelle de son efficacité? Emmanuel Giboulot n'a jamais prétendu avoir la réponse, il a juste eu le courage de désobéir.
Son procès aura ainsi eu le mérite de mettre le doigt sur cette problématique terrible, que l'on connait aussi en médecine humaine.