Conchyophilie vinique
Caviste de son état, blogueuse par passion, écrivaine parce que le papier, c'est encore mieux que le web, Sandrine Goeyvaerts sort son deuxième opus chez Hachette et nous en conte des vertes et des pas mûres. Les perles d'une caviste, ce ne sont pas celles qui ornaient son cou lors de la remise des trophées de la RVF, où elle s'est vue remettre celui d'homme de l'année, catégorie Meilleur blog, en 2014. Un traumatisme qui, une fois passée la joie de la nomination, la hérissera à jamais contre le sexisme dans le monde du vin, qu'elle ne cessera plus jamais de combattre à grand coups de #womendowine.
Qui dit perle dit huître et qui dit huître dit coquille (d'où la conchyophilie de l'intitulé, un peu tirée par les cheveux, j'en conviens, mais le nom est tellement jubilatoire!). Les coquilles, évacuons les tout de suite, pour ne pas avoir à y revenir ultérieurement. Celle-ci est tellement grosse qu'elle pourrait passer pour un pied de cheval. À moins qu'elle ne soit volontaire et constituer ainsi un belgicisme pour faire la nique aux petits français, toujours à se plaindre que c'est trop cher.
Si je comprends bien "mes 50 (co)quilles à tout prix", de 5 à 11€, c'est pas cher, de 12 à 20€, ça l'est un peu plus, mais à partir de 11€, ça redevient très cher. Ces Belges sont tout de même incroyables, une fois! Oufti!
Mais ne pinaillons pas, cet ouvrage est celui qu'il faut à toute personne qui s'intéresse au vin. Pour s'instruire et pour se distraire, car, à l'instar de Boby Lapointe, Sandrine Goeyvaerts est capable "d'instruire en distraisant, treize ans et demi maximum", de façon non sommaire, quand bien même la consommation de boissons alcoolisées n'est pas autorisée avant dix-huit. Ouvrage ludique, pédagogique et humoristique, les Perles d'une caviste est construit sur un format qui convient décidément très bien à la Pinardothek. Du pif (50 quilles choisies avec justesse pour illustrer autant de doubles pages), du féminisme (parce qu'on est quand même pas là que pour picoler!) et du gras (un humour liégeois parfois consistant, à l'image d'une bonne grosse louche de chantilly sur le chocolat. Mais juste comme on aime, en fait. Et c'est bon de rire, parfois, surtout quand on parle de vin!). Et une maquette construite sur le même moule, sans les frites: la "perle" d'un client (et c'est là qu'on se dit qu'être caviste en Belgique, ça peut peut-être aider, mais ce n'est pas sûr...), suivie d'un développement explicatif et, sur la page de droite, une quille, une bonne, joliment croquée par un illustrateur, doublée d'un petit encart bonus. Sans oublier le petit lexique final, qu'il convient de lire en entier et jusqu'au bout, car on a toujours quelque chose à apprendre de nos amis belges.
Un livre qui se lit presque trop vite, à la vitesse où on siffle une bouteille de vin qui fait glou, mais que l'on peut recommencer depuis la première ligne et ce, jusqu'à plus soif. Le meilleur ouvrage écrit à ce jour sur la dégustation, ça ne fait aucun doute. En attendant septembre et un prix Goncourt potentiel, mais, chut, on en reparlera plus tard...
P.S.: la quille proposée en illustration de ce billet ne figure pas parmi les perles de la caviste, qui n'ont cependant pas vocation à être exhaustives. Il s'agit néanmoins d'une lacune, que je me fais un plaisir de combler: Pic-Têtu 2015, du Clos des Calades, très bon vin, et parce que Laurence Escavi le vaut bien.