REVEVIN 2011: Pris la main dans le Pessac!
Premier temps fort des REVEVIN 2011, sous le patio du Chai Carlina, cette horizontale des blancs de Pessac-Léognan s'annonçait comme une étape de cols insurmontables pour un certain nombre de Revevineurs ayant construit leur nid douillet d'œnophiles loin de la place de Bordeaux, de ses courtiers et de ses crus classés, bientôt destinés exclusivement au marché chinois, ce qui fait rire jaune, mais sous cape, quelques occidentaux pas encore complètement sevrés d'un certain style de vins élaborés pour plaire à certain(s) gourou(s) volontiers prescripteurs de breuvages concentrés et boisés, à l'élevage un tant soit peu stéréotypé, et/ou aimant plus que tout se retrouver invité(s) à la table des grands châteaux pour des dîners aux formats géométriquement variables dont la seule véritable constante est le nombre et l'ancienneté des flacons servis à des pingouins endimanchés sachant aussi bien relever leur queue de pie que le petit doigt en l'air, quand il s'agit de pavaner au milieu de cette basse cour internationale au sein de laquelle quelques pique-assiettes réussissent toujours à se faufiler, mais pas de bœuf à la bordelaise, point, à la ligne, on respire et on souffle un grand coup avant de passer au paragraphe suivant.
La date et le lieu: le patio du Château Chai Carlina, à Saint-Jean de Monts, par un beau week-end ascensionnel, début juin 2011. Pfff! comme le temps passe vite!
Le format: rectangulaire, celui d'une table allongée où une vingtaine de Revevineurs peuvent prendre place sans avoir à tendre trop le bras lorsqu'il s'agit d'attraper un crachoir.
L'appellation et le millésime: Pessac-Léognan 2008. Sauvignon et sémillon au menu, donc, dans un millésime à forte acidité et vraisemblablement à faible maturité d'une manière générale. Les gencives ont pas mal couiné, les dents ont grincé, mais l'estomac a peu dérouillé, tous les vins ayant été évidemment recrachés. Le prix de la majorité des vins, par contre, est susceptible de coller un ulcère, même -et surtout- quand le domaine a ramassé à bonne maturité. Une quasi-intégrale des crus classés de l'appellation, excepté Haut-Brion et Laville (redevenu missionnaire depuis le millésime 2009) qui ne jouent plus dans la même cour ni le même patio depuis un certain temps, voilà qui avait pourtant de quoi exciter les papilles.
La méthodologie: tous les vins sont goûtés à l'aveugle, par paire associant un Grand cru classé ou assimilé et un "pirate" non classé ou d'une appellation voisine. Double carafage préalable, l'identité des vins n'étant révélée qu'à la fin de la dégustation.
Les résultats: dans une telle dégustation, il est évident que le plaisir passe au deuxième plan. Peu de vins ont conduit à l'extase gustative. Les plus grands, présentés en dernier, étaient également les plus mûrs et les plus concentrés, les plus à même d'être appréciés à ce stade, ils sont logiquement mieux sortis, Pape-Clément et Smith-Haut-Lafitte en tête. Mention honorable pour Carbonnieux et Malartic-Lagravière, qui s'en tirent pas mal également, avec une acidité importante, mais plutôt bien équilibrée. L'outsider de cette dégustation, parmi les "petits", c'est Château Turcaud barrique, plutôt très bien goûté le matin (face à un Chevalier en toute petite forme), mais curieusement peu apprécié le soir, lors d'un deuxième passage, toujours à l'aveugle, à l'occasion du repas. Les aléas de la dégustation... Un des petits poucets sur le papier, la cuvée Vin Passion du Champ des Treilles s'en est finalement plutôt bien tirée en offrant un profil aromatique et une structure complètement différents de tous les autres vins de la série. Sur la plupart des 20 échantillons dégustés, les arômes archétypiques de sauvignon levuré (agrumes, citron, ananas, bourgeon de cassis) associés à un boisage plus ou moins marqué (vanille, noix de coco, notes d'amertume) l'ont emporté haut la main, avec une matière loin d'être suffisamment mûre pour espérer envelopper tout cela dans quelque temps, à mon humble avis.
Bon, on ne s'est pas franchement régalé, c'est vrai, mais, comme l'a dit Philippe, il fallait la faire, histoire de se recaler le palais. Cela va quand même être dur de faire marche arrière et réapprécier ce standard de vin, désormais...
Olif
P.S.: vous avez échappé au pire titre que j'avais imaginé, Léo-de hurle-gnan, comme quoi je sais parfois me retenir.
P.S.2: d'autres commentaires sur cette dégustation ici, là et là, afin d'en avoir un éclairage différent du mien et que chacun puisse (éventuellement) y trouver son compte.