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Le concept de Saint-Glou ne serait pas grand chose sans le Saint-Miam. Découvrir une région viticole ne se conçoit qu'au travers de sa gastronomie. Le moins que l'on puisse dire, c'est que les organisateurs ont été gourmands. Et si la gourmandise est un péché, cela ne vaut que lorsque l'on est seul. À plusieurs, cela s'appelle de la convivialité. Chaque stand de ravitaillement a été associé à un ou plusieurs vignerons. La belle occasion de découvrir une jeune garde alsacienne, à côté des monuments viticoles inscrits au programme.
Comme il s'agissait de ne pas manger une choucroute à chaque repas, la sélection des adresses gourmandes s'est effectuée de manière rigoureuse et totalement subjective, afin d'être au diapason du glou. On commence par le bas, qui, je le rappelle, se trouve en haut.
Strasbourg
Les choses devaient démarrer en douceur à 17h30 par une dégustation apéritive chez Benoit Hecker, dans son Œnosphère alternative, au 33 de la rue de Zurich. Cave à boire, bar à vin, cave à manger, le concept est toujours aussi séduisant, surtout quand un vigneron de Gertwiller, Monsieur Yann Herr (pléonasme alsacien), fait le déplacement pour présenter et faire goûter ses vins.
De cette série passée un peu vite pour moi, les bouchons de Sélestat et de la Porte de Schirmeck ayant bien eu du mal à sauter, je retiendrai un jovial Pinot Chio, assemblage des 4 pinots vinifiés en fût et sans sulfites ajoutés, et un pinot noir 2012 ayant bénéficié à distance des conseils avisés de Monsieur Henri Milan (pléonasme provençal), chez qui j'ai rencontré Yann Herr pour la première fois, complètement par hasard.
Pinot Chio, un peu de bois, celui dont on fait les marionnettes, mais pas au point de lui en tailler une pipe.
Les papilles en éveil pour contrer les oiseaux de mauvais augure, il est désormais temps de s'attaquer à la possibilité d'une Ill. Il suffisait de passer le pont, pour se retrouver Au Pont Corbeau, chez Christophe Andt, the adresse strasbourgeoise que Saint Glou ne pouvait manquer. Le gros travail effectué par Christophe auprès des vignerons qu'il affectionne, associé à une cuisine chaleureuse bien ancrée dans le terroir alsacien, en font un passage obligé lors de toute étape strasbourgeoise digne de ce nom.
On y mange une excellente choucroute, ce sera la seule occasion du séjour. Il ne fallait pas se priver. Rejoints à table par Patrick Meyer, la soirée ne pouvait que s'annoncer sous les meilleurs auspices civils. Et, du coup, ça dégoupille sec! Avec la cuvée du vigneron en finale, pour lequel il n'y aura pas match: un liquoreux de pinot gris sous voile sans sparring partner, à siroter jusqu'au bout de la nuit strasbourgeoise.
Colmar
Le lendemain midi, un peu plus bas, dans le Haut-Rhin, on n'a pas molli. N'en déplaise à Berthe. L'un des sens, oui, mais lequel? Située rue Berthe Molly, une cave à vin, bar à vin, cave à manger, un concept toujours aussi plaisant quand la qualité des produits est au rendez-vous. Pas de flammekueches dignes de Saint Glou, on se consolera joyeusement avec une tourte de la vallée, oui, mais laquelle? Délicieuse en accompagnement des vins servis par les deux vignerons présents. Philippe Brand reprend progressivement le flambeau d'un domaine familial situé tout en haut, dans le Bas-Rhin, à 20 km à l'ouest de Strasbourg. En bio depuis 2001, avec l'envie de titiller du nature. Une agréable Nymphe rose à l'apéritif, crémant à la bulle fine, et un pinot noir sans soufre 2012 dont le principal tort fut de passer avant (ou après) celui de son collègue de goulot.
Hubert Hausherr était comme un monsieur à la maison, à Colmar. Son domaine est situé un peu plus bas, dans le Haut-Rhin, du côté d'Eguisheim, à une portée de bouchon de là. Une belle découverte, sans sulfites ajoutés, dans la majorité des cuvées. Du lieu-dit Sunngass 2010 (complantation de riesling et pinot gris) au pinot noir 2011 du Fronenberg, en passant par Aussitôt bue 2011, assemblage de 3 cépages, comme son nom l'indique, et d'une grande buvabilité, comme son nom l'indique aussi. Sui Generis 2011, si sa mission était de nous faire aimer le gewurtz, eh! bien, c'est généreux et réussi!
La pifométrie est une science ancienne et universelle servant à quantifier de manière totalement subjective et imprécise une mesure quelle qu'elle soit. Et ce, de la manière la plus injuste qui soit. Elle recourt à un mètre-étalon parfaitement variable, embarqué sur chaque individu depuis sa naissance, à la manière d'un avion-renifleur. En cas de litige, il est préférable de recourir à un ingénieur en Pifométrie. Jérôme Chauveau possède un diplôme équivalent qui lui permet de vendre du pif au mètre. À la manière de la bière, sauf que là, tous les vins sont issus d'une sélection très pointue. Parce qu'il a du pif, Jérôme. Pas un cap, ni une péninsule, mais un nez fin, un organe suffisamment développé pour dénicher des quilles particulièrement séduisantes, de Loire ou d'ailleurs. Ancien du Wine not, il ne s'est pas lancé dans le grand bain au pif. Vendre du vin, c'était déjà son métier. Maintenant, ça l'est encore plus et c'est lui qui choisit ce qu'il vend. Pas mal de Loire, évidemment. Mais pas que. Du Beaujolais, des Sabots d'Hélène, du Bergerac, du Cahors et encore plein d'autres choses. Manque juste un peu de Jura, encore..! Et puis, il essaie d'organiser régulièrement des soirées pour animer sa boutique, située à deux pas de l'avenue Foch et du centre de la vieille ville d'Angers. C'est méritant. La charcuterie proposée lors de ces réunions conviviales est artisanale, depuis plusieurs générations, les vignerons qui se déplacent sont aussi des artisans, parfois depuis la première génération, et leurs vins sont plutôt bons.
Pour cette soirée intimiste pré-salons de Loire, une ou deux tronches étaient présentes, plus un joli minois, celui de Camille Marquet. Lilian Bauchet, en méga super forme beaujolaise, a pourtant été scotché par Cajolle, le gamay du Sud-Ouest de Jérémy Illouz, avant de se faire écraser par la 2CV de Bruno Allion, le gamay de Touraine tout-terrain. Les Vaches, son Fleurie à lui, from Beaujolais, ce n'était pourtant pas de la bouse non plus! De terre et d'esprit, cuvée majuscule du Château Lestignac, est pourtant calligraphiée sans, ce qui permet d'ergoter sans fin et au pif, sur le choix du nom de la cuvée et la manière de l'écrire.
Un endroit qui a d'la gueule, même si son ouverture trop récente ne lui a pas permis de figurer dans la rétrospective cavistique des Tronches de vin, ce qui est regrettable.
Olif
P.S.: pas eu besoin de robot-chercheur pour cela, mais on a trouvé du vin sur Mars. Mars, le mois des salons, publics ou professionnels. Ce week-end, ce sont les Vins d'à côté, une émanation des Vins du coin, passés juste à côté, à Orléans.
Le week-end prochain, les 9 et 10 mars, ce sera Vins natures en Nord, le salon de Seclin, un événement toujours très attendu, chez les Ch'tis comme en Belgique voisine.
Et du 11 au 14 mars, place aux Découvertes en Rhône, salon officiel et itinérant organisé par Inter-Rhône, du Sud au Nord, permettant aux professionnels de faire le plein de grenache, syrah ou viognier. Avec quelques offs passionnants, également réservés aux pros, dont une Nouvelle lune qui se lèvera le lundi 11 mars sur la Collection Lambert, haut-lieu de l'art contemporain en Avignon...
... et un Off de ouf le mercredi 13 mars chez David Reynaud en Crozes Hermitage à Beaumont-Monteux.
Vivant, Pierre Jancou l'est toujours à fond, et plutôt deux fois qu'une. Avec l'ouverture de Vivant Cave, la désormais célèbre ancienne oisellerie du Xème (celui qui a pensé "siècle" aura un gage, le tour de l'arrondissement à genoux) se décline en deux versions: la table et la cave. Vivant table, pour s'asseoir et prendre son temps, Vivant cave pour manger et boire, tranquillement, sur le pouce, au comptoir ou quand même à une table si l'on en a envie, ou repartir chez soi avec une belle quille à pas trop cher pour ne pas se priver. Sans oublier Vivant toilettes, pour un besoin pressant ou un coup de fil urgent...
Toujours sous influence Jancou, évidemment, pour les saveurs, la cuisine a été déléguée à un jeune chef japonais, Atsumi Sota, qui a fait ses classes chez les meilleurs. Justesse et précison, voilà deux qualificatifs qui pourraient la caractériser justement et précisément.
Boudin noir, poulpe et piment doux. Un intitulé qui va à l'essentiel. Cuisson parfaite, qui donne à croquer de la tentacule sur le fondant du boudin noir, impeccablement relevé par les piments doux. De la salade et du parmesan pour la déco, mais aussi le goût, et voilà une entrée qui met en bouche et permet de tirer les choses au GrandCléré, et tant pis s'il est pas là. Du Gewurtz tourangeau sans note variétale, avec de la maturité et de belles notes oxydatives, voilà aussi qui n'est pas banal, c'est sûr, mais c'est Vivant!
Vivant, c'est aussi un vivier de vins pas encore morts, qui ne sont plus à la carte, mais en cherchant bien, là, tout au fond, avec l'assentiment de Pierre Jancou... Des quilles pour initiés, grand format, à l'étiquette parfois illisible, mais au contenu qui ne trompe pas l'amateur de vins qui ont d'la gueule. Le Peyra 2001 n'en manque pas, c'est sûr, même s'il ne sera pas prochainement immortalisé sur le papier. Roche noire 2006 du sieur Jambon, par contre, ça s'imposait pour accompagner un cochon ibérique. Ton sur ton, parfaitement assorti. Si tu n'as jamais goûté à cette côte-là, à ces brocolis-là, à cette Roche Noire-là, tu n'as jamais mangé de cochon, ou même de brocolis, ni même bu de Roche noire de toute ta vie. Une approche de la perfection dans la cuisson, difficilement égalable, tout comme dans la définition du vin itou. J'en ai encore la queue en tire-bouchon!
Avec le dessert, il faut bien reconnaître que c'est parti un peu en vrille. On a retrouvé Éric Calcutt. Enfin, juste quelques bribes, des reliques pieusement conservées au fond de la cave. Il en a fallu de la persuasion, auprès de Solenne Jouan, la nouvelle gardienne des clés de la cave de Vivant, pour toucher au Nirvana. Un privilège qui n'est plus donné à n'importe qui, que celui d'avoir du Picrate dans les veines.
Oxygène 98, parfaitement sec et finement oxydatif, qui se serait bien accordé avec un vieux Parmesan, et Les Paradis 98, délicatement mœlleux, sur l'oxydation aussi, forcément, impeccable avec le chocolat en miroir ou les pignons de pin. Deux vins exceptionnels en voie de disparition, depuis l'épuisement total de la ressource. Comme dit Guillaume, chaque fois qu'une bouteille est bue, c'est un ours blanc qui disparaît de la banquise. Mais que fait le WWF?
Et que fait Solenne, la nouvelle sommelière du Vivant, sans nul doute recrutée pour son joli pull assorti d'oiselière du Xème (mais pas que)? Sa grande connaissance des vins nature, son sourire et son professionnalisme l'emmèneront certainement très loin. Peut-être même Outre-Manche, va savoir! Mais le plus tard possible, on espère.
C'est un endroit perdu dans la montagne jurassienne, à une encâblure de la frontière suisse et à mille lieues des endroits branchouilles de la capitale. C'est un coin de verdure et une arène naturelle où ne se joue aucune corrida. Les montbéliardes y paissent tranquilles et le Grand Taureau veille sur elles de toute sa hauteur. 1323 mètres, très exactement, un pli jurassien typique à la déclivité très progressive lorsque l'on suit la ligne de crête. Sommet du Larmont, le Grand Taureau se torée plus ou moins facilement. À pied, en raquettes, en VTT, à skis de fond et même en ski de descente. C'est le jardin des pontissaliens, qui s'y donnent rendez-vous quasiment toute l'année, pour une randonnée sportive, une marche dominicale digestive, une sortie en ski nordique, un verre sur la terrasse du Gounefay ou, mieux encore, depuis peu, une belle assiette et un repas en famille ou entre amis.
Le Gounefay, nouveau paradis gastronomique, avec la plus belle terrasse panoramique de tout le Haut-Doubs, voire même un peu plus loin. Un gros paquebot en bord de crête, qui surplombe la plaine de l'Arlier et qui a mis le temps pour arriver. Architecture discutée, mais non discutable, qui allie l'audace de la ligne à l'utilisations des matériaux traditionnels, dont les tavaillons, petites tuiles en bois permettant de protéger les façades des intempéries. Flashback. Dans les années 70-80, cette auberge montagnarde était le lieu de rendez-vous de toute la petite bourgeoisie pontissalienne, qui venait s'y rassasier de fondues, raclettes, braserades. Un endroit à la simplicité non feinte, qui réjouissait les notables en sortie dominicale. Mme Olif y faisait même des extras pour gagner deux ou trois sous pendant ses études. Les pourboires pouvaient y être royaux, parfois glissés sous les pieds de tables, pour échapper à la vigilance des propriétaires des lieux ou des autres convives, qui y allaient également de leur petit billet discrétos. Moi, à l'époque, je n'étais encore même pas né au Haut-Doubs, je n'en suis donc que le rapporteur. Et puis, au fil des ans, l'auberge a changé de gérants, connu parfois des heures un peu plus difficiles, signe des temps et de l'évolution de la société, jusqu'en 1999, où, là, ce fut l'apocalypse. Lothar est passé, même si l'incendie qui a ravagé totalement le Gounefay n'en est peut-être qu'un dommage controlatéral. Pas simple de faire front face au feu, tout là-haut, sans autre réserve d'eau qu'une simple citerne. Complètement rasé et rayé de la carte, le phénix a pris son temps pour renaître de ses cendres. Reconstruire une véritable porte d'entrée au tourisme vert et blanc du Larmont ne fut pas une mince affaire. Des enjeux économiques indéniables, désormais du ressort de l'intercommunalité, mais une inertie terrible, pour des raisons qui dépassent le commun des mortels, budgétaire et/ou politiques, sans aucun doute, mais va savoir! Après bien des turpitudes, ça y est enfin!
Le Gounefay nouveau est arrivé! Avec deux mois de retard sur l'horaire annoncé (une paille, après plus de 12 années!), en plein hiver polaire, mais juste à temps pour les vacances de février 2012. Restaurant, salle de séminaire, accueil du ski, salle hors sac, l'offre est totale. Une sélection drastique, style Masterchef, a été mise sur pied pour choisir le nouvel élu restaurateur parmi trois candidats. Une option gastronomique courageusement défendue par la responsable du projet, même si elle ne fut pas du goût de tous les élus locaux, a permis à Alice et Christophe Carel de prendre possession des lieux. Christophe a été formé à l'école Guignard, en Suisse voisine, à Orbe, où il a passé un certain nombre d'années. Une bonne école, qu'il faut savoir quitter, même un peu poussé, afin de prendre son envol. Ici, point de spécialités fromagères du pays, au grand dam de certains autochtones, mais une volonté de mettre en avant les produits locaux avec une touche personnelle, de la vraie cuisine, élaborée et goûteuse. Le cochon est bio, élevé sur le Larmont, à Simon Pion, tout comme l'agneau, servi en carré fourré aux piquillos. Une cuisson parfaite, une découpe exceptionnelle et un superbe goût d'ici, mâtiné d'ailleurs.
La Burratina, c'est l'ouverture vers l'Italie, servie avec des tomates d'antan et une salade bien aromatisée. Une grande première dans le Haut-Doubs, que de pouvoir goûter à ce must des caves à manger parisiennes. Il n'y a pas de raison d'en être privés, surtout que l'Italie n'est finalement pas si éloignée...
On n'oublie pas si facilement que ça tant d'années passées au service de la Confédération. Le meilleur dessert de là-haut, c'est cette "Éclaffée de meringue" à la double crème, fruitée et fleurie. Tout se mange, pas question de recracher la moindre pétale. Et cette double crème (de la Gruyère?), mmm! Même si ce n'est pas très raisonnable, du moment que ce n'est pas très souvent...!
Pour ce qui est des vins, la carte, résolument novatrice au départ, a dû subir quelques modifications pour s'adapter à tous les goûts et toutes les bourses. À côté de la sélection initiale, effectuée par Stéphane Planche, des Jardins de Saint-Vincent, quelques bouteilles passe-partout ont réussi à se glisser, pour contenter les amateurs de Bordeaux du dimanche, y compris les cadets. Mais boire une Tranche de Jambon, avec son carré d'agneau ou son épaule de cochon du Larmont, voilà qui réjouit le palais et le cerveau. Un vin qui a d'la gueule!
S'il est désormais acquis que, sur le Larmont, on y mange bien, l'offre reste variée, censée permettre à tout un chacun d'y trouver son compte. Trop sophistiquée pour une auberge de montagne, la cuisine de Christophe Carel? D'un excellent rapport qualité-prix, surtout, avec ses deux menus à moins de 30€. Sur l'autre versant, aux Granges d'agneau, c'est la gloire des spécialités montagnardes Chez Magloire. Les rœstis y font recette, il y en a donc pour tous les goûts.
Mais cette montagne pontissalienne a encore bien d'autres choses à raconter. Truffée de forts, construits au XIXème siècle dans le cadre du système défensif Séré de Rivière, elle constitue le dernier rideau défensif jurassien côté français. Plus que le Fort Mahler du Larmont inférieur (en photo ci-dessus), le Fort Catinat, dit du Larmont supérieur, en est un remarquable exemple. N'ayant quasiment jamais véritablement servi, abandonné depuis longtemps par l'Armée française, il sert désormais partiellement à l'affinage de jambons. Tandis que d'autres forts de ce type, à Saint-Antoine ou aux Rousses, se sont reconvertis dans le fromage de Comté. Il n'y a pas de sots métiers...
La moyenne montagne, c'est surtout, et avant tout, un alpage, indispensable à l'équilibre du milieu, qui serait totalement rongé par la forêt sans cela. La plus célèbre des fermes du Haut-Doubs, c'est celle des Miroirs, mondialement connue dans les milieux cinématographiques sous le nom des Granges brûlées, surtout dans sa version enneigée, lorsqu'elle était habitée à l'époque par Simone Signoret, Alain Delon et Paul Crauchet. Actuellement, elle n'est occupée que l'été par d'anonymes fermiers venus des Verrières de Joux helvétiques, dont la présence est bien plus indispensable que celle des vedettes du cinéma. Et elle arbore ainsi fièrement le drapeau de la Confédération, quelques mois par an.
Tourné entièrement dans le Doubs, aux Miroirs, à Pontarlier, Besançon et dans le petit village de La Chaux de Gilley, les Granges Brûlées n'en finissent pas de marquer la mémoire des montagnons d'ici.
Si l'on continue d'ascensionner la montagne, jusqu'à son sommet, il ne sera pas impossible de rencontrer, par temps humide, quelques escargots à la marque distinctive. Peinturlurés d'un T, qui veut dire Tonton, ils sont la propriété implicite de l'ermite du Larmont, qui marque ainsi son territoire et son garde-manger, là où il vit depuis plus de 40 ans, une grande partie de l'année, à 1300 mètres d'altitude, dans une ancienne cabane d'éclaireurs passablement remaniée. Figure du paysage, au même titre que la moindre des pierres du massif jurassien, Jean-Pierre Vernier écume les champs et les bois, se nourrissant quasi-exclusivement de champignons et d'escargots, qu'il partage volontiers avec ses amis qui viennent lui rendre visite. Ancien sportif accompli, ex-plongeur de haut vol, il s'est reconverti dans le fromage avant de finir sa carrière sur les chantiers en Suisse. Désormais reconverti dans la descente (notamment de Pontarlier-Anis, l'apéritif local succédané d'absinthe), il est paré pour résister aux froids sibériens qui peuvent régner sur les crêtes. Et à 69 ans cette année, il est encore parfaitement conservé, notre Tonton ...
Y'a pas, la montagne, quand ça vous gagne, c'est dur de la quitter! Mais c'est tellement beau, depuis là-haut, pourquoi vouloir redescendre..?
Olif
P.S.: on pourra lire également un joli portrait de Tonton, paru dans la Presse Pontissalienne, feuille de chou locale en cliquant sur la page0011.pdf
Les vins de Saint-Joseph sont à prendre au sérieux. Même quand ils sont partenaires d'un festival national des humoristes, dont c'est (déjà) la 24ème édition, comme le temps passe. Humour et granit, aucune incompatibilité. Se fendre la gueule pendant le festival, à Tain ou Tournon, ou se la casser, dans les coteaux pentus du lieu-dit le Saint-Joseph, faut choisir. Parce que tailler, rogner ou vendanger encordé, dans le Saint-Joseph ou sur un autre coteau de l'appellation, mine de rien, c'est une sérieuse affaire. Sans rire.
Les 1200 hectares de l'appellation, étirés sur 50 km de long, font la jonction entre la Côte-Rotie et Cornas. Une bande granitique, sculptée par les méandres du Rhône, d'exposition sud-est prédominante, entre Chavanay au Nord et Guilherand au Sud, qui nous a été présentée depuis le Saint-Joseph par Jérôme Coursodon. Au cœur de l'appellation, Mauves, ses vins Saint-Joseph, ses fruits, son marché journalier mai-août, coincé entre l'entrepôt du bricolage et un magasin sportif.
Le vin de Mauves, célébré par Victor Hugo dans les Misérables. Souvenez-vous: la petite Cosette qui allait emplir son seau d'eau de bon vin de Mauves au puits des Thénardier et qui s'est pris une rouste -méritée, vu le prix où il était commercialisé à l'époque- pour en avoir renversé une goutte sur le carrelage et, plus loin dans le livre, Jean Valjean qui a vu rouge après avoir abusé du Mauves chez l'évêque, lui tirant ses petites cuillères, et se conduisant par la suite comme un malotru avec le petit ramoneux, sacré Victor, toujours le mot pour rire, quelle imagination fertile et débridée!
Saint-Jo a de l'humour, donc, quand il s'agit de communiquer, mais question gastronomie, pas question de rigoler! Surtout après une achtement belle pièce de théâtre revisitant avec brio, humour et panache les trois mousquetaires, du haut du mât et au fond à gauche.
Deux belles adresses de miam à ne pas manquer, donc, au choix. L'une rive droite, l'autre rive gauche. À Tournon, Carafes en folie, initialement retenue, mais abandonnée pour cause de foire aux oignons, censée paralyser la ville. Une adresse visitée ce printemps et déjà approuvée. Carte bistrot, originalement présentée sur bouteille (vide) et parfaitement exécutée par le chef (sans sommation), large choix de vins, pour tous les goûts, y compris les miens. Je me faisais un plaisir d'y retourner. Finalement, nous resterons sur la rive gauche, sans perdre au change.
Le Mangevins, c'est ouvert depuis relativement peu de temps, mais le tout Tain s'y presse déjà. Cuisine genre bistronomique, impressionnante de maîtrise et de précision, franchement épatante, et qui m'a fait forte première impression, comme ces petites cuisses de cailles confites, servies sur une crème de Tarbais, suivies d'une pièce de bœuf cuite à la perfection et d'une pêche rôtie au sirop de verveine.
Carte des vins très fournie, laissant une large place au Rhône, évidemment, dans ce qu'il a de meilleur, pour tous les goûts également, mais ouverte sur les autres régions, y compris le Jura. Et aussi le Beaujolais. Ici, vins fins et gamelle soignée. Même les filles sont belles. Que demander de plus Ultime?
Saint-Jo a de l'humour, mais sait être sérieux lorqu'il s'agit de goûter sérieusement à ses vins. Le petit échantillonnage dégusté, lors de ce petit voyage de presse estival et festif, entre théâtre et vélo-rail, organisé par Rouge Granit (y a-t'il nom plus prédestiné pour gérer le communication de l'appellation Saint-Joseph?), ne manque pas de personnalité et la diversité de style sait s'affirmer. Il n'y a guère que les festivaliers nationaux des humoristes que ça ne fasse pas rire!
Olif
P.S.: je ne résiste pas à vous narrer la meilleure blague qui circule en ce moment au festival national des humoristes viticoles, du côté de Tain: quelle est la différence entre la colline de l'Hermitage et un insecte? Le nombre d'antennes, évidemment!
Depuis le temps que je fréquente la communauté web du vin, j’ai déjà eu l’occasion de répondre à pas mal de sollicitations concernant les bonnes adresses jurassiennes. Il en figure un certain nombre, éparpillées sur ce blog. Ce billet constitue une version réactualisée de ce billet-là, toujours d'actualité par certains des commentaires parfois très avisés qui y font suite.
Pour permettre à tous ceux susceptibles d’être intéressés d’y accéder plus facilement, voilà qui devrait faire l‘affaire, un genre de mini-guide Olif du Jura viticole, gastronomique, touristique et hôtelier. Un truc complètement subjectif et non exhaustif, à enrichir au fur et à mesure de mes propres découvertes ou de celles des autres, mais qui devrait permettre à tout un chacun de programmer au mieux son séjour dans cette belle région qu’est le Jura, et de ne pas passer à côté de quelques adresses incontournables.
A boire, à manger, à dormir, à visiter, à découvrir, à déguster, le Jura version Olif, où je vous encourage à venir piocher ce qui vous fait envie, si jamais vos pas ou vos roues vous guident vers ces petites montagnes d’une grande richesse touristique, là où naissent les légendes.
Je vous le propose dans une version incomplète perpétuelle, « en construction ». Il sera à jamais inachevé mais modifié régulièrement par la suite, dès que j'aurai 5 minutes ou encore lorsque l'on m'en fera sentir courtoisement le besoin.
Envie de Bretagne, limite en manque. La thyroïde en berne, les glandes en pente. Et, du coup, Despentes, ça en fait plus d'une. Breizh-moi! Oh! oui, prends-moi toute! Comme une voix insistante en mon phare intérieur. À une pareille invite, impossible de résister! C'est parti pour un tour d'Armorique, beurre salé, crêpes et chouchen à volonté.
Mor bihan
La petite mer a tout d'une grande. Surtout lorsqu'il s'agit de la traverser, jusqu'à Belle-Isle, la bien nommée. Comme les biscuits. Après une halte à Quiberon, via la Côte sauvage, pour être sûr de ne pas manquer le bâteau. Plateau de fruits de mer, pour une mise en condition, l'un des plus indigents jamais mangé, dans un restaurant pourtant engageant à première vue, mais dont je tairai le nom, pour ne pas faire de mauvaise publicité à tous ceux qui, à la hauteur, revendiquent le même patronyme à la gloire de l'huître. Justement, des huîtres maigres et mal ouvertes, des bulots et des bigorneaux trop cuits, des crevettes molles et une araignée insipide. Fallait-il manger les coquilles pour se sustenter..? Tout comme moi, le ciel en a pleuré toute la nuit, et le matin aussi. C'est donc sous un crachin battant, le lendemain, qu'il a fallu embarquer pour Belle-Isle. Débarquement sous le soleil, néanmoins, et première journée sous le signe de l'escapade, chère à Docadn. Randonnée en sandales et ciré pour gagner l'hôtel, de Palais jusqu'à Bangor, via l'itinéraire cyclable. Vite rattrapés par la pluie, c'est complètement rincés que nous sommes arrivés à Bangor à l'heure du déjeuner. Ne s'offrait à nous qu'une adresse abritée, au cœur du village: Le Caméléon, Restaurant-Pizzéria. La bâche abritant la terrasse réservée aux touristes, pour pratique qu'elle fût, n'engageait guère. Pourtant, à l'intérieur, le Caméléon est changeant et la chaleur d'une jolie maison bretonne nous attendait. Ça humait la bonne pizza, la bonne humeur et la convivialité. Moules-frites au menu, probablement les meilleures jamais mangées, ça rachetait de la veille au soir. Mollusques charnus et goûteux, largement parfumés d'herbes diverses, grosses frites maison servies dans un bol-cornet, bonne bière bretonne pour accompagner, avec tout ça, la pluie pouvait continuer à tomber. Mais, comme par enchantement, elle s'est arrêtée.
La Désirade est un hôtel*** plutôt classe qui louche sur le concept des chambres d'hôtes. Classé Relais du silence, il est constitué d'un ensemble de maisons bretonnes qui abritent les chambres (quatre par maison), s'ouvrant toutes sur le jardin et la piscine. La table de la Désirade est de l'autre côté de la route. Il faut faire attention en traversant. Elle possède une jolie carte des vins et propose une cuisine faisant la part belle aux poissons et aux crustacés. À l'agneau aussi un peu, dont les troupeaux paissent tranquillement au pied du Grand Phare, tandis que Laurent Voulzy chante dans ta tête: "Bêêêê-lle-Isle en Mer, Marie-Galante..."
Celui qui, à même pas 50 ans, en rentrant d'un bain de mer à la plage d'Herlin, n'a jamais mangé un homard grillé de la Désirade accompagné d'une cuvée L'Argile 2010 de la Rectorie a, en partie, raté sa vie.
Pendant que certains (trop gourmands?) s'essaient au tour du continent en pédalant, d'autres (plus raisonnables?) se sont contentés du tour de Belle-Isle, qui se fait aisément en une journée et 11786 coups de pédale exactement. De la pointe des Poulains à Locmaria, dans le sens des aiguilles d'une montre, il fallait viser juste pour casser une petite graine pendant un gros grain. A Sauzon, par exemple, joli petit village niché au creux d'un aber. Et, comme toujours dans ces situations-là, pour espérer trouver un établissement ouvert, rendez-vous sur le port, où il y a forcément un bistrot.
Le Bistrot du Port de Sauzon, sous-titré Chez Carole, est un bel endroit resté dans son jus. On y vient parce qu'il pleut dehors, mais pas seulement. On y vient pour faire la bise à Carole, imposante patronne du bistrot, que tous les locaux semblent bien connaître, on y vient pour le Ty Punch et le boudin antillais, on y vient aussi pour la friture d'éperlans et, en ce qui nous concerne, les épatantes sardines grillées dans la petite cambuse, à fond de cale. Deuxième petite adresse pêchée au hasard de Belle-Isle et deuxième satisfaction. Ça motive pour remonter sur le vélo, surtout s'il ne pleut plus.
L'un des plus étonnants produits du terroir de Belle-Isle, c'est Kaerilis, Whisky des Highlands maturé pendant quelques années sur l'île et qui y est désormais également distillé, grâce à un superbe alambic rapporté d'Allemagne. Dans la petite échope à deux pas du port de Palais, Fabien Mueller reçoit de 9h57 à 12h02 en saison, mais il peut aussi être joint sur mobile en cas d'urgence whisky ou rhum. 10h17, l'heure idéale pour une petite dégustation en attendant le bâteau. Initiales Belle-Isle, Belle-Isle en Rêve, À l'aube du grand dérangement, autant de déclinaisons du malt écossais soumis aux embruns locaux, censés apporter notes salines et iodées. Et pour finir, un petit aveugle sur un alcool blanc, au premier nez très fruité, qui délivre ensuite de fines notes de céréales maltées. Un whisky brut d'alambic, distillé il y a tout juste 3 semaines...
Penn-ar-bed
Rendez-vous sur la fin des terres, pour un G2 improvisé, une rencontre au sommet entre blogueurs de la première heure, sans # ou @ ni retransmission en direct sur Pinterest, mais avec du vin dans le verre et deux ou trois trucs dans l'assiette. Retrouvailles à Port Rhu, Douarnenez, en plein fest noz. Édouard Nenez est de la partie, ça ne rajeunit pas le fan de la première heure et demie que je suis, ardent partisan de l'extension du dolmen de la hutte. Mais non, rien n'a changé...
La suite se déroulera dans l'intimité de l'auberge des Glazicks, chez Olivier Bellin, qui a transformé en moins d'une dizaine d'années le restaurant ouvrier familial en table deux étoiles à Plomodiern, sur la presqu'île de Crozon. Une cuisine raffinée et cérébrale, dédiée à la terre et à la mer, avec le blé noir comme fil conducteur. Ça frappe très fort dès la mise en bouche.
Du blé noir, il y en a plein les verres. Mais on n'a pas été obligés de les vider. La deuxième salve d'amuse-bouche, c'est la corbeille de l'Auberge. Une sélection de petits pains maisons tous aussi bons les uns que les autres, ce qui n'arrange pas ceux qui essaient de ne pas manger de pain à table parce qu'ils croient bêtement que ça fait grossir. Mention particulière au pain noir à la crevette grise, qui, tartiné d'un peu de beurre aux algues, est un repas à lui tout seul.
Après les tartines et une paire de langoustines cuites à la perfection (dont la grosse pince, découpée au laser ou à je ne sais quel instrument de précision, permet d'en extraire facilement une chair goûteuse), le premier plat est une variation maritime d'un traditionnel breton terrien, le Kig ar farz. Le "kig homardz" laisse bouche bée, devant la précision des cuissons (mmmm, la pince..!) et l'alliance des saveurs. Le petit "mouchoir d'ananas" chipsé sert surtout à essuyer ses larmes devant tant de bonheur papillaire et culinaire.
Il ne faudrait néanmoins pas que le homard éclipse le turbot à suivre, dont la chair fond sous la langue. Pas de vin du Jura à la carte, mais un très beau Chablis 2010 de Thomas Pico, suivi d'un Ayze Le feu 2010 de Dominique Belluard. Densité et profondeur du gringet ont parfaitement épousé les formes du homard et mis le turbo avec le poisson. Pour le pré-dessert (variations glacées autour de la fraise) et le dessert (tube chocolaté au basilic, sorbet glacé banane citron-vert), Clotilde, la charmante sommelière, nous recommande un rouge. Plutôt qu'un Bourgogne de Méo-Camuzet, nous serons raisonnables et particulièrement sages, puisque La Sagesse 2009 de Gramenon fera l'affaire. Un accord royal, tant avec la fraise qu'avec le basilic chocolaté. La richesse du millésime apporte la puissance et la rondeur, sans le sucre. Superbe!
Il s'agissait du menu Plaisir, à 90€, et du plaisir, il faut bien reconnaitre qu'il y en a eu, pour un prix somme toute très raisonnable dans ce type d'établissement.
Aodoù an arvor
Trégor, Saint-Michel-en-Grève. Le soleil aussi. Préavis déposé dans les temps par Météo France. Sous la grisaille, le granit de Ploumanac'h ne parait pas si rose. Pourtant, une si belle collection de tarbouifs géants sculptés par la nature...
Côté gastronomie, tout n'a pas été rose, par contre. Il a fallu quelque temps pour trouver ses marques. Au Tire-Bouchon de Lannion, un samedi soir, l'une des rares adresses tentantes repérées après un tour de centre ville, une carte alléchante, genre bistronomique. Finis les ormeaux depuis la veille, pas de chance. Noix de Saint-Jacques à l'andouille de Guéméné feront l'affaire, même si on sent une cuisine légèrement au-dessus de ses moyens. Plutôt sympa, finalement, mais une carte des vins insignifiante. Rejoué la carte Bistrot du Port, à Ploumanac'h, en milieu de randonnée, mais avec un petit peu moins de bonheur cette fois. Une originalité: la carte présentée sous forme de Gazette, avec pas mal de choses à lire sur les petits potins de la région. Les huîtres et bulots sont corrects, sans plus, le Muscadet au verre insipide, on ne connaitra jamais sa provenance. Ce sera sans conséquence.
Étape culturelle et instructive que cette halte en Côtes d'Armor, qui a permis de suivre la Menhir Parade itinérante à Lannion, avant une sortie en mer à l'archipel des 7 îles, un grand moment ornithologique avec fous de Bassan et macareux en pleine forme, sans parler des phocidés, prompts à se faire bronzer sur le premier rocher venu. Une bien jolie balade en mer, qui permet d'apprécier les rochers du chaos de Ploumanac'h sous un angle maritime au retour.
Le gros plaisir gastronomique de cette Côte de granit rose viendra de Trébeurden, à La Tourelle, qui offre une vue panoramique sur le port, à peine parasitée par une verrue architecturale délabrée qui traîne depuis 30 ans environ, et surtout très appéciée lorsque le premier rayon de soleil estival de la saison fait son apparition. La Tourelle, tenue par Laurent Rouvier, vaut le détour. Pour ses fruits de mer, ses ormeaux, sa carte des vins dont on a extirpé un Riesling 2010 d'André Ostertag "Vignoble d'E" (après un excellent Gewurtz VT Fronholz 2007 proposé au verre à l'apéritif) et un Morgon 2010 de Marcel Lapierre.
Il-ha-Gwilen
Ultime étape bretonne avant le retour, Cancale, la pointe du Grouin et Saint-Malo. Un petit bout de côte bretonne que je méconnaissais et qui m'a beaucoup plu, à défaut qu'il ait beaucoup plu, mais quand même un petit peu. Cancale, jolie petite ville où il a fallu jouer une nouvelle fois la carte du port pour trouver un peu d'animation culinaire. Port de la houle, ce n'était pas encore la foule en ce début juillet. Une adresse dédiée à l'huître, ce qui est bien la moindre, et qui devait nous racheter de la déconvenue initiale du séjour. L'avantage ici, c'est que les huîtres viennent en direct du producteur et qu'il y a, en théorie, moins de chance d'être déçu. Une douzaine de N°2, qui valait bien des N°1, d'après le serveur. Certaines un peu laiteuses, c'est de saison. On y perd en vivacité iodée ce qu'on gagne en onctuosité crémeuse, mais elles sont bonnes. Le verre de Muscadet sans nom servi avec ne mérite pas qu'on le retienne, c'est aussi bien.
La pointe du Grouin n'en manque pas, de groin. C'est un pic, c'est un cap, que dis-je, c'est un cap, c'est une péninsule! C'est très touristique, mais c'est surtout très joli, tout comme le retour sur Saint-Malo par la côte. Terminus Rothéneuf, pour une dernière nuit bretonne dans une chambre d'hôte qui louche vers l'hôtel. Villa Esprit de famille est le nom de cette immense villa ancienne, rénovée avec goût, et qui abrite quelques chambres et même un gîte. Le petit déjeuner est royal, avec toute une série de petites confitures maison à se damner.
Le soir, il était prévu de manger aux Buveurs de Lune, la seule adresse bio/nature repérée sur le net avant le départ et que l'on se réjouissait de découvrir. Malheureusement, les Buveurs sont fermés les soirs d'éclipse. Et aussi les lundi et mardi. Toute l'année, juillet compris. Comme s'ils ne savaient pas que, nous, on est en vacances tous les jours! Désireux de rester dans un esprit bistrot, c'est Intra Muros que l'on a trouvé notre bonheur. Le Bistro de Jean nous a alors sympathiquement accueilli. Une jolie carte, tournée vers la mer, mais avec quelques classiques "bistrot", comme une terrine maison. Les filets de sardines marinés sont tout simplement excellents, le poisson à suivre plutôt pas mal, malgré une sauce un peu chargée. Le service est agréable à tous points de vue. Seul bémol, la carte des vins est un peu déprimante, ce n'est pas ce soir-là qu'on aurait pu décrocher la lune en buvant.
Fin du Breizh tour, pour le meilleur, et (pas trop) pour le pire. Alors, heureuse?
Olif
P.S.: pour tout savoir sur Édouard Nenez et ses Princes de Bretagne, ou juste comprendre un petit peu la foi qui les anime, il faut avoir regardé l'Île aux choux-fleurs.
Enclave franc-comtoise en terre catalane, La Table de Cuisine est dressée à Saint-André, approximativement entre les deux Banyuls, celui des Aspres et l'autre, sur vin et sur Mer. Faut-il y voir un signe ou un symbole, celui de la croix de Bourgogne, largement adoptée par les soldats comtois, du temps où la Franche-Comté était encore espagnole? Martine et Laurent Brozzetti, franc-comtois de naissance, ont donc pris la route de la Catalogne pour y poser leurs valises, après avoir écumé le Haut-Doubs et la Suisse voisine, au sein de la célèbre maison Guignard, située à Orbe. Lequel Philippe Guignard n'a pas été contraint de fermer sa Bréguette une fois que Laurent fut parti sous d'autres cieux, je suppose.
Ce soir-là, attablés à la cuisine, mais en salle, 4 personnes, 4 chaises, 4 couverts. Juste après un apéritif-dégustation furtif à Trouillas, le temps d'apprécier, en compagnie de Frédérique Barriol-Montès, les dernières nées du domaine de la Casenove (Les Clares 2007, joli blanc rafraichissant et complexe, La Colomina 2011, rouge de soif particulièrement gouleyant, et La Garrigue 2009, rouge plus structuré mais aux tanins frais).
Un apéritif pas tout à fait terminé, puisqu'après, il fallait oser Joséphine, Crémant de Limoux par Gilles Azam. Jolie bulle tonique et fruitée, entamée par Christophe Guittet qui guettait notre arrivée. Christophe Guittet est un breton d'inspiration jurassienne, qui a posé ses valises à Tautavel il y a une dizaine d'années, après un séjour en Bresse, où il a pratiqué le culte de l'oxydatif via le Jura voisin. Ombre et soleil est le nom de son domaine. Sa part d'ombre oxydative, Christophe aime la mettre en pleine lumière. Si certaines de ses premières expériences ont pu paraitre déroutantes à des palais novices, ses dernières cuvées sont un peu plus dans les clous, notamment un très joli blanc 2011, ainsi qu'un rouge de carignan frais et désaltérant, tous deux tirés de la cuve.
L'oxydatif, c'est néanmoins toujours son rayon, avec deux cuvées de rancio sec, non mutées, élevées en bonbonnes de verre. Ox-idée(s) 2004 et Soleil de midi 2006, deux curiosités aux notes de malt et d'épices pour la première, de curry et de mirabelle pour la deuxième, avec un équilibre digne de l'Air du temps d'un autre Christophe que je connais, valaisan celui-là, et également spécialiste de l'élevage long avec plus ou moins d'oxydation.
Perfectionniste à la cave comme en cuisine, Christophe Guittet propose, sur la contre-étiquette de chaque vin, un accord culinaire parfait, doublé d'un accord musical aussi précis que pointu. Une mosaïque d'émotions pour chaque verre, finalement, même si d'autres options sont possibles. Comme, par exemple, anchois au vinaigre de Collioure suivis de morue à l'huile d'ail de Lautrec, pour ce qui me concernait ce soir-là.
L'accord le plus époustouflant, ce fut pourtant au dessert. Les pommes sautées au caramel de curry et vin jaune, glace à la noix, rayonnèrent en compagnie du Rivesaltes ambré 15/102001 du domaine de La Casenove. Hors Jura, il n'y a qu'en Roussillon que l'on peut se permettre une telle fusion avec un dessert jurassique!
La Table de Cuisine
8A rue de Taxo
66690 Saint-André
0468954206
Christophe Guittet, Domaine Ombre et Soleil
2, rue de Belfort
66720 Tautavel
Étienne et Frédérique Montès, Domaine de La Casenove
Le 12 mai, à Calce, les caves se rebifferont une nouvelle fois. Traversé par la D18, chère à Olivier Pithon, Calce, Roussillon, petit village perdu sur les hauteurs de la vallée de l'Agly, fera pour la 7ème année consécutive une opération caves ouvertes avec séance dédicalce par les vignerons du village. And guests. Six invités, triés sur le volet, venant de toute la France et répartis chez chaque vigneron-hôte. Pas chauvins, les Caleçons et les Calzones, si tant est que les gens du cru s'appellent comme ça. Pas encore complètement chauves non plus, même si certains arborent fièrement et majestueusement le bonnet pour se protéger de la tramontane et d'un décoiffage intempestif.
Le vignoble calc-ique est constitué d'une mosaïque de sols variés. Il n'y a guère que l'Alsace qui puisse se prévaloir d'être aussi géologiquement diversifiée. Le défi que Jean-Philippe Padié s'est fixé est que chaque type de sol soit représenté au sein de son domaine et, de ce fait, puisse se retrouver dans chacun de ses vins. Un genre de dé-calco-manie, quoi! Constitué au départ de micro-parcelles, la plus emblématique est sans aucun doute la première qu'il a acquise, ceinte d'un mur de pierres sèches et baptisée humblement Clos du Moucheron, en hommage au Clos des Mouches bourguignon, région où Jean-Phi a passé une grande partie de son enfance. Il faut bien avouer qu'il a de l'allure, ce moucheron, avec ses vieux carignans plantés en foule, désormais uniquement travaillés à la pioche, et ses pieds de lavande dans l'inter-rang. L'herbe dans les vignes, c'est quand même bien plus joli, à partir du moment où, évidemment, elle ne concurrence pas la plante. Certaines, comme le trèfle, ont même un effet bénéfique en libérant des substances azotées dans le sol, évitant un apport exogène. Une forme d'autorégulation bienfaitrice, en fait.
Plus de 14 hectares en tout pour le domaine Padié, parce qu'il est dur de ne pas reprendre telle parcelle de vieux grenache blanc, même si elle fait partie d'un lot plus important dont le vigneron ne sait pas bien que faire dans un premier temps. Mais, comme Jean-Phi est doté d'une grande perspicalcité, nul doute que, à terme, l'investissement ne sera pas vain (mais, finalement, quand même un peu vin, on espère). Sauver les vieilles, un leitmotiv qui reviendra tout au long de ce périple septimanien, en Languedoc comme en Roussillon, pour ne pas voir tout un patrimoine viticole disparaitre purement et simplement.
Au fil des différentes failles géologiques, les vallées, appelées "coumes", offrent des terroirs et des paysages variés, somptueux. On passe de l'une à l'autre avec émerveillement, traversant dans le même temps les vignes des autres prestigieux vignerons rebiffants (Gauby, Matassa, Pithon...). Au loin, majestueux, le Canigou met la patée à tous les sommets avoisinants. Même la tête dans les nuages, même par un temps petit sibérien, ce n'est pas une montagne pour les chiens!
Pour manger de la cuisine calc-ifiée, pas besoin de se faire prier, il faut aller au Presbytère. Bistrot de pays multi-services, on peut venir y boire un coup et se confesser au bar, en plus de s'y régaler de plats goûteux du marché, accompagnés des vins des vignerons calc-inés, vendus à prix propriété.
Ce jour-là, après une D18 2010 à l'apéritif, avec une planchette de charcuteries hispanisantes, puis une autre de fromages bio du coin, Calice 2011, Petit taureau 2010, Ciel liquide 2007, Fleur de cailloux 2010, et Milouise 2010 se sont succédés. Suivis de quelques extras jurassiens, qui ne sont pas parvenus à éclipser les blancs de l'Agly, même sur l'assiette de fromages.
Le seul Calice que l'on puisse boire jusqu'à la lie avec délectation...
Calce? Il n'y a pas plus bel endroit dans le Roussillon! Excepté Trilla, peut-être?
Olif
P.S.: bon, sérieusement, ils s'appellent comment, pour de vrai, les habitants de Calce?
Un chef étoilé, parfaitement secondé par sa moitié, un ancien arbitre international, une ex-sportive de haut niveau, venue à deux, normal pour une biathlète, un journaliste écrivain, ne cédant que rarement à la panique, le président du syndicat du Mont d'Or, ben oui, quand même, 5 blogueur(euse)s, âprement présélectionnés, et moi et moi et moi...
Désormais épreuve reine de la saison fromagère comtoise d'hiver, le combiné gastronomique se joue en deux temps, trois mouvements et cinq participants. Un concours de recettes mis en place par le syndicat interprofessionnel du Mont d'Or pour valoriser ce noble produit du terroir franc-comtois, de plus en plus consommé sous forme de boite chaude, ce qui est pourtant loin d'être mauvais. Il s'agissait là de démontrer que ce fromage pouvait figurer à titre d'ingrédient culinaire à part entière dans des recettes inventives et créatives. Ils furent une trentaine de blogueurs de la sphère culinaire à tenter le grand saut, seuls les 5 premiers au tremplin furent retenus pour la suite de la compétition. Venus de la France entière, et même de Belgique ou du Berry central, les compétiteurs ont vécu une rude et endurante journée.
La première difficulté est apparue lors du tout premier ravitaillement, à l'auberge du Bon accueil, chez Marc Faivre, où se déroulait l'épreuve: ne pas se laisser gagner par le découragement après n'avoir fait qu'une bouchée (trois en tout) de ses pommes de terre fourrées au Mont d'Or.
Et puis, après le Chef, ce fut l'heure pour les participants de passer en cuisine. 5 blogueurs culinaires dans la cuisine d'un pro, inutile de dire qu'ils s'en sont donnés à cœur joie. Et ils ont mis un beau bazar. Avant de tout ranger, avec fair-play.
Le coup de sifflet initial fut donné par Michel Vautrot, jamais avare d'une anecdote sur son exceptionnelle carrière, mais mieux vaut éviter de parler vidéo-arbitrage quand on est pressés. Le seul carton de Jaune fut pour Mamina, elle en avait besoin pour sa recette. La rencontre, qui s'est déroulée dans un excellent état d'esprit, dura une bonne partie de l'après-midi. Depuis la tribune d'honneur, ce fut un bonheur de les voir s'agiter, cuisiner, papoter et popoter. Au coup de sifflet final, les juristes sont passés à table, pour un 4 heures d'anthologie, genre dînette d'exception. Les 5 plats se sont succédés et, de façon improvisée, aurait pu constituer un repas complet "tout Mont d'Or". Sans fromage avant le dessert, toutefois. Pour les recettes détaillées originelles, il faut cliquer sur les photos.
Petit voyage au pays où nait le Mont d'Or et Risotto très crémeux au… Mont d'Or forcément… par Dorian, pourquoi est-ce qu'il nous raconte ça, d'ailleurs?
Après avoir bien goûté délibéré, surtout le Jury, tout le monde s'est retrouvé au pied du tremplin de Chaux-Neuve. En cas d'égalité, une ultime épreuve de saut à skis était prévue pour départager les ex-æquos. Si le match fut serré, il n'y eut pourtant pas besoin d'y recourir. Dommage? La remise des prix se déroula dans cette ambiance sportive, avant les épreuves officielles de Combiné Nordique qui avaient lieu le lendemain.
Ayant vaincu le signe indien et le syndrome de Poulidor qui la poursuivait dans les concours de cuisine, Mamina l'emporta d'une courte tête, pour le goût exceptionnel de la crème de Mont d'Or au vin jaune qui est venu farcir ses petits éclairs. Un trophée bien mérité pour cette grande cuisinière qui ne manque jamais de mettre le vin à l'honneur dans ses recettes (souvenez-vous...) et qui a confessé pouvoir sombrer dans l'addiction par amour du Vin Jaune.
Une belle journée, sous le signe du bon accueil, de la rencontre, du Mont d'Or et du Combiné Nordique, ça valait bien un bel article dans l'Est Républicain du dimanche...
Après deux romans-pochades fleurant bon le terroir (Panique à la fromagerie et Panique dans les vignes du Jura, aux Éditions Cabédita), Jean-Claude Barbeaux n'a pas paniqué et il nous revient en grande forme pour un précieux petit opus relatant 60 recettes pour 60 vins du Jura, publié aux Éditions du Belvédère, une maison d'édition franco-suisse avec vue.
Un ouvrage doublement précieux, puisque, après un joli texte sur "la multiplication des vins du Jura", remarquable synthèse actualisée en 30 pages sur la viticulture et le vin jurassiens, 17 chefs soigneusement sélectionnés proposent 60 recettes à accorder avec 60 vins du Jura. Des grands chefs étoilés (Jean-Paul Jeunet, Pierre Basso-Moro, Romuald Fassenet,...), le meilleur chocolatier du Cosmos (Édouard Hirsinger), d'excellentes adresses (La Balance, Le Grapiot,...) et de très beaux endroits, moins clinquants mais tout aussi claquants et recommandables (Les Claquets). Un panorama de la gastronomie jurassienne avec des accords somptueux sur des vins de Stéphane Tissot, Fanfan Ganevat, Emmanuel Houillon, L'Octavin, Julien Maréchal, Jean-Claude Crédoz, Catherine Hannoun, Alain Labet, Philippe Bornard, Michel Gahier, La Tournelle, Étienne Thiébaud,... Largement de quoi se sustenter et s'abreuver. Mais pourquoi en faut-il toujours plus? Oui, pourquoi?
C'est un peu l'équivalent du 13ème coup de minuit, du 8ème mercenaire, du 4ème mousquetaire, du bouillon de 12 heures. Où est-elle donc, cette 61ème recette? Et le 61ème vin, par la même occasion? Tenue aussi cachée et secrète qu'un bonus de CD, tous les lecteurs du Blog d'Olif vont en avoir la primeur et l'exclusivité. Si Jean-Claude Barbeaux avait fait de son ouvrage un roman de terroir, on aurait pu l'appeler "Panique à la cuisine". Parce qu'à la limite, c'est vrai qu'une recette pareille, ça fait peur. Un plat qui a déjà soulevé des haut-le-cœur à bien du monde, mais il fallait le refaire, dans une version épurée, pour le rendre accessible à tous. Huîtres décoquillées, cancoillotte chaude, 2 minutes sous le gril et c'est tout. À la portée du premier ostréicancoillophile venu. Un régal, avec le vin qui va bien. Par exemple, un Arbois Saint-Paul 1987 de Camille Loye, où l'oxydation ménagée avec un grand A, ou un grand O, où tout ce qu'on veut, à partir du moment où c'est grand. Encore juvénile il y a quelques années, il entame désormais sa phase de plénitude, avec de l'enrobage sur sa belle acidité. Miel et épices au firmament, puissance et longueur, pour encore de belles et longues années.
Ceux qui n'aiment ni les huîtres, ni la cancoillotte, pourront s'arrêter de compter à 60 et aisément se contenter de la lecture du livre de Jean-Claude Barbeaux, disponible dans toutes les bonnes épiceries, les bons restaurants et les bonnes librairies franc-comtoises ou dans n'importe autre endroit où l'on vend des beaux et bons livres, même sur le Web. Un cadeau indispensable pour la nouvelle année, je dirais. Que je souhaite belle et bonne à toutes et à tous par la même occasion.
Olif
P.S.: pour une 62ème recette, celle du coq au vin jaune et morilles, on se plongera avec délectation dans le blog illustré de Guillaume Long.
Fraichement canonisé à Bruxelles, Glou, Saint-Patron des buveurs, méritait bien qu'on lui souhaite sa fête. Officiellement absent du calendrier, Glou devrait désormais être fêté avec tous les autres Saints, début novembre. Sans aucun lien avec la fête des morts, évidemment. Ivres ou pas. Retour indispensable sur ce week-end bruxellois où les cadavres n'ont pas porté de costard, mais se sont ramassés à la pelle.
Le Manneken-Pis...,
Lorsqu'il a proposé à la cantonnade facebookienne et/ou bloguesque de venir tâter du vin "nature" à Bruxelles, désormais reconnue comme un haut lieu de bistrologie et de pinardologie naturiste, Patrick Böttcher, monomaniaquement Alsace à ses heures perdues, mais authentiquement bruxellois malgré son accent suisse allemand une fois, a essuyé quelques discrets "Non, peut-être". Il y a fort à parier que l'année prochaine, tous les individus concernés vont se fendre d'un "Oui, j'en ai bien peur".
...le glouglouteur aussi.
À peine arrivés, tout juste le temps de s'installer à l'Hôtel Pantone, conceptuel, design, mais extrêmement confortable, c'est possible, j'en ai bien peur. Départ quasi immédiat pour un petit rafraichissement derrière la nuque, Chez Max, Coiffeur pour hommes. L'ancien Bistrot de la Poste a fait peau neuve et renaît de ses cendres sous influence gainsbourienne. Madame Olif aurait bien bu une petite bière, elle s'est tapée une Courge Vernie 2010 et de fines tranches de jambon. Et puis un ou deux autres blancs, histoire d'être en forme pour le repas du soir. Le grand air belge donne soif, d'autant plus que les températures sont plutôt clémentes pour la saison. Mais la Cantillon, ce sera pour plus tard.
Chez Max, Coiffeur pour Hommes (anciennement «Le Bistrot de la Poste ») Chaussée de Waterloo, 550A 1050 Ixelles (Bruxelles ) Tél. : 02 344 42 32 Web : http://www.chezmaxrestaurant.be/
Les Brigittines, aux Marches de la Chapelle, nous attendaient de pied ferme. C'est Dirk Miny, le chef volubile, qui nous a servi à la louche un fabuleux consommé de gibier avec de vraies girolles dedans, avant une exquise pièce de bœuf en croûte de sel et quelques frites, une fois.
L'Alsace, patrie vinique de Dirk, a été à la fête, avant même que des Alsaciens bon teint ne nous rejoignent le lendemain. Un superbe Klevener 2008 de Jean-Pierre Rietsch, avant un Pinot noir 2006 de Patrick Meyer, plus controversé, mais néanmoins aisément éclusé en double exemplaire avant la fin du plat principal. L'heure de la bière avait sonné, tel un serpent à sornettes venant distiller son venin. "Wijn na Bier, Plezier, Bier na Wijn, Venijn." préviennent les Belges méfiants. "Hein?" disent les Français en commandant un fût de Cantillon, tout en salivant déjà à la pensée de la journée du lendemain.
Les Brigittines « Aux Marches de la Chapelle » Place de la Chapelle, 5 1000 Bruxelles Tél : 02/512.68.91 - 02/512.69.57 Web : http://www.lesbrigittines.com/
La brasserie Cantillon, c'était le clou du programme. Surtout effectuée en compagnie de Jean Van Roy en personne. Dernière brasserie bruxelloise intra-muros, elle cultive la levure indigène et la bière artisanale comme peu savent le faire. Une lambic "nature", à l'instar du vin du même tonneau, qui sert parfois aussi au vieillissement de la bière.
Une visite fort instructive, agrémentée de considérations sur l'artisanat, l'industrie et le bio, côté bière, suivie d'une série de travaux pratiques gustatifs qui ne laissent planer aucun doute sur le style de gueuze qu'il vaut mieux boire. On comprend mieux pourquoi la visite de la brasserie Cantillon est un véritable pélerinage pour bon nombre de touristes en goguette à Bruxelles.
Brasserie Cantillon Rue Gheude, 56 1070 Anderlecht (Bruxelles) Tél : +32 2 521 49 28 Web : http://www.cantillon.be/
Après avoir couru la gueuze toute la matinée, il nous restait du pain sur la plancha. Transformé l'espace d'un instant en patio privatif, l'espace vins de Basin & Marot fut une table de premier choix. Antipasti, salade et viande grillée, un menu open qui a permis l'ouverture de quelques quilles, pour se sustenter avant le repas du soir.
Basin & Marot Wines Rue du Page, 90 A 1050 Ixelles (Bruxelles) Tél : +32 2 347 64 66 Web : http://basin-marot.be
Sans rentrer dans le détail, car ce fut éclectique, ce fut bon et nous ne manquâmes de rien. Sauf peut-être d'un peu de soufre, ce qui nous conduisit, en guise de promenade digestive, jusqu'au bistrot à Bout de Soufre, pour un apéritif de reconstitution avant le repas du soir.
Format bistrot de poche et bons vins nature, nous restâmes toujours autant à bout de soufre, pas l'once d'une céphalée à l'horizon.
A Bout de Soufre 11, Rue Tasson Snel 1060 Saint-Gilles (Bruxelles) Tél : +32 2 537 27 00 Fax : +32 498 599 000 Web : www.aboutdesoufre.com
Il valait mieux, avant de franchir la porte du Coin des Artistes, où la cuisine de Jean-Yves en bouche un gros, de coin. Terrine de boudin au foie gras, avant sublime cassoulet maison comme on ne sait pas faire beaucoup ailleurs, y compris dans le Sud-Ouest. Et si certains ne sont pas d'accord, c'est bien volontiers que l'on ira vérifier. Le cassoulet de Jean-Yves n'a rien d'un péteux, d'ailleurs. Les quelques vents parvenus jusque là, sans offusquer les artistes, étaient en provenance du Jura.
Le Coin des Artistes 5 Rue du Couloir 1050 Ixelles (Bruxelles) Tél : +32 2 647.34.52 Web : www.lecoindesartistes.be
Après ce cassoulet d'anthologie, accompagné de moult jéroboam et magnums, suivi d'un repos digestif nocturne bien mérité, commença la partie la plus physique du week-end. Se mouvoir, à pied, jusqu'au cœur de la vieille ville de Bruxelles, depuis Saint-Gilles. Pente favorable, ravitaillements en nombre suffisant. Une petite soupe à l'oignon à La Clef d'or, place du Jeu de balle, sur un air d'accordéon, puis une petite bière, faut pas déconner non plus quand même, avant une autre bière apéritive à la Fleur en papier doré, une des plus vieilles brasseries bruxelloises, restée dans son jus XIXème siècle, mais attention, ce n'est pas un musée, là-bas, on consomme.
Détour par la Grand Place et amical salut au Grand Homme qui fait pipi debout, coucou à sa petite sœur espiègle, Jeanneke, et ultime bière apéritive au Délirium Café, avant d'échouer place Sainte-Catherine, avec la Mer du Nord pour dernier terrain vague.
Écoutons donc craquer sous la dent les sublimes beignets de crevette et les bulots sauce pimentée, et laissons gambader les Gras Moutons de Marc Ollivier sur le trottoir qui nous a servi de salle de restaurant pour un déjeuner exceptionnel malgré le tout petit chemin de pluie pour unique bonsoir qui est venu nous rafraîchir en fin de repas.
Sans compter qu'à l'apéritif, nous avons eu le bonheur de tremper nos lèvres dans un verre de Zwanze 2011. La Zwanze, c'est un humour typiquement bruxellois, fait de gouaille et de dérision. C'est aussi une cuvée spéciale et limitée de Cantillon créée pour le fun par Jean Van Roy et destinée à être consommée dans le monde entier le même jour, celui du Zwanze Day, afin d'éviter une spéculation idiote sur une bière de pur plaisir, dont le principal défaut est d'être produite en quantités très limitées. La cuvée 2011 est aromatisée au "Pinot d'Aunis" d'Olivier Lemasson et dessoiffe avec gourmandise. Ce dimanche 30 octobre 2011 fut notre jour de Zwanze, grâce à la générosité de Jean Van Roy et celle de Patrick. Cantillon power, for ever!
Noordzee - Mer du Nord Rue Ste Catherine 45 1000 Bruxelles Tél: +32.2.513.11.92 Fax: +32.2.502.73.04 Web : www.vishandelnoordzee.be
Et après ça, vous reprendrez bien une petite bière? Non, peut-être. "Beer is the answer", Jean Moeder en est convaincu. On était venus pour boire de la bière belge, on a bu de la Cantillon, évidemment, mais aussi de la bière italienne. Et on a parlé de bière suisse, française, européenne, franc-comtoise même. Moeder Lambic,Fontainas ou Saint-Gilles, le meilleur bar à bières de Bruxelles? J'en ai bien peur, même si on ne les a pas tous testés.
Vive la bière artisanale et authentique, servie à la pression pour un très grand nombre, grâce à un concept très innovant (chambre froide placée sous le bar, pour raccourcir le plus possible la distance entre les fûts et le gosier).
Moeder Lambic Fontainas 8 place Fontainas 1000 Bruxelles Tél: +32 2 503 60 68 Web : www.moederlambic.eu
Et les frites, dans tout ça? Direction Friture René, alors. Pour une bonne gamelle de moules, à la Cantillon, évidemment, double slash même. Un peu de difficulté à parquer la voiture devant cette ancienne et bonne adresse de friture de rue qui s'est transformée petit à petit en vrai restaurant. Les moules étaient parfaitement bien parquées devant la sauce marole, par contre. Un véritable choc culinaire que la saveur de cette moule crue et charnue trempée dans une sauce vinaigre-moutarde à réveiller les papilles les plus endormies. Avec ces moules parquées, suivies de moules à la Cantillon, frites premier choix, le tout arrosé de quelques belles quilles (du Beaujolais, notamment) et, pour finir, d'une Cantillon, la Saint-Glou s'est terminée en apothéose. Point de thé pour cloturer, mais cela eût été possible, car Nico, le "fils de la maison" s'est pris de passion pour ce breuvage et a élaboré une carte qui devrait laisser rêveur l'amateur, tant la sélection est pointue.
Un immense merci à Patrick "monomaniaquement Alsace" Böttcher, Jean-François Basin-Marot et toute l'équipe des Vendredis du vin Brusseleirs pour leur accueil chaleureux et cette exceptionnelle visite guidée bruxelloise à la gloire de Saint-Glou, patron des buveurs. Glou ne connaissant pas de frontière, il y a fort à parier que sa prochaine canonisation se déroule dans le Jura, du 1er au 4 novembre 2012. Nul doute qu'on en reparle un jour ou l'autre. En serez-vous?
Oui, j'en ai bien peur.
Non, peut-être.
Ne sait pas encore.
Olif
P.S.: mieux vaut tard que jamais, et je ne doute pas que la simple lecture de ce billet va tirer des larmes aux participants de cette première Saint-Glou.
À l'occasion de cette 38ème session des Vendredis du vin, Patrick Böttcher, monomaniaquement Alsace, plus exactement monomaniaquement vin et alcool de toutes origines, tant il est capable d'ingurgiter des quantités de boissons fermentées, y compris de la bière Cantillon et du schnaps suisse allemand, milite pour la SPC, Société Protectrice des Cavistes, ces bipèdes empêtrés dans un tablier à grandes poches qui passent leur temps à monter et descendre les escaliers en colimaçon de la cave pour remonter des bouteilles à la surface, une chance qu'elles ne soient pas tire-bouchonnées dans le même temps.
Mais d'abord, qu'est-ce qu'un caviste, précisément?
1.Employé chargé de l'approvisionnement de la cave en vins.
2.Employé chargé de pourvoir à la boisson des hôtes. Synon. sommelier :
Une fille très jolie, accorte et fine, Line, dirigeait admirablement ce relais galant et tenait lieu de dépensière, d'économe, de caviste et de cuisinière. Fargue, Le Piéton de Paris, 1939, p. 145.
B.−VITIC.Ouvrier chargé du soin de la fabrication des vins. Les celliers aux longs toits clôturaient les cours vastes où les cavistes en tabliers blancs roulaient des tonneaux (Hamp, Vin de Champagne, 1909, p. 177).
Prononc. : [kavist]. Étymol. et Hist. Av. 1790 (Année litt. d'apr. Boiste 1808). Dér. du rad. de cave3* « lieu où l'on conserve provisions et vin »; suff. -iste*. Fréq. abs. littér. : 10.
Cette définition, pour étoffée qu'elle soit, n'est néanmoins pas exhaustive. Le caviste qui nous préoccupe ici est plutôt un indépendant. Dans des temps immémoriaux, on l'appelait parfois "marchand de vins", lorsqu'il sillonnait la campagne profonde dans son petit camion en déposant par-ci par-là ses vieilles caisses en bois de litrons de rouge. Il n'était pas souvent de sexe féminin, accorte et fin. Il s'appelait quelque fois Marcel plutôt que Line, s'habillait comme son nom l'indique, sous son tablier, et certains étaient même moustachus. Désormais, le caviste tient une échoppe qui a généralement pignon sur rue et tente d'abreuver la population locale autrement, en bouteille de 75cl, voire en BIB de 5 ou 10 litres. Il est également là pour prodiguer une activité de conseil, idéalement judicieuse et avisée. Il est le chaînon, pour l'instant non manquant, entre le vigneron et le buveur, qu'il soit franc, bicéphale ou trilingue. Mais si on le délaisse trop souvent, il pourrait finir par disparaitre, ce qui serait évidemment préjudiciable, à lui ainsi qu'à ses clients par la même occasion, et il existe de tristes exemples récents. Abandonner son caviste habituel l'été, c'est grave et cruel, mais moins quand même que de ne boire plus que de l'eau ou du mélange de différents vins issus de la Communauté Européenne. Partir un peu, ce n'est pas mourir beaucoup et c'est même parfois un mal nécessaire. Sans aller jusqu'à confier ce petit être à une pension pour cavistes nécessiteux lors de son départ en congés, on se consolera en se disant qu'il fera probablement le bonheur de touristes assoiffés venus en masse en vacances chez nous pendant qu'on est partis batifoler chez eux. Pour lutter contre les grosses chaleurs estivales, le vacancier a forcément besoin de se vinidrater, entre deux randonnées, deux visites de musée ou deux parties de pétanque et il faut alors lui souhaiter qu'il y ait toujours un caviste près de son lieu de villégiature. Le choix est large, dans toute la France, et même un peu plus loin.
Par exemple, pas un seul campeur d'Ermont-plage n'envisagerait de partir du 9-5 sans goûter aux Cépages d'Ermont. S'enliser dans le Marais poitevin, oui, mais à condition de cueillir au moins une foisLe Fruit Défendu. S'aventurer jusqu'au Bout du monde sans pousser la porte de laCave de la Presqu'île serait pure hérésie. Se perdre dans la haute vallée de l'Orb sans s'asseoir à la table de la cave/bar-à-vins Chai Christine Cannac ferait désordre. Visiter la Capitale des Ducs de Bourgogne sans se laisser porter O Gré du vin serait susceptible de faire monter la moutarde au nez. S'égarer dans le Jura sans jardiner chez Saint-Vincent ou goûter à l'Essencia des choses paraîtrait incongru. Se goinfrer de jésus à Morteau sans s'humecter le palais chez Terra Vinéa risquerait d'être étouffe-chrétien. Personne ne quitterait Bû sans avoir bu chez Baraou. Faire la Grasse matinée sans rendre visite à l'Espace Vins du Spar face à la gare, quel désespoir! Et il y en a tellement d'autres, dans chaque recoin de la France, même non viticole, qu'il serait illusoire de vouloir tous les répertorier et les citer dans ce seul billet. Ou alors il faudrait faire un guide. Chiche?
Finalement, le pire, c'est quand le caviste abandonne ses propres clients, coincés pour cause de boulot, et part lui-même en vacances! La vie est moche, parfois...
Le plateau du Larzac, ses grands espaces sauvages, ses Templiers très hospitaliers, ses Hospitaliers qui n'ont pas tant plié, ses canyons, ses brebis (pas toutes égarées), son gaz de schiste (non merci!), son fromage de Roquefort à manger seul ou en Société, ses bouddhistes et leur plus grand temple d'Europe... Zen. Foin de polémique à deux balles à Bloglouglou Corral, causse toujours, retour au réel et à la vraie vie, celle faite de rencontres authentiques, avec des vrais gens, des vrais paysages et des vrais vins. Oui, quand même aussi, parfois. Ce n'est pas parce que l'on est en vacances qu'il faut se laisser aller et ne pas boire bon!
Le Caylar et la manière
Blotti entre le Roc Castel, vestige de son passé, et l'aire de service de l'A 75, symbole de son présent et de son futur, le petit village du Caylar vit à son rythme. L'orme séculaire de la place a été sculpté, d'abord par le temps, puis par un artiste local en 1987, lorsque la sève l'a quitté.
Cette rue du Quai (lard ou cochon?) ne conduit pas au Barry du Grand Chemin, la maison d'hôtes où il fait bon dormir et manger. La cuisine de Guy Vandenbroucke, chef belge autodidacte, est particulièrement goûteuse et les viennoiseries du petit déjeuner sont tout simplement les meilleures du monde, causse inclus. Les éclats de rire de Martine et les aboiements de Victor, bouvier bernois de son état, égaient et ponctuent les allées et venues dans cette belle et bonne maison caussenarde qui cultive le Caylar de vivre. Une étape incontournable, avant de basculer dans la plaine languedocienne par le Pas de l'Escalette. Mais on peut aussi s'y arrêter et prendre son temps...
Au fil des Causses
Randonner sur le Grand Causse nécessite de bonnes chaussettes, faute de quoi le bonheur lumineux d'une longue et bonne marche à pieds sera atténué par les ampoules. Paradoxe électrique autant que pédestre. Heureusement, il y a Compeed®. Du Caylar à la Couvertoirade, via le Cros, puis retour au Caylar, 17 km en plein cagnard au milieu des ruffes et des dolomies, ça use, ça use les doigts de pieds.
Un tour de Vis et, quel cirque! Je ne suis pas Navacelles que vous croyez! Tout le long du parcours de la superbe randonnée longeant les gorges de la Vis, au départ du cirque de Navacelles jusqu'à la résurgence de la Foux, en rive droite, le sol est parsemé de blancs petits mouchoirs, masquant pudiquement les excréments des femelles de Petit Poucet ayant perdu l'instinct de faire leurs besoins naturellement dans la nature sans les signaler à la terre entière. Les spectaculaires moulins de la Foux, abandonnés au début du XXème siècle après une crue particulièrement dévastatrice de la Vis, furent magnifiquement restaurés en 1997. Le retour à Navacelles par la rive gauche s'effectue partiellement en balcon au dessus du cirque, sans difficulté aucune, mais n'en est pas moins impressionnant. 10 km pour un parcours époustouflant à couper le souffle et une randonnée 4 étoiles à ne pas manquer pour qui passerait dans le coin!
Sur le Causse noir, c'est le chaos. Ça ne sent pas la naphtaline, même si les dolomites habillent le paysage. L'érosion a sculpté le paysage en donnant des formes spectaculaires aux rochers ruiniformes de Montpellier-le-Vieux, baptisée "Lou Clapas Viel" en occitan par les bergers du bas Languedoc, en transhumance sur le plateau, et qui y voyaient une ressemblance avec la seule ville qu'ils connaissaient, Montpellier.
En suivant la Dourbie, là où Durzon et Barbaresque se rencontrent, point de digue, non. Pas de cul, même si le confluent est à Nant, qui se prononce comme du côté de Montaigu. Une jolie cité monastique, avec son église, ses halles, sa place, ses restaurants. La bistronomie de terroir, concept pourtant très parisien, y a trouvé sa place, à la Brasserie du Claux. Une côte de veau, oui, mais du veau de l'Aveyron, élevé sous la mère. Les grosses frites "maison" croustillent sous la dent, mais sont moelleuses à cœur, très certainement élevées sous la terre. La planchette de charcuterie terroite à mort, élevée au dessus de la mer, sans aucun doute. La cuvée Les Templiers 2007 de la Commanderie de Preissan s'est retrouvée ici en milieu hospitalier pour épauler le veau. Une bien bonne adresse, il faut le dire.
Retour aux fondamentaux, dans la vallée de la Sorgues, à Fondamente, anciennement connue sous le nom de Montpaon. Chez Baldy, le temps semble s'être arrêté. Dans un cadre immuable de peintures murales de paysages locaux, soigneusement restaurées en cas de dégât des eaux, les tripous et les ris d'agneau sont rois. Service à l'ancienne, sur des grands plats maintenus au chaud, cuisine authentique et goûteuse, mise en conserve l'hiver, pour emporter chez soi un peu de cet Aveyron gastronomique historique. Courte carte des vins, mais il y avait au moins un vin de Marcillac pour faire l'affaire avec les ris.
Escapade en Escarpolette
À Montpeyroux, ce Hérault au vignoble si doux, ça balance pas mal pour Ivo Ferreira. Son Escarpolette a le vent en poupe, plus besoin de la pousser beaucoup. Au départ, rien, pourtant, ne le prédestinait à s'installer ici. C'est une succession de rencontres qui l'ont conduit du service en salle à la sommellerie, des restaurants étoilés aux bars à vins, puis à la vigne, de Paris au Jura puis à Bordeaux, de la Tour Blanche au château Le Puy, avant qu'il ne pose ses valises en Languedoc, à une encâblure d'une gare TGV, ce qui est bien pratique pour rester connecté à la Capitale. Premier millésime en 2009 mais il n'y en a déjà plus une seule bouteille à vendre. Les réseaux et les connaissances ont fonctionné à plein régime. Il y en aura un peu plus en 2010, mais, là aussi, il faudra se dépêcher. Les étiquettes sont particulièrement originales, réalisées par une amie artiste, restauratrice au musée Picasso. Quand les ceps de vignes s'inspirent d'idéogrammes japonais. À moins que ce ne soit le contraire.
En 2010, cette petite crapule d'Ivo a embouteillé deux versions distinctes de sa Petite Crapule. Carignan et mourvèdre, vinifiés en courte macération carbonique, étaient destinés à être assemblés. Ils ne l'ont pas été. Seuls les excellents dégustateurs parviendront à faire la différence. Excepté pour sa cuvée l'Escarpolette, Ivo pratique l'élevage parcellaire mono-cépage. Comme ses différentes parcelles sont éparpillées entre Lagamas, Arboras, Saint-Jean de Fos, Saint-Félix et, un peu, Montpeyroux, les cuvées d'Ivo sont vinifiées séparément. On applaudit le cinsault des deux mains et le merlot enchante. Jeux de mains et L'Enchanteur sont leur nom, pas étonnant, finalement. En 2010 comme en 2009. La bouteille sans étiquette, avant-dernière à droite sur la photo du haut, est un pirate. Une goutte de Dieu qui n'était pas encore tombée, un Château Le Puy 2003, souvenir rapporté de Gironde par Ivo, bien avant que les Japonais aient pu se l'approprier. À siroter goutte à goutte, comme une véritable offrande.
Sa vie sous le pic...
C'est l'histoire d'une reconversion et d'un nouveau départ dans la vie. C'est l'histoire de la naissance d'un (petit) domaine, blotti au pied du Pic du Vissou. C'est l'histoire de Véronique et Jean Attard, c'est aussi celle du Mas Coris. Il ne faudrait pas croire qu'à Cabrières on se la coule douce, il y a du travail pour remettre en état ce vignoble, le replanter en partie et le convertir à l'agriculture biologique. Premier millésime en 2010, déjà épuisé au domaine. Un rosé, La Coulée douce, et un rouge, Première vague. Déjà goûtés par ici. C'est bon. Le caractère légèrement épicé du rosé va à merveille avec la cuisine méditerranéenne et la ratatouille froide servie au bord d'un fossé à l'ombre d'un grand arbre, en bordure des vignes, là, juste sous le pic.
Dans la toute nouvelle cave de Cabrières, la syrah poursuit son élevage. Deux barriques, goûtées l'une derrière l'autre: léger boisé, mais très fin et élégant, dans la première, caractère plus massif du deuxième fût, qui donne une structure plus imposante au vin. Sûr que quelqu'un que je connais la trouverait à son goût et suffisamment charpentée, cette syrah-là!
Une bien belle histoire, que celle du Mas Coris, dont on attend avec impatience la suite.
Grande consolation néanmoins, il arrive que l'on trouve des cavistes sur le lieu même de ses vacances. Parfois, ils sont même mieux que ceux de la maison, mais ça, il faut éviter de le crier trop fort.
Chai Christine Cannac, à Bédarieux, y aller une première fois donne irrésistiblement envie d'y revenir. Ça sent bon le vin nature à l'intérieur de la boutique climatisée et même parfois aussi dehors, par terre, mais ce n'est pas toujours fait exprès. L'ambiance estivale donne soif et faim aussi un peu. Les bulles peuvent venir d'Auvergne et n'en faire qu'à leur tête (Tête de Bulles de François Dhumes, un pet'nat de chardonnay légèrement et agréablement sucré, vif et frais). Ceux qui boivent plus vite peuvent également faire Trinquette pour patienter (Trinquette 2010 de La Petite Baigneuse, Roussillon, du grenache de soif, particulièrement fruité et gouleyant), avant de liquider les petits minous ardéchois sans aucun scrupule (Chatons de Garde 2009, d'Andréa Calek, qu'il sera dur de garder très longtemps, parce que de la syrah comme ça, ça se boit jusqu'à plus soif!).
On causse, on causse, mais tout a une fin, y compris les vacances. Vivement les prochaines! N'est-ce pas, Victor?
13h15, place de l'horloge de Montpeyroux. Il s'agissait d'être à l'heure, histoire de casser une petite graine avant le programme gustatif de l'après-midi. Tartare de saumon délicatement citronné et parfumé, suivi d'impeccables côtes d'agneau aux petits légumes nouveaux. La terrasse du Mimosa, l'étape incontournable de l'arrière-pays héraultais. La récolte languedocienne peut désormais commencer.
Mas Jullien, sans états d'âme!
Pas d'États d'âme pour Olivier Jullien en 2009. Cette cuvée majoritairement grenache, devenue célèbre par son habillage et les poèmes qui l'agrémentaient, reflet de la liberté d'expression d'Olivier Jullien, a en effet vécu. Le feeling est venu d'une cuvée de carignan blanc majoritaire, qui aurait détonné dans l'assemblage de la cuvée blanc du Mas, et qui s'exprime très bien en solo. Silence requis à la dégustation de cette gorgée de fruits blancs remplie de fraîcheur, les nouveaux États d'âme. Chut!
L'autre grande nouveauté du Mas, c'est le développement d'une activité de négoce afin de faire revivre le vignoble oublié de Saint-Privat. Sur ce magnifique terroir d'altitude, déjà à l'origine de la remarquable cuvée Carlan, ainsi que de la toute dernière parcelle des Rougeos, intégrée dans la grande cuvée du Mas Jullien dès la première récolte, les vignes de Saint-Privat tombaient dans l'oubli. Une pitié que d'être contraint à les arracher! Sous l'impulsion de Jean-Baptiste Granier, collaborateur d'Olivier Jullien et pleinement associé avec lui sur ce coup-là, Les Vignes oubliées ne le sont plus. Régulièrement entretenues et labourées par leurs propriétaires jusque-là, il n'a pas été difficile d'obtenir d'eux la conversion en bio, garante externe de la qualité de leur travail. Malgré la richesse de constitution de cette première cuvée officiellement en vente, on y retrouve la fraîcheur de tanins de ce terroir d'exception dont il ne serait pas sain de se priver, dans le millésime 2009. Un nom de cuvée déjà utilisé par le passé au Mas Jullien et qui retrouve là toute sa signification. Ces vignes oubliées ne devraient plus l'être dorénavant... À lire, l'excellent article consacré à Jean-Baptiste et à cette cuvée sur Midi-vin.com.
Le Mas Jullien Rosé 2010 vit pleinement la saison des fraises, Carlan 2009 fait dans le Carlan, spontané et immédiat, le Mas blanc 2010 est toujours aussi fin, quelque soit le millésime, le Mas rouge 2008 impressionne par sa structure et sa longueur, même si son fruité se fait déjà séducteur (peut-être l'apport des raisin des Rougeos, terroir de Saint-Privat?).
Le Clos Romain, amphores et oliviers
À l'ombre du pic de Vissou, le Clos Romain. Juste en face, à gauche de la route. Le Clos Romain, c'est un lieu, des gîtes, de la vigne, des oliviers, des amphores, un travail de romains, un travail de Céline et Romain, une grosse démarche qualitative pour continuer de faire vivre ce petit paradis perdu sur la commune de Cabrières. Les barriques de Patience boisent un peu trop le vin au goût de Céline, qui préfère le tactile soyeux de l'amphore. Leur dernière heure a peut-être sonné au domaine, pour laisser le champ libre au potier. Impatiente, Céline? Il faut pourtant bien reconnaître que Phidias joue sur du velours...
Mas Coutelou, la mémoire du grenache
Pour arriver à la cave mystérieuse qui renferme les vieilles barriques du trésor de Jeff Coutelou, il faut d'abord prendre le chemin des vignes de Puimisson, pour un tour quasi exhaustif de la propriété et avoir un aperçu des différentes pratiques du secteur. Des arbres isolés au milieu du no wine's land puimissonais signent la présence de parcelles cultivées dans le respect du vivant. Chenilles, fleurs de bourrache, oliviers, amandiers, haies, oiseaux, coccinelles,... colonisent à nouveau les vignes, recréant un écosystème garant d'un équilbre naturel apte à permettre de produire le meilleur raisin. Non loin de là, on conditionne la vigne à prendre la forme d'une haie d'arbustes, afin de procéder à une taille mécanique. De quoi donner des frissons dans le dos...
La Vigne haute 2010, toujours en élevage, est une pure syrah d'anthologie, à l'équilibre septentrional, d'une fraîcheur remarquable. Dilemme: l'embouteiller sur son fruit actuel ou prolonger l'élevage? Rien de tel qu'un vieux grenache, et même plusieurs, pour enclencher la méditation qui se poursuivra fort tard en soirée. Pour la Vigne haute, son sort n'est pas pour autant réglé...
Chai Christine Cannac, the place to Be...darieux!
Une soirée tranquille à Bédarieux, ça vaut tout l'Orb du monde. Au menu, tapas, fricandeaux et vins "natures", Chai Christine Cannac, sommelière et caviste avisée de la haute vallée de l'Orb. Quand toute une clique de vignerons débarque, forcément, la soirée se prolonge et devient un peu moins soft. Au menu, Courtois, Overnoy, Lapierre, Métras, Yoyo... Pas de quoi avoir beaucoup mal à la tête le lendemain! Que le touriste de passage se rassure, Chai Christine Cannac, on peut aussi gouter aux joies des vins du Languedoc. Et même plus si affinités. The place to be, à Bédarieux!
Lisson à l'horizontale
Le plaisir d'entendre à nouveau la petite musique de Lisson tinter dans le vent qui se lève ... Avant de s'abriter dans la fraicheur de la cave pour une dégustation horizontale des trois cuvées du millésime 2001: le Clos des Cèdres, les Échelles et le Clos du Curé. Le mourvèdre du Clos des Cèdres s'est dompté et civilisé, faisant grimper très haut sur l'échelle du plaisir, tandis que l'assemblage bordelais des Échelles développe de jolies notes de cèdre et de bois noble, à la manière des grands crus classés, le croquant en plus. Le Clos du Curé, débouché au débotté, pour clore la trilogie, est en retrait à l'ouverture, massif et fermé, mais devient majestueux au fil des minutes et de l'aération, finissant par pinoter joliment sur des notes de griotte.
À peine une minute à moi, lors de cette virée languedocienne! Et encore! Le dernier rendez-vous vigneron, en peu de temps sur la balance, s'est annulé au dernier moment. Ce n'est que partie remise, mais il était temps de rentrer, en cette veille de Pâques. L'orage grondait déjà, dans le Sud de la France et la récolte de petits œufs de grêle fut malheureusement au rendez-vous pour certains...
Olif
P.S.: ce week-end du premier mai, retour en septentrion, pour une dégustation sans cracher, à Avallon. Chai l'un, chai l'autre, ce sera chez Nicolas Vauthier et ce serait ballot de s'en priver!
Au cours d'un week-end haut-saônois, de la patate, forcément, il y en a eu. Une bonne gamelle particulièrement appétissante. Mais, il n'y a pas eu que ça!
Des bouteilles, diverses et variées, il y en a eu aussi, obligé! Des bulles ardéchoises naturellement pétillantes, So Bubbly, so Nanas et Cie, à la stupéfiante Épreuve 2009 des Côtes de la Molière, en passant par un jet de Cayas 2000, syrah du Valais de Germanier Bon Père, se révélant particulièrement épanouie et bien à son aise. Mais, il n'y a pas eu que ça!
Peut-être moins attendues, des vignes, il y a eu, au cours d'une randonnée vélocipédique de décrassage du côté d'Hugier le dimanche matin. Comme il fallait bien boire une fois local pendant le séjour, l'Auxerrois 2007 de Serge Ballot, viticulteur sur les Coteaux d'Hugier, a parfaitement fait l'affaire, goûtant plutôt bien, sur la fraicheur et la vivacité.
Mais il n'y a pas eu que ça. On voulait du culte, on en a eu pour nos deniers! Pas à l'église, lors du traditionnel jour du Seigneur, mais en plusieurs lieux, dont Cult, petit village du canton de Marnay.
Le plus culte restait pourtant à venir. L'objectif avoué de cette randonnée apéritive était bien de rallier Marnay et cette cave qui se rebiffe perpétuellement dans le landerneau marnaysien. Ce qui nous a amené Chez le Zem sur les coups de 12h30. La bonne heure! Le caviste ne s'est pas rebiffé, ce n'était pas Aléatoire. Un verre de ce désaltérant pétillant naturel rosé beaujolois de Jean-Claude Lapalu, et ça repart, le temps de faire le tour de ce bel endroit où l'on peut boire, et parfois se restaurer, à l'intérieur ou dans le jardin, et même, à l'occasion, faire son propre barbecue, arrosé des bons canons du patron, issus d'une sélection rigoureuse et passionnée.
Le 8 mai, de 10 heures à 13 heures, le Zem reçoit 3 vignerons qu'il sera particulièrement intéressant de rencontrer. Catherine Bernard viendra de son Languedoc faire goûter ses 2010, Jean-Claude Chanudet apportera ses Morgon, Pascal Henriot, le régional de l'étape, arrivera tout droit de Champlitte avec ses Vins de Pays de Franche-Comté. Voilà qui promet, la patate devrait couler à flots! De quoi ranimer la flamme du très véritable groupe Machin, joyeux compositeur-interprète de cet hymne à la gloire du fleuron de la gastronomie haut-saônoise.
Olif
P.S.: puisqu'on a goûté une belle syrah valaisanne, ne pas oublier que du 13 au 18 avril, Arvinis sera à nouveau la capitale des vins du monde. Les Vins de Pays de Franche-Comté seront peut-être un jour les invités d'honneur, en attendant, les Halles CFF de Morges (Vd) vont vibrer à l'accent du Pays d'Oc.
Une visite chez Gilles Ballorin démarre généralement au quart de tour. Quelque soit le trafic. Sauf le sien, une camionnette Renault âgée et un peu molle de la batterie, parfois, mais généralement encore admissible au contrôle technique. 6,20 ha de vignes égrenées tout le long de la Côte de Nuits, de l'extrême-nord au sud lointain, cela nécessite une bonne monture. De Chenôve, ultimes parcelles résistant à l'urbanisation dijonnaise galopante, jusqu'à Comblanchien, Gilles Ballorin se balade dans la Côte de long en large. Sa cave, située dans le bas du village de Morey, le long de la 74, est celle d'un ancien négociant qui a fait de mauvaises affaires. Lorsqu'il l'a racheté, Gilles en a plutôt fait une bonne. Les lieux sont un peu démesurés grands pour lui, mais, du coup, il prend ses aises. Convaincu dès le début par le bio et la biodynamie, le domaine Ballorin & F (pour filles, femme, Fabienne, Filomène?) a d'emblée converti les parcelles exploitées pour leur permettre de s'exprimer de la plus belle des manières.
Son fleuron, ce sont ses Damodes, un cru à la mode de chez Nuits. Situées dans la partie haute du climat, celle qui est en "villages" (en bas de la route, ce sont des premiers crus), les Damodes de Gilles Ballorin ont pour voisines celles du domaine Chantal Lescure, joliment complantées à cette saison de petites fleurs violettes. Vive la biodiversité biodynamique! La friche de gauche finit de rassurer sur l'absence de pollutions de voisinage. Du haut de cette grosse vingtaine d'ouvrées, le paysage est très ouvert et remarquable. Tranquille et sereine quiétude. Coteau plutôt pentu, la parcelle est travaillée au cheval. Ce qui a le mérite de rendre le sol particulièrement vivant. De la terre qu'il fait bon humer et prendre à pleine main.
Des Damodes à Morey, pour éviter le trafic routier, quand le Trafic Renault veut bien démarrer, l'itinéraire passe par la route des Grands Crus, devant la Romanée-Conti et derrière le Clos-Vougeot. Dans les jeunes vignes du plus célèbre des crus bourguignons, avec un peu de chance, on peut voir Mickey, le plus célèbre des chevaux comtois bourguignons, s'affairer et s'appliquer à tracer de beaux sillons.
De retour dans les immenses caves du domaine, la dégustation des 2010 en cours d'élevage peut commencer. Bien ancrées dans le terroir bourguignon et l'histoire de France, l'entrée de gamme est constituée d'un fier aligoté dénommé Le Hardi, dont il faut bien se garder, à gauche comme à droite, d'un Bourgogne blanc Sans peur, mariant crânement et voluptueusement pinot blanc et pinot beurot au chardonnay musqué, d'un Bourgogne rouge Le Bon, parce qu'il est bon, évidemment, mais surtout du nom de Philippe III, le plus mécène des Ducs de Bourgogne, et, enfin, d'un Bourgogne Passetoutgrains plutôt Téméraire et majoritairement pinot noir, tu parles, Charles!
Si 2010 a retrouvé les vertus élégantes, fines et désaltérantes de 2008, en donnant des vins très frais et digestes, 2009 se pose comme un véritable papa, par son potentiel puissant, solaire et chaleureux. Des vins taillés pour la grande garde, cela paraît évident.
En 2010, le coup de cœur sera rose. Le Marsannay Cœur de rose est un rosé. Oui, comme son nom l'indique. Non sulfité, élevé en barrique. Du velours pour le gosier. Un tutu de ballerine qui vient caresser le fond de la gorge au cours d'un entrechat sans les pointes.
Les rouges 2010 n'ont pas tous terminé leur malo mais on pressent déjà de belles choses.
Après le fût, la bouteille. Le Fixin 2009 Les Chenevières est une petite bombe fruitée. Pas de SO2 à la mise, ce qui en fait un vin décomplexé et particulièrement expressif, avec une jolie matière derrière. Le Nuits-Saint-Georges Les Damodes 2008 possède déjà toute la magie du cru. Un grain de pinot très fin et épanoui qui ne demande qu'un peu de temps pour encore mieux s'exprimer. Le Morey-Saint-Denis Très Girard devrait à terme donner un joli vin. La parcelle, située dans le bas du village, vient tout juste d'être reprise et doit encore s'acclimater à son nouveau mode cultural. Le 2009 pinote joliment et possède une belle fraicheur acidulée sur des tanins bien enrobés.
Une balade sur la Côte ne saurait se terminer sans une visite amicale à la Capitale des Ducs de Bourgogne. Les dijonnais vont avoir un bien joli tramway, mais pour l'instant, c'est plutôt le Bronx question circulation! Suivez le guide et il vous emmènera tout droit Ô gré du vin. Une cave comme on aimerait en voir plus souvent, en plein cœur de la ville, 106 rue Monge. Un endroit qui regorge de trésors, tant Bertrand Joinville est un caviste avisé dans ses choix. Il aime les grands contenants, ce qui n'est pas une mauvaise chose lorsqu'il s'agit de vins du Beaujolais. Magnums de Poquelin 2010 des Côtes de la Molière ou Jéroboam de Morgon de Marcel Lapierre pour les grandes et bonnes soifs!
Chez Bruno, comme son nom l'indique, le patron s'appelle Bruno. Mais, pas comme dans la chanson, on n'y boit pas de tord-boyaux. Bar à vins, bar à jambons, bar à burrata parfois, Bruno a le culte du produit et refuse de servir les blaireaux. L'ambiance est à la simplicité, à la sincérité, à la convivialité. On trinque, on échange les bouteilles avec les voisins de comptoir, on fait des rencontres passionnantes. Très certainement la plus petite (par la taille) des grandes adresses dijonnaises.
La burrata, façon Bruno. Mamma mia...
Olif
P.S.: le 11 avril, légèrement au sud de la Côte, le Beaujolais sera en fête. Beaujolois, biojolais, il y en aura pour tous les goûts, essentiellements les meilleurs. Et tant pis pour ceux qui n'aiment pas ça!
C'est l'adresse parisienne en vogue, l'endroit où il faut absolument asaturnir, avant même que l'Académie Française ne valide le terme dans le dictionnaire. Le critique "officiel" s'est fait griller par les blogueurs intelligents et adeptes du plaisir. En vogue, donc forcément un truc pour bobos branchés, si l'on en croit les avis soudainement autorisés de quelques anonymes pisse-vinaigre, mais soyons également intelligents, ne boudons pas notre plaisir et assumons notre branchitude.
À portée de fusil d'un forum des Halles reconverti à certaines occasions en station de sports d'hiver, Saturne se décline en deux versions, restau et bistrot. Les Seigneurs des anneaux, ce sont les Hobbits Sven Chartier et Ewen Le Moigne, qui n'ont finalement pas pris Racines passage des Panoramas. Sven est au piano, Ewen à la mandoline, avec laquelle il tranche avec finesse et maestria un excellent Comté de Poligny à grignoter du bout des doigts. Joueur de mandoline, mais surtout homme-orchestre à la cave, on ne s'ennuie pas des papilles avec Ewen, une des têtes pensantes de Vinibrato, petit négoce 100% raisin, basé à Molamboz, Jura, chez Jean-Marc Brignot.
Côté restaurant, pris d'assaut en soirée, ce qui nécessite de réserver à la vitesse de la lumière et plusieurs années saturniennes à l'avance (l'équivalent grosso modo de quelques journées terriennes), on déjeune sous une agréable verrière avec vue sur le ciel bleu de Paris (quand il ne neige pas) et sur la cuisine ouverte de Sven. Trop bruyant pour certains, service trop long pour d'autres, assiette un peu chiche pour les vilains gros appétits, on n'est probablement pas venus le mauvais jour, tout était impeccable!
Menu de la mer, ce jour-là, avec quelques effluves terriennes: carpaccio de Saint-Jacques, betterave, navet et émulsion d'huître. J'ai mis du temps à trouver l'huître sur la Saint-Jacques, je n'avais pas mémorisé qu'elle avait été émulsionnée. Travaillée de la sorte, la betterave est en passe de devenir un de mes légumes préférés, alors qu'il n'y a pas 5 minutes, je ne pouvais pas la piffrer! L'aile de raie grillée servie avec petits légumes croquants fut loin de rayer le palais: cuisson nickel, accompagnement délicieux.
Après une épatante mise en bouche apéritive par un Pinot blanc KL 2009 de Bruno Schueller, bêtement pris à l'aveugle pour un sauvignon atypique, il fallait encore du blanc, toujours à l'aveugle: une Mélodie en sous-sol angevin, "100%% jus de raisin, sans sulfite rajouté, 1ère barrique à droite en entrant". Une cuvée de chenin exclusive, mise en bouteille pour Les enfants de la bulle, 17 rue Notre-Dame des Victoires, la même adresse que Saturne. Curieux, non?
Curieux, mais surtout, extrêmement bon, minéral et cristallin, sans sulfites, évidemment, ce n'est pas le genre de la maison. L'étiquette Petit ange fesses nues est signée Étienne Davodeau, inoubliable auteur de Lulu femme nue et grand observateur du quotidien des petites ou mauvaises gens, qu'il sait retranscrire à merveille. Le vin, "Mélodie en sous-sol", est quant à lui signé Jérome Lambert, jeune talent "nature" prometteur, qu'il sera extrêmement difficile de découvrir ailleurs qu'ici, toute la production a été achetée par les saturniens.
Saturne
17, rue Notre-Dame des Victoires
Paris 2e
Tél.: 01 42 60 31 90
Olif, chroniqueur supposé intelligent du plaisir, en Escapades parisiennes
P.S.: boire nature à Paris, ce week-end-là, ce n'était pas très difficile, puisqu'il y avait l'excellent et convivial petit salon de l'Espace Beaujon. L'occasion fut trop belle de se vautrer sur une barrique de 225 litres relookée par Christophe Lorenzoni, avant de goûter à de petits joyaux signés Catherine et Gilles Vergé, Grégory Leclerc, Frédéric Rivaton, L'escarpolette Ivo ou encore Jeff Coutelou. Mention particulière à La Mule "Deluxe édition" de Chahut et Prodiges, au Cinsault 2010 tiré de la cuve de l'Escarpolette, à Gribouille 2008 de Fred Rivaton (ainsi qu'à la verticale de Blanc-Bec sur 4 millésimes, révélant tout le bon potentiel de ce style de blanc sudiste) et au vieux Grenache en solera du Mas Coutelou, une cuvée à composer soi-même lorsque l'on passe au domaine.
Il a quitté en 2008 son bistrot de la rue Paul Bert pour changer d'air et prendre un nouvel itinéraire. Ne plus laisser le Temps au temps et ouvrir Itinéraires, rue Pontoise. Dans une optique plus "bistronomique", ou quand le bistro louche vers le gastro ... Sylvain Sendra, à peine 32 ans, vient tout juste d'être auréolé du 1er prix de la photographie culinaire d'Oloron-Sainte-Marie, devant Yves Camdeborde lui-même, s'il vous plaît. Une adresse qui cartonne et affiche toujours complet mais que le Chef a déjà envie de repenser autrement, en réduisant le nombre de couverts, pour travailler avec plus de sérénité. En salle, le service est pourtant déjà détendu, sérieux et efficace mais bon enfant, sachant chatouiller le client là où ça le fait sourire et même bien rigoler ("Oh!, ils prennent les plats en photo, on dirait des petits japonais!").
La sommelière récemment recrutée fait déjà parler d'elle dans les médias et le monde du vin. Son petit accent inimitable se regarde autant qu'il ne s'écoute, ses choix en matière de vins sont des plus judicieux et elle ne casse pas (beaucoup) de verres. Pour ce premier repas à Itinéraires, carte blanche fut laissé au Chef pour un menu-dégustation: 3 entrées, 2 plats, 2 desserts, + quelques extras, accompagnés de quelques vins sélectionnés avec justesse et présentés avec enthousiasme par Caroline Loiseleux. Dans la famille "Sommelière québecoise", la brune. Le même bagout qu'Aurélia, mais sans boire sur le web. Let's go, girls!
Filet de maquereau mariné, Saint-Jacques, puis légumes oubliés en carpaccio, carrelet, gigot d'agneau confit, cochon basse température juste somptueux, qu'il eût été dommage de ne pas goûter, coté mets. Binner, Marjorie Gallet, Côte Rotie, Côte du Py 2000 de Jean Foillard, Barolo Chinato et un verre de grappa pour terminer, côté vins. Le repas et les accords furent parfaits, servis en quantité à peine plus que déraisonnable. Grosse découverte et véritable coup de cœur que cette cuvée de Côte Rotie Cordeloux 2007 de Marie et Pierre Benetière, vinifiée à l'ancienne avec un soupçon de rusticité authentique hyper séduisante. Quand au Barolo Chinato de Luca Roagna, c'est toujours un aussi bon médicament, surtout s'il accompagne une succulente forêt noire génialement revisitée.
Une belle adresse, un bel Itinéraires à découvrir, à proximité des quais de Seine, légèrement en amont de Notre-Dame, rive gauche.
Pontarlier? Une ville à la montagne, une ville à la campagne. Supercomice oblige, les plus belles vaches laitières montbéliardes de tout le département se sont données rendez-vous dans la capitale du Haut-Doubs pour parfumer le bitume. La plus grosse bouse n'est pourtant pas venue d'où l'on pensait. L'électoralisme déverse des effluves parfois bien pis.
Si j'ai manqué la plus grosse vache du comice, je n'ai pas manqué d'aller me réapprovisionner en fromages à la Crèmerie Marcel Petite, l'ancien Trou de souris pontissalien, désormais tenu à la perfection par Sandra et Marie-Christine, un souriant duo de choc qui monte gentiment en puissance et propose la meilleure sélection de fromages de divers horizons que l'on puisse trouver dans le Haut-Doubs.
Avec en option une sélection de jolis vins du Jura et d'ailleurs. Ganevat, La Tournelle, Clos des Grives et Jean-Claude Crédoz. Justement, le vigneron est là pour faire découvrir ses vins, une opportunité pour qui ne les connait pas, moi le premier. Personne n'est parfait.
Jean-Claude a repris seul une partie des vignes de son frère Daniel, qui a cessé son activité en 2006. L'autre partie a été reprise par Stéphane Tissot, en même temps que le solde des stocks de vins du domaine qui sont désormais commercialisés sous l'étiquette des Caves de la Reine Jeanne.
5 cuvées au programme, à commencer par une cuvée de chardonnay 2007 légèrement marqué oxydatif, très fin et agréablement fruité. Des vignes de chardonnay sur une parcelle en appellation Château Chalon, qui ne peuvent donc revendiquer leur statut. La cuvée Sélection 2007 est un assemblage de chardonnay et savagnin dans des proportions 85-15, un grand classique jurassien. Bien marqué par sa typicité d'élevage, c'est un joli vin qui ne manque pas de profondeur. Le Savagnin 2006, c'est du nanan pour les amateurs de vins "typés" Jura, ceux qui se complaisent à croire que le cépage sent la noix. Quand on goûte au Château Chalon 2003, on se dit qu'il est dommage que le précédent ne soit pas allé au bout de son processus de vieillissement sous voile. Une grande finesse dans les arômes, majoritairement malt et épices, que Jean-Claude impute à de bonnes levures indigènes que l'on a opportunément laissé travailler. Le vin de Paille 2006, 1/3 poulsard, 1/3 savagnin, 1/3 chardonnay, bien équilibré, se laisse boire délicieusement. Le Macvin est une petite merveille d'équilibre, parfaitement dosée côté marc.
5 cuvées et autant de jolies bouteilles, voilà un domaine qui mérite de l'attention. Il faudra aller vérifier tout cela sur place à la première occasion. Dès que j'aurai recoiffé ma queue de cheval comtois, en fait!