Champion du monde du vignoble le plus bio de France, d'après des sources bien alimentées par la fonte des dernières neiges, le Jura concourt également dans la catégorie du plus cool salon du vin bio régional organisé alternativement au nord et au sud de Lons le Saunier. Et là, il n'y a pas photo. Médaille d'or haut les verres! Cinquième édition en 2015 et record battu! Grosse affluence publique et professionnelle, le dimanche comme le lundi pour de grands moments de découverte, d'échanges et de convivialité, les vignerons jurassiens bio ont encore distillé une sacrée ambiance au domaine de la Pinte, le troisième dimanche de mars. Pour le Nez dans le vert, hip hip hip ...Jura!*

On ne change désormais plus une formule gagnante. Retour aux sources, à la Pinte, pour cette cinquième édition du Nez dans le vert, qui s'est une nouvelle fois déroulée les doigts dans le nez, dans des conditions optimales, tant d'un point de vue météo qu'organisationnel.

Atelier distillerie, transformé en cuisine pour le repas du lundi midi (succulentes et goûteuses saucisses, lard et patates cuits dans le marc), coin librairie avec vente de moult ouvrages aptes à caler une bibliothèque branlante et, last but not least (c'est même la raison d'être du salon), plein de bons vins produits par de bons vignerons et, parfois même, de bonnes vigneronnes.

Début de salon                                      Fin de salon

2015 est une année Tronches dans le calendrier biobibliodynamique sans trop de sulfites ajoutés des sorties littéraires. Les visiteurs du Nez dans le vert ne s'y sont pas trompés, dévalisant littéralement la Nouvelle librairie polinoise de ses exemplaires de Tronches de vin, ce qui devrait positionner le titre dans la course au prix du livre le plus hautement buvable en prévision du Goncourt, malgré la rude concurrence de Trente nuances de gros rouge, ouvrage également fort gouleyant du collègue de blogoulot Philippe Quesnot.

Si les vignerons du Jura ont le nez dans le vert, ils ont aussi les pieds sur terre. Valentin Morel le premier. Après des études de droit, il s'est vite remis dans le droit chemin en revenant à la vigne pour convertir le domaine familial en biodynamie. Suite à son retour, le domaine Morel-Thibaud de Poligny, conduit en GAEC bicéphale, s'est scindé en deux pour devenir Morel tout court. Première année en conversion bio, 2014 fut aussi un millésime de motard. La mouche Suzuki l'a contraint à vinifier son poulsard en pressurage direct. Résultat, un blanc Albinos qui en jette avec ses petits tanins serrés en finale. Les pieds sur terre, du nom de la gamme nature qu'il développe sous son propre nom, Valentin Morel n'a pas non plus la trouille. Son pinot noir et son chardonnay du lieu-dit les Trouillots sont déjà bien posés.

Philippe Chatillon n'est pas un inconnu à la Pinte. Il y a même exercé les fonctions de régisseur pendant une dizaine d'années. Une terrasse un peu trop ventée, ne donnant pas souvent l'occasion d'en profiter en maillot de bain, a eu raison de la pugnacité de son lisseur à moustache. Il a cédé sa place à Bruno Ciofi pour vivre de nouvelles aventures. Après avoir un peu bourlingué dans le Sud, il est revenu sur le lieu de ses premiers forfaits y présenter ses propres cuvées jurassiennes. Premier millésime en 2013. En 2014, il "lâche ses peurs" et décide de vinifier sans soufre. La Grande Chaude ne lui a pas donné froid aux yeux. Pinot noir et chardonnay sur calcaire de Passenans donnent naissance à deux cuvées de belle expression. Son Sage Vagnin défrise totalement, tout comme Y'a pas de Mais, un vieux gamay avec un poil de moustache de volatile.

Vous reprendrez bien un Zest de savagnin? Ce blanc de macération du domaine de l'Octavin, d'Alice Bouvot et Charles Dagand, qu'on ne présente plus désormais, est plus hipster que jamais.

Fabrice Dodane, du domaine de Saint-Pierre, au service. Son savagnin 2009 est une petite merveille qui redonne foi dans le paradis.

Quand la Vendée traverse la France d'Est en Ouest pour prendre une bouffée d'air jurassien, en même temps que le pouls d'une région viticole qui (se) bouge, elle ne se déplace pas sans biscuit. Le huîtres sauvages de Noirmoutier sont bien plus charnues que les gryphées jurassiennes, ces petites huîtres fossiles qui ont colonisé les terroirs d'éboulis calcaires au temps du jurassique. La véritable huître océane, elle, aime aussi  le vin jaune qui le lui rend bien. Une séance d'ouverture musclée, avec des ustensiles parfois peu appropriés, a permis de le vérifier une nouvelle fois lors d'un petit off de fin de salon le dimanche, malgré une petite brise qui n'avait rien d'océane.

Est-ce l'odeur de l'huître qui a attiré les mouettes lors de l'after de clôture du lundi? Nul ne saurait le dire, même pas le sage Vagnin. Ce qui est certain, c'est que l'on signe à nouveau des deux mains pour la prochaine édition de ce salon.

Pour le Nez dans le vert, hip hip hip ...Jura!*

*cri de guerre des sommeliers danois lorsqu'ils envahissent le Jura, qu'ils affectionnent tout particulièrement