Quelques choses à offrir (ou pas) à Noël...
" Vais-je réussir à la mettre au fond ?" , s'écrient d'une seule et même pensée l'avant-centre au moment du penalty ou le jeune puceau devant sa première conquête à moitié dévêtue. Bien réussir ses cadeaux de Noël, une mission parfois périlleuse qui nécessite des bonnes idées, mais également une grande acuité. Peut-on tout offrir? Peut-on tout offrir à n'importe qui? Juste un début de réponse pour un Noël aussi réussi que possible. Du moment qu'il y a de la neige. Et du vin. Mais pas que.
Dessin piqué sur le profil Facebook d'un collègue de goulot particulièrement frileux. Auteur inconnu, première moitié du XXIème siècle
Un peu de culture, d'abord, ça ne peut pas faire de mal à tous ces accros de la magie de Noël, complètement ébaubis par des tours complètement éventés depuis belle-lurette, avec un gros barbu en pelure rouge et cheveux blancs dont tout le monde sait très bien qu'il ne passe pas par la cheminée, il ne fait qu'y tirer la chasse.
Cinquante jours pour comprendre autrement le vin, d'André Deyrieux, chantre du Winetourism in France, mais en français quand même, sauf le titre. Soit trente jours de moins ou quinze de plus que n'a mis Jules Verne pour faire son tour du monde en ballon de rouge. Un petit bijou qui attaque le jus de la treille par la bande et son versant culturel et historique. Découpé en cinquante petits chapitres (à lire en cinquante jours, cinquante heures ou cinquante minutes, selon la vitesse à laquelle on a l'habitude de siffler son verre), brassant une bonne partie (non exhaustive) des questions existentialistes qui peuvent se poser lorsque l'on souhaite mieux comprendre l'univers du vin. Le vin jaune, les romains, les moines, les bulles, la minéralité, tout ça.
Toujours au rayon littérature liquide, mais d'un autre genre et dans un autre style, Angel Carriqui joue les plombiers cérébraux et colmate les fuites en pansant les plaies d'un monde qui ne tourne pas bien rond et en pensant, aussi. De la psychologie de comptoir, façon brève ("La pression se mesure en bars, la vie est quand même bien faite"), mais aussi des questionnements existentiels essentiels ("Les arts plastiques, on devrait pas les remplacer par un matériau moins polluant?"). Une succession de petites phrases, jeux de mots et à peu près qui raviront le béat qui sommeille en nous, nous ramenant au temps du Très véritable groupe Machin, dont il était le cinquième Beatles, l'éminence grise et le parolier, à qui il n'a jamais manqué que quelques centimètres pour percer sous Bonaparte. C'est inquiétant toutes ces histoires de fuites de cerveau, je n'aimerais pas que ça m'arrive 3.0, ben voilà, c'est fait!
On pourrait offrir de jolis vins nature du Jura (ou d'ailleurs), mais ce n'est pas forcément une bonne idée. Tout dépend de ce que l'on a envie d'en faire. OK si c'est pour les boire. Mais si c'est pour spéculer, ça ne va pas le faire. On n'est pas dans la "wine industry" ou dans le milieu des Grands crus classés bordelais, là! Qu'un Poulsard 2016 du domaine des Murmures puisse atteindre 250€ aux enchères, voilà qui dépasse un peu l'entendement. Ce n'est pas non plus très respectueux du vigneron, qui a fourni la plus grosse partie du boulot et qui s'excuse d'avoir dû monter ses tarifs (moins de 20€ HT départ propriété, quand même!) devant les petits rendements successifs. Sûr qu'il n'y en aura pas pour tout le monde, seulement 3 à 400 bouteilles produites, pour chaque cuvée, selon les millésimes. Mais, que ceux qui ont la chance d'en trouver une bouteille à prix juste la boive, putain! Ces vins-là, c'est un petit bonheur, pas un produit de luxe destiné à finir dans les ventes aux enchères pour rassasier les nantis qui ne goûtent les vins que par snobisme et avec leurs biftons!
Et puis, dernière suggestion, et pas des moindres, mettre sous le sapin un migrant fraîchement pêché en Méditerranée. C'est une image, bien sûr (je m'empresse de le préciser à l'intention de tous ces bien-pensants qui ne voient pas plus loin que le premier degré du bout de leur nez quand on vient les bousculer de leur fauteuil d'handicapés de l'humour), mais on peut facilement aider SOS Méditerranée et l'Ocean Viking à remplir sa mission humanitaire et profondément humaniste, celle de sauver des milliers de personnes chaque année en les recueillant avant qu'ils ne boivent définitivement le bouillon. Alors, au cas où il vous reste un peu de sous après avoir renfloué les producteurs esclavagistes d'artisanat chinois bas de gamme, ne les oubliez pas. Merci pour eux.
Et enfin, pour tous ceux qui n'ont pas été contraints de battre en retraite devant la grève de la SNCF et la suppression de leurs trains à grande vitesse, il reste encore une journée parisienne pour profiter de la première édition du salon Mi-livre mi-raisin à la Bellevilloise, dans le XXème arrondissement. Du vin, des livres, des auteurs, des vignerons, quoi de mieux en prévision de Noël?