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Le blog d'Olif - Page 70

  • Sociando-Mallet, le plus classe des Bourgeois: la preuve par 9

    Date: le 14/02/2003 à 09:47

    On a donc déjà beaucoup parlé de Sociando-Mallet, un des plus fameux crus bourgeois actuels dont tout le monde estime le niveau à celui d'un bon 3ème cru classé et qui est capable sur certains millésimes d'égaler, voire de dépasser les plus grands, même si cela est contesté par les ardents défenseurs de la hiérarchie bordelaise archaïque (là , je prends ouvertement position !).
    Sociando tient une place particulière dans mon coeur car j'en ai fait depuis de nombreuses années mon cru fétiche (il en fallait un et je ne regrette absolument pas mon choix, même si nous sommes nombreux dans ce cas et notamment parmi mes amis qui ont emboîté le pas !) et je possède tous les millésimes depuis 1990. C'est pour cette raison que c'est également le vin du Bordelais que je connais le mieux pour l'avoir goûté, souvent plusieurs fois, dans bon nombre d'années, y compris le célèbre 82 dégusté récemment par ailleurs.

    D'un point de vue historique, on retrouve trace de cette propriété située à Saint-Seurin de Cadourne, à l'Ouest de Saint-Estèphe, depuis 1633, lorsqu'elle appartenait à sieur Sociando, qui lui a donné son nom pour moitié, jusqu'en 1850, date à laquelle Mme Mallet se porte acquéreur et y accole son nom pour donner naissance au château Sociando-Mallet que nous connaissons actuellement, même si la qualité n'était pas encore forcément au rendez-vous.
    De 1876 à 1969, cinq propriétaires se sont succédés, qui n'ont guère laissé de souvenirs, si ce n'est qu'ils ont eu la bonne idée de ne pas rajouter leur nom à celui du domaine, ce qui l'aurait considérablement alourdi !
    En 1969, la propriété compte 5 ha et n'a guère bonne réputation. Les vignes et les chais sont quasiment à l'abandon. C'est cette année-là que Jean Gautreau, négociant et ancien tennisman, à la réputation de dilettante, rachète cette propriété en bordure de la Gironde. Il n'aura de cesse alors de reconstituer un vignoble digne de ce nom, d'un seul tenant, et de l'agrandir, puis de rénover les chais et le cuvier.
    Sociando-Mallet commence alors véritablement à faire parler de lui au début des années 80 avec un millésime 82 considéré comme d'anthologie. Plusieurs bonnes années se succèdent, avec un 86 à la réputation flatteuse, un 87 très réussi malgré la petitesse du millésime, et un beau 89.
    Puis commence la décennie 90, objet de cette verticale, où la qualité des vins ne cesse d'augmenter, Sociando venant même titiller les plus grands. Jusqu'en 96, les prix en primeur étaient une véritable aubaine, on assiste depuis à un ajustement du fait de sa qualité et sa réputation, mais ceux-ci restent tout de même très raisonnables.

    C'est donc dans la cave du Bon Echanson, à Pontarlier, que nous nous sommes réunis pour une dégustation prometteuse. Les bouteilles ont été ouvertes dans l'après-midi par notre ami caviste, non carafées, et nous avons décidé de les déguster en semi-aveugle, deux par deux comme nous avons souvent l'habitude de le faire. Les millésimes dégustés ayant été dévoilés au fur et à mesure, la dernière bouteille a été découverte par tous les participants et ce fut bien la seule !
    Ambiance conviviale et bon enfant comme à notre habitude mais tout le monde a quand même bien écouté les commentaires et explications du maître de cérémonie. Nous avons donc à déguster 9 millésimes, à savoir 88, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96 et 97, servis dans un ordre connu du seul caviste.


    Premier service !

    Le premier vin présente une robe pourpre, légèrement trouble ; il nous semble âgé. Un nez d'abord fermé, qui s'ouvre sur du fruit mais qui y associe une pointe d'iode (de la Bétadine® pour les nombreuses personnes du milieu médical présentes dans l'assemblée). Un manque certain de longueur, avec une finale un peu courte (« il bloque devant et il n'y a plus rien derrière » souligne un des dégustateurs). Ce vin est toutefois très honnête et pas encore sur le déclin, ce qui est une petite gageure quand on connaît le millésime, en l'occurrence 92.

    Le deuxième vin révèle une belle robe grenat, sans trace d'évolution, avec un beau nez agréablement fondu, sur de fines touches de havane et un léger boisé. Les tanins sont fins et soyeux et libèrent à l'aération un cassis explosif et envoûtant. Souplesse, harmonie, équilibre ! Ce vin semble encore très jeune. Beaucoup (dont moi) le situent en 97. Surprise, c'est un 91, qui étonne réellement par sa fraîcheur et sa jeunesse.

    Deuxième service !

    Le troisième vin nous offre une robe grenat et un nez de moka, très torréfié, avec des nuances cacaotées, des tanins fins et serrés. Flatteur, fondu et agréable, il séduit la majorité des dégustateurs même s'il n'est pas d'une grande complexité. C'est un 93.

    La robe du quatrième vin est d'un grenat plus soutenu, presque opaque. On retrouve de nouveau au nez des nuances iodées qui troublent le fruité. Si la matière est dense, on peut lui reprocher un manque d'élégance et une certaine austérité avec de la sécheresse en finale. Il fait craindre à nombre de dégustateurs une évolution défavorable vers plus de sécheresse. La faute au millésime ? C'est un 94.

    Troisième service !

    Avec le cinquième vin, on arrive aux choses sérieuses ! Le nez est splendide, complexe, sur la boîte à cigares, le cèdre, le fumé. Il emplit les narines d'un parfum envahissant. La bouche est volumineuse avec une matière dense, noble, sur des tanins serrés et chatoyants, et présente une grande longueur. C'est un grand vin qui impressionne l'ensemble des dégustateurs. 95 ? 96 ? Eh non ! Enorme surprise, c'est le 97 ! Un vin fabuleux qui démontre que, quel que soit le millésime, il est possible de faire bon si on veut s'en donner les moyens.

    Derrière ce 97 d'anthologie, le sixième vin nous semble un peu fluet, pas désagréable mais il souffre de la comparaison et ses arômes sont un peu écrasés par le précédent. Il semble plus âgé et, effectivement, c'est une relative déception : on était en droit d' attendre plus de choses du millésime 88 !

    Quatrième service !

    Il ne reste en principe que des grands, nous ne devrions pas être déçus. Le septième vin présente une robe sombre, presque noire, et s'ouvre sur un nez très torréfié, moka et cacao. Une matière très dense avec une acidité bien ressentie qui procure une immense longueur avec de la mâche en finale. Un vin juvénile, énorme et magnifique. Le plus grand jusqu'à présent et c'est le 95.

    Le huitième vin me semble être le petit frère du précédent, tout aussi beau sur le moka et le cacao, avec une matière que je trouve légèrement en retrait par rapport à 95, mais si peu ! On joue à présent dans un registre de haut niveau. Encore un vin très jeune et vous aurez deviné que l'on a affaire à 96. Impressionnant !

    Cinquième et dernier service !

    La neuvième bouteille, gardée pour la bonne bouche, même si on peut considérer que c'est une erreur de la servir en dernier, les papilles pouvant commencer à fatiguer, c'est le 90. J'avoue cependant que j'aime bien ce côté crescendo car on a l'impression de franchir des paliers et le vin que l'on goûte semble toujours supérieur au précédent. L'inverse ferait trop souffrir de la comparaison les vins moins puissants. La robe de ce 90 est encore opaque avec toutefois de légères nuances plus claires sur les bords du disque. Le nez est plein, fruité, torréfié, et, en bouche, la matière est impressionnante, volumineuse, avec une rondeur, que n'ont pas encore les millésimes plus jeunes, qui tapisse et caresse le palais à l'infini. Admirable !

    S'il faut hiérarchiser, mon classement personnel sera donc le suivant : 90, 95, 96, 97, 91, 93, 94, 92, 88. Mais tous les millésimes obtiennent sans problème la moyenne.

    On termine la dégustation par un petit dessert, une excellente tarte aux pommes de Mme l'échansonne, accompagné d'un petit café, et c'est le retour (à pied !) à la maison, par un petit moins 10°C qui vivifie et maintient les sens en éveil. Un grand moment vient de se terminer et je dois avouer que les verticales des crus bordelais nous ont toujours procuré une immense satisfaction, même si, personnellement et actuellement, je suis plus enclin à découvrir d'autres appellations. La magie de Bordeaux fonctionne toujours ! Et Sociando-Mallet est un très grand vin, d'une régularité exemplaire !

    Olif

    lapassionduvin.com

  • De la transhumance des huîtres...

    Date: le 12/12/2002 à 13:26

    Chaque année, phénomène immuable, lorsque les feuilles commencent à se ramasser à la pelle, ce coquillage pierreux empoigne son bâton de pèlerin et quitte son parc ostréicole, fuyant la traditionnelle marée noire de Noël, pour gagner les blancs pâturages de la montagne et s'épanouir en liberté, petit caillou sur le chemin.

    Son long périple est pourtant semé d'embûches et notre brave coquillage va devoir affronter une foule de dangers ; son pire ennemi est un prédateur redoutable : l'homme des montagnes, en carence iodée perpétuelle, qui a découvert, après des siècles passés à se lester l'estomac, que l'intérieur du caillou était mou et plus facile à digérer lorsqu'il était ingurgité seul.
    Un peu désemparées par le froid, on retrouve nos amies les huîtres en bande, souvent devant les vitrines du poissonnier, lorsqu'elles ont cru reconnaître un ancien ami poisson qui leur rappelle alors cruellement leur pays natal. C'est là qu'on peut les cueillir facilement à la main, par douzaines, ayant seulement à faire face à la vindicte de notre Ordralfabétix montagnard, fort heureusement non gavé de potion magique.

    C'est au moment précis où elles ouvrent le bec pour appeler au secours qu'il faut leur briser net la mâchoire, d'un coup sec, pour s'en régaler en s'abreuvant de vin blanc.

    A ce stade du récit, le lecteur de LPV se demande certainement si je n'ai pas pété un câble ! Il n'a pas entièrement tort! Alors, après ce préambule naturaliste et poétique, rentrons enfin dans le vif du sujet.

    C'était hier soir la traditionnelle soirée huîtres de l'association des amis du Bon Echanson. Soirée très conviviale, plutôt festive, où nous avons l'habitude de tester les meilleurs vins blancs destinés à accompagner ce mets simple, mais royal pour de pauvres jurassiens sevrés d'embruns.

    La séance de l'ouverture est un grand moment réservé aux gens armés d'un bon couteau et sachant s'en servir. Les huîtres sélectionnées chaque année sont des spéciales n°3 de chez Gillardeau, célèbre ostréiculteur de Charente, le top de l'huître ! Le salaire de l'ouvreur, en plus de quelques chapeaux d'huîtres prélevés par ci par là , c'est un petit verre de vin, en l'occurrence un Château Haut-Bertinerie 1999, petit Graves blanc frais et fruité, vif et gouleyant, bien sympathique.

    Passons enfin aux choses sérieuses :

    - Montagny 1er cru 2000, Château de la Saule : une appellation fort méconnue et un vin à  la robe très claire, vif, minéral, parfait sur les huîtres.

    - Riesling Bennwihr 2000, Jean-Michel Deiss : une erreur de casting ! C'est un très beau riesling mais la présence de sucres résiduels le place hors-sujet sur les huîtres!

    - Ménetou-Salon Morogues 2000, H. Pellé : un sauvignon archétypique qui se plaît bien également avec les coquillages. Bonne vivacité.

    - Saumur 2000, domaine Langlois-Château : assemblage 80% chenin, 20% chardonnay. Nez discret de pomme, un modèle de structure minérale, un vin long et très sec. Mérite de vieillir et n'est pas trop à sa place sur les huîtres du fait de son caractère excessivement sec, à la limite de la dureté.

    - Clos Floridène 1998 : un nez typé de sauvignon, très pipi de chat, déroute les dégustateurs ! Inhabituel pour un Graves, je trouve. Mais ce nez s'estompe rapidement pour s'ouvrir sur les agrumes. La structure en bouche est belle, onctueuse, longue. Le boisé est à peine perceptible. Mérite de vieillir un peu pour s'harmoniser et perdre ses notes variétales de sauvignon. A mon avis, la plus belle bouteille de la soirée. J'ai un faible pour les vins de Graves sur les huîtres, à la condition que ces dernières soient plutôt charnues et pas trop iodées.

    - Château Bouscassé 1998, Pacherenc sec : un vin un peu austère, acide, peut-être passé. M'a très peu inspiré hier soir !

    - Auxey-Duresses 1999, Comte Armand : ah ! ça sent bon la Bourgogne et le chardonnay ! Des notes beurrées en attaque (pas de polémique, s'il vous plaît !), peut-être trop pour un Auxey car elles masquent la minéralité du terroir, étant vraisemblablement apportées uniquement par l'élevage. Un vin controversé même si très flatteur et plutôt agréable. Ce côté un peu beurré convient bien à ces huîtres spéciales qui développent elles-mêmes des arômes de noisette (on y revient toujours, au beurre et à la noisette !)

    - Château Reynon 2000, Cadillac : une gâterie pour terminer et accompagner le dessert. Un beau liquoreux vinifié par Denis Dubourdieu , extrêmement agréable, restant très frais en bouche.

    Voilà , fin de la soirée ! Les plus courageux se sont octroyés un petit digestif, j'ai préféré faire l'impasse ! Cela ne m'a visiblement pas empêché de délirer un peu ce matin!

    Ostréicolement vôtre,

    Olif

    lapassionduvin.com

  • Jura : des terroirs multiples pour un goût unique ?

    Date: le 15/12/2002 à 11:13

    La question de la typicité jurassienne me taraude depuis quelque temps : typicité de terroir ou typicité de goût ?

    Je l'ai déjà souvent évoquée au fil de mes messages, à travers les dégustations que j'ai effectuées mais j'ai voulu « enquêter » de façon plus approfondie dans le but de tenter de répondre aux questions que je me pose, et, éventuellement de vous faire profiter de quelques éléments de réponse.

    Y'a-t'il un ou plusieurs terroirs jurassiens ?
    Y'a-t'il une unicité du goût en Jura ?


    Les relativement récentes cuvées parcellaires ouillées de S. Tissot, A. Labet, et d'autres encore, tendent à prouver qu'on peut sortir du sempiternel goût de jaune, fer de lance de la culture viticole jurassienne. Mon propos n'est pas de parler de ce produit phare du Jura, mais force est de constater que bon nombre de cuvées de blancs élaborées sur un mode oxydatif aboutissent à une uniformisation du goût, qui plaît tant aux autochtones mais qui rebute un peu l'amateur non initié, même si cela peut constituer une bonne introduction au monde du vin jaune.

    Pour illustrer mon propos, après un petit rappel géologique bienvenu, y compris pour moi, je me suis amusé à voir si l'on peut dégager quelques caractéristiques liées au terroir à travers un échantillonnage (non représentatif !) de chardonnays issus de différents terroirs jurassiens.


    Petit rappel géologique :

    Le vignoble jurassien est planté sur une bande qui court de Salins les Bains à Saint Amour (pas celui du Beaujolais !), englobant une surface de 1700 ha sur environ 80 km de long.
    De Saint Amour, au sud du Jura, à Lons le Saunier, les vignes occupent le bas des pentes du Revermont, avec une exposition générale ouest, parfois sud ou sud-ouest. Le terrain est constitué d'éboulis calcaires mêlés à des argiles du Lias, formant d'excellentes terres à vignes, pierreuses et chaudes, facilitant la maturité du raisin, qui peut devancer d'une dizaine de jours celle du nord du département. De nombreux petits villages vignerons, en appellation Côtes du Jura, constituent le vignoble ; Rotalier est peut-être le plus connu, c'est la patrie d'Alain Labet.

    Vers Lons, le vignoble s'élargit, l'orientation est extrêmement variée. Le sol est composé de marnes bleues, grises ou noires du Lias. Ce sont des terres riches, profondes et fraîches qui donnent les vins de l'appellation L'Etoile et ceux d'Arlay, en Côtes du Jura.

    Plus au nord, , de Voiteur à Poligny, le vignoble est planté sur des argiles du Lias donnant naissance aux vins de Château Chalon. Les blancs sont toujours en appellation Côtes du Jura.

    De Poligny à Arbois, les coteaux sont constitués de marnes irisées, argileuses et compactes . Des bancs calcaires ou des éboulis pierreux s'y mêlent, sur Arbois, Pupillin ou Montigny, pour fournir les meilleures terres à vigne du Jura, exposées sud.

    Le chardonnay et le pinot noir se plaisent à peu près partout. Le ploussard exige des marnes bleues et rouges, le trousseau donne son meilleur sur les sols filtrants, calcaires (ceux de Montigny, par exemple), le savagnin se régale sur les marnes bleues, de Château Chalon entre autres.

    Voilà , ces quelques notions de base peuvent permettre de comprendre les différentes appellations jurassiennes et la répartition des cépages. On devrait donc pouvoir mettre en évidence des différences gustatives entre les vins provenant des différents terroirs. Ce sera l'objet de la deuxième partie de mon exposé, à venir, peut-être avant Noël si j'en ai le temps.

    Références bibliographiques : « Vins, vignes et vignobles du Jura », éditions Cêtre.


    Les travaux pratiques
    Date: le 10/01/2003 à 11:54

    Pour essayer d'illustrer mon propos, j'ai sélectionné, de façon totalement aléatoire, 6 vins de chardonnay provenant de 6 régions distinctes géologiquement (1 côtes du Jura du Sud Revermont d'A. Labet, 1 vin de l'Etoile, 1 côtes du Jura du secteur de Château Chalon, 1 côtes du Jura de la région de Poligny, 1 Arbois Pupillin, 1 Arbois), ceci afin de voir s'il est possible de déterminer des caractéristiques différentes suivant le terroir. Cette « étude » se veut juste un instantané totalement subjectif et je revendique cette subjectivité.

    - Côtes du Jura 98, domaine Morel-Thibaut, Poligny :

    Robe jaune pâle, nez discrètement oxydatif sur l'écale de noix. La bouche est bien équilibrée avec une pointe de gras en finale. Le côté oxydatif ne ressort que très légèrement et ne masque pas les qualités intrinsèques du vin, très peu minéral, issu en théorie d'un terroir marneux.

    - Arbois Pupillin 98, Paul Benoit :

    Robe jaune pâle. Nez floral, aucune note oxydative. Je ressens une plus grande minéralité en bouche que sur le vin précédent. Bonne nervosité et finale sur des notes légèrement briochées. Un beau chardonnay, subtilement équilibré.

    - L'étoile 99, château de Persanges :

    La robe varie peu par rapport aux précédents. Le nez est sur la réserve à l'ouverture, avec quelques notes d'herbes coupées, puis évolue franchement sur la noix à l'aération. un vin assez sec en bouche, à la limite de l'austérité, qui termine sur des notes oxydatives assez marquées. Difficile de percevoir la part du terroir dans ce vin que l'on pourra par contre trouver très typé Jura.

    - Côtes du Jura 97, Caveau des Byards, Le Vernois (secteur Château Chalon) :

    Le nez est frais, légèrement acidulé, sur des notes de cake au citron. La bouche est vive, agréable et bien équilibrée. Aucune trace d'oxydation dans ce vin dont le terroir laisse bien s'exprimer le cépage, à mon avis, car il me semble correspondre à ce qu'on peut attendre d'un vin de chardonnay.

    - Arbois 98 élevé en fût de chêne, fruitière vinicole de Pupillin :

    Nez légèrement floral et citronné. Une bonne structure acide confère de la longueur au vin. L'élevage en fût n'est pas trop perçu, harmonieusement fondu, et fait que ce vin tout à fait honnête privilégie l'expression du cépage à travers le terroir.

    - Côtes du Jura 99, Alain Labet, Rotalier :

    Une cuvée standard du vigneron « star » du Sud Revermont et un élevage oxydatif qui saute au nez. à‡a sent la noix fraîche à une lieue à la ronde mais pour un palais jurassien, ce n'est pas forcément désagréable. La structure de ce vin me semble tout à fait apte à « digérer » cette élevage qui ne permet par contre en aucun cas d'identifier le cépage ou le terroir.

    Voilà pour la partie gustative ! Ce qui, bien évidemment, ne me permet de tirer aucune conclusion, si ce n'est que les vins élevés dans le respect du cépage sont des vins de chardonnay plus universels que les autres, plus marqués par un régionalisme qui recherche l'association avec la cuisine franc-comtoise et plus particulièrement celle avec du Comté. Difficiles à exporter, donc, et plutôt destinés à une consommation locale, autochtone ou touristique.

    Deuxième remarque qui me vient après cette dégustation, échelonnée sur plusieurs semaines, c'est le niveau tout à fait correct et homogène de ces vins qui restent dans une gamme de prix inférieure à 7 euros.

    Une véritable définition des terroirs se fera probablement d'elle-même, au fil du temps, lorsque l'élaboration de ces cuvées ouillées se généralisera.

    Olif

  • La Colombe de la vigne au verre...

        6/2/2002

    ... ou comment petit chasselas de Féchy deviendra grand.

    Dans le cadre de la semaine du goût helvétique, journées portes ouvertes au domaine La Colombe à Féchy dans le canton de Vaud. Portes ouvertes, ce n'est pas difficile car le soleil plombe sur les rives du Léman en ce samedi 2 juin 2002.

    A peine arrivé au domaine, je suis embarqué dans un charter en direction du "Petit Clos" pour une présentation du sol et du sous-sol.
    Là -bas nous attend Raymond Paccot pour un petit cours de géologie appliquée. L'homme est chaleureux, passionné, et son exposé très clair et intéressant (il paraît que c'est un ancien instituteur!). Un trou d'1m50 de profondeur en bordure de quelques pieds de vigne nous fait office de travaux pratiques: comment peut-on amener la vigne à laisser s'exprimer le terroir?
    Le retour à une culture raisonnée, étape indispensable avant de passer en biodynamie, comprendre le sous-sol, permet de mieux gérer la qualité du raisin, donc celle du vin. Quelque soit la nature du terrain (graves, argile, calcaire,...), une constante semble se dégager: le drainage naturel du sous-sol qui permet à la vigne de toujours trouver de l'eau en profondeur, juste ce qu'il faut, même et surtout si elle doit souffrir pour s'en procurer, va favoriser l'éclosion des beaux terroirs.
    Si Raymond Paccot procède ainsi dans son domaine, il s'investit aussi au niveau cantonal dans des études de terrain pour établir une véritable cartographie des meilleurs terroirs vaudois.

    Vu des coteaux, le Léman luit sous le soleil, au pied des sommets alpins encore enneigés. Il commence à  faire soif!

    Ca tombe bien, passage au caveau pour une dégustation du millésime 2001. Un chasselas La Colombe, véritable vin de soif, frais et gouleyant, fait office de rafraichissement et de mise en bouche.
    Suivent:
    - le Petit Clos dont nous avons pu apprécier le terroir, à la robe très claire, presque limpide, au nez très floral, vif, avec un léger perlant.
    - En Bayel, au nez plus complexe, très minéral, au goût de pierre à fusil marqué, un vin issu d'un très beau terroir et récompensé il y a peu par la coupe suisse du meilleur chasselas (ça ne s'invente pas!). Et c'était le 1er vin vaudois à recevoir cette distinction!
    -Le Brez, encore sur la réserve, avec une belle minéralité, à  attendre pour qu'il s'exprime.
    - un pinot noir sur le fruit, avec des notes un peu caramélisées et réglissées, déjà  très agréable.

    Les cuvées de réserve ne sont pas encore disponibles, même si j'avais pu en avoir un aperçu à Arvinis en avril dernier (j'ai donc publié mes notes de dégustation sur le millésime 2001 bien avant Parker et la Rvf!).

    Petit jeu avant le départ: un concours de dégustation portant sur 5 millésimes du Petit Clos, à déterminer à l'aveugle sur les 10 dernières années. Reçu 3/5, presqu'un exploit pour un novice en chasselas! Je suis plutôt fier de moi et on m'offre une bouteille du dernier millésime! A noter dans la dégustation, un Petit Clos 92, à la robe ambrée et au nez superbe de pomme. Je ne savais pas que le chasselas pouvait vieillir autant et aussi bien!

    Nous sommes donc loin ici des "infâmes chasselas de Féchy" dont on parlait à une certaine époque. Violaine et Raymond Paccot sont un couple de vignerons fort sympatiques et La Colombe un fort beau domaine vaudois.

    Olif, envoyé spécial en territoire vaudois.

  • A6 sortie Beaune Sud

    Date: le 19/11/2002 à 12:01

    Première partie: Thierry Matrot, l'épure murisaltienne

    Une sortie d'autoroute à  ne pas manquer car elle vous mène tout droit du côté de Meursault et de Pommard.

    C'est par une belle journée ensoleillée que j'ai été convié par mon ami caviste du Bon Echanson à rendre visite à 2 de ses fournisseurs en côte de Beaune, à savoir le domaine Matrot à Meursault et le domaine du Comte Armand à Pommard.
    Voyage à 2 voitures pour des raisons d'horaires de départ incompatibles ; toujours à l'heure, comme à mon habitude, j'arrive à 11h pétantes (au lieu de 10h30) chez Thierry Matrot, juste pour être accueilli le verre à la main et descendre à la cave, dans un dédale de fûts et de bouteilles.
    Mise en bouche sympathique avec un Saint-Romain 2001 que Thierry expérimente à partir de l'achat de raisins en vue d'une diversification de la production. Visiblement, les situations ne sont jamais simples en Bourgogne. Th. Matrot n'est en fait que le gérant des vignes du domaine Joseph Matrot. Suite à une querelle familiale dans laquelle quelqu'un a récupéré ses billes, Thierry cherche à devenir plus indépendant et à vinifier sous son nom, ce qui l'oblige à diversifier sa production du fait de son statut de négociant. La conversation est animée, Thierry est un vigneron comme je les aime, franc et sympathique. En quelques mots, il vous dresse le portrait d'un vin et la correspondance avec son terroir. La vigne, la terre et le terroir seront d'ailleurs des termes qui reviendront souvent car c'est ce qu'il cherche avant tout à exprimer, comme tout bon vigneron qui se respecte (« Va d'abord dans les vignes pour comprendre avant de ramener ta science à la cuverie » lui a dit en substance son père alors qu'il rentrait au domaine, frais émoulu du lycée de Beaune).

    Pendant que nous conversions, nous nous humections la bouche avec quelques petites choses que je vous livre pêle-mêle, de mémoire :

    - d'abord ce Saint-Romain blanc, nerveux et très agréable

    - puis un Auxey-Duresses blanc 2001, vif, tendu, minéral

    - Meursault 2001 : très jeune, bien sûr, mais déjà  très expressif, d'une grande pureté

    - Meursault 99 : un peu plus de gras et de complexité, un grand millésime

    - Meursault-Blagny 2001 et 98 : un premier cru fétiche du domaine car produit en relativement grande quantité qui permet un suivi précis de l'évolution des vins (de très vieux millésimes sont ouverts dans les repas de famille). Le 2001 exprime parfaitement la minéralité du terroir et le 98 m'impressionne beaucoup par sa profondeur et son gras qui se révèle.

    - Blagny la pièce sous le bois 2001 : un rouge que j'aime beaucoup (superbe 95 actuellement), à la robe framboisée, étincelante ; en bouche, le vin est dense, long, les tanins sont fins et serrés. Une vraie gourmandise à boire sur son fruit mais un bon potentiel de vieillissement.

    - Volnay Santenots 2001 : la robe et le nez sont plus profonds, des notes un peu terreuses, évoquant le cuir de Russie. Un vin ample, de grande garde.

    Il est 12 heures 30, le temps a passé vite, il est temps de quitter Thierry Matrot, un fort sympathique et excellent vigneron murisaltien, dont les vins sont sincères et proches du terroir.
    Nous filons en direction de Beaune pour une petite collation aux Caves Madeleine, un Wine Bar au cadre et à l'accueil soignés. Juste un verre de Meursault de Louis Chavy pour accompagner le repas, le premier verre avalé de la journée ! Je revis !

    Deuxième partie : Domaine du Comte Armand, au coeur de l'aristocratie bourguignonne

    Aussitôt le repas ingurgité, nous repartons en direction de Pommard chez le Comte Armand où nous attend Benjamin Leroux, le régisseur du domaine, et nous descendons illico à la cave pour une belle dégustation au milieu des fûts. Très jeune, Benjamin semble avoir déjà beaucoup d'expérience. Cela fait 4 ans maintenant qu'il a repris en main les vins du domaine suite au départ de Pascal Marchand pour le domaine de la Vougeraie, les vins de prestige de chez Boisset.

    Nous commençons la dégustation par quelques blancs et notamment un Saint-Romain et un Auxey-Duresses, qui semblent donc être les nouveaux terrains d'investigation des vignerons bourguignons lassés de ne produire que des Pommard ou des Meursault smiling smiley ,et surtout à la recherche d'une gamme de bons vins à prix intéressants. Il peut s'agir ici d'un achat de raisins sur pied, avec suivi complet de la vigne, ou encore de vignes en fermage, permettant là encore le contrôle total de la production, de l'entretien du terrain à la vinification, condition sine qua non car le domaine est en biodynamie.
    Ici encore, on parlera beaucoup terroir, travail à  la vigne, maîtrise des rendements.

    - Bourgogne blanc 2001 : simple mais impeccable pour se refaire le palais

    - Saint-Romain 2001 : vif, minéral, de l'allonge

    - Auxey-Duresses blanc 2001 : encore un vin minéral, tendu, exprimant de façon assez caractéristique son terroir (ce n'est pas moi qui le dit !)

    - Auxey-Duresses rouge 2001 : fruité, droit, de la longueur

    - Auxey-Duresses 1er cru rouge 2001 : on gagne en complexité. Un vin plutôt strict mais au fruité magnifique, charnu, avec une belle mâche en finale. Superbe !

    - Volnay 2001 : un vin de vinificateur d'après Benjamin, car nécessitant quelques artifices pour compenser les imperfections de la nature (mauvaises conditions de récolte, je crois). Il restera encore quelque temps en fût et nécessitera un collage.

    - Pommard 2001 Le clos des Epeneaux : le 1er cru maison, en monopole, une parcelle située entre les grands et les petits Epenots. Les raisins sont vinifiés séparément suivant l'âge des vignes. Nous commençons par goûter les jeunes vignes (20 ans d'âge) , récoltées en influence lunaire « fruit » ; le vin est effectivement très fruité, déjà flatteur. Ces fûts ne seront très certainement pas intégrés à l'assemblage final et commercialisés en appellation village (les années précédentes, vendus au négoce). Les vignes de 30 ans montrent plus de concentration ; la prise de bois est magnifique, laissant s'exprimer le fruit, les tanins sont fins et serrés. Les vignes de 40-50 ans, récoltées en influence « racine » nous font encore monter d'un cran et gagner en concentration, avec un côté très pur, et les vignes de 70 ans expriment un fruité intense et complexe, magistralement soutenu par le bois. L'apothéose, c'est l'assemblage à la pipette (du nom d'une fameuse revue vendéenne smiling smiley ) des 3 dernières cuvées dégustées, donnant une petite idée de ce que sera le probable Clos des Epeneaux 2001 : l'alchimie du vin ! une impression difficile à décrire ! chaque fût pris séparément aurait donné un très bon vin mais l'assemblage des 3 produit un vin étonnamment différent (quoique très proche), plus complexe, plus grand, et donne un sentiment de plénitude, d'accomplissement, non ressenti auparavant. C'est magique et c'est très bon ! une véritable naissance sous nos yeux et dans nos verres !

    Benjamin est visiblement fier de sa production en 2001 ; c'est un vin qui exprime pour lui le terroir des Epeneaux de façon magistrale mais qui sera peut-être plus difficile d'accès que le monumental 99 ou le médiatique 2000. Toutes les conditions sont réunies pour que 2002 soit également très grand. Pour conclure la dégustation, nous testons une version spéciale du Clos des Epeneaux 2000, vinifiée avec adjonction de CO2, et qui donne un vin très confituré avec une pointe de gaz (on se croirait chez le Dom !) et un Volnay Frémiets 2000, très pur et concentré.

    Un moment passionnant vient de se terminer et nous quittons Benjamin à  regret.

    Le soleil automnal brille toujours sur les vignes bourguignonnes et c'est l'heure de se diriger vers l'A6 entrée Beaune Sud et de faire le chemin inverse, sortie Poligny dans le vignoble jurassien, puis direction Pontarlier. De nouvelles visites en Bourgogne sont déjà au programme de l'année prochaine. Vivement !

    Olif

  • Quelques reliques de Saint-Julien, millésime 1997!

    Date: le 22/10/2004 à 22:04

    1997! Millésime tant décrié, surtout vendu trop cher, mais avec lequel on peut se faire plaisir actuellement.
    Saint-Julien, l'appellation la plus homogène du Médoc, la plus qualitativement régulière, avec des Crus Classés qui tiennent le haut du pavé!

    Est-ce que le mélange de ces deux paramètres allait montrer encore de beaux restes? C'est ce que le GJP, ne reculant devant aucun sacrifice, en association avec le Club des Amis du Bon Echanson de Pontarlier, allait essayer d'apprécier!

    Les vins sont servis non à  l'aveugle, par série de deux, suivant les conseils des châteaux, sauf Beychevelle, qui n'a pas souhaité répondre à  nos interrogations.

    Château Talbot 1997
    Robe soutenue, grenat, encore homogène. Nez légèrement empyreumatique, sur le poivron, le rôti de veau, le gratin dauphinois (coïncidence, c'était le menu du soir! Aurions-nous été influencés?), un peu les épices, la noix de muscade. Les tanins sont bien fondus en bouche, d'ailleurs il n'en reste probablement plus beaucoup, le vin étant un peu court, limite fluide, voire aqueux. Pas déplaisant, mais un peu juste! A boire!

    Château Saint-Pierre 1997
    Un nez très tertiaire, sur le sous-bois, le champignon. Une bouche ample, ronde, avec des tanins encore nettement ressentis en finale. Le nez évolue rapidement sur des notes de bois humide, moins agréables. Une deuxième bouteille, totalement bouchonnée, fait craindre une évolution trop rapide de la première suite à  un problème de bouchon.

    Château Beychevelle 1997
    Sur le poivron bien mûr, avec quelques notes de bois noble, je lui trouve pourtant une structure un peu fluette, limite maigrichonne, terminant un peu court. Plutôt souple, il est néanmoins plutôt bien apprécié par quelques dégustateurs pour sa grande amabilité.

    Château Lagrange 1997
    Premier nez un peu fermé, qui s'ouvre sur des notes de cèdre, de fumée, de poulet rôti. Puissance et alcool encore bien présents, avec une certaine rondeur. Ceux qui ont apprécié Beychevelle lui reprochent un côté trop dur, déstructuré, moins affable en fait. Pourtant, il témoigne d'un grand potentiel et d'une grande droiture. J'aime beaucoup et il n'y a pas urgence à  le boire.

    Château Léoville Barton 1997
    Nez tertiaire, témoignant d'un certain degré d'évolution, sur le sous-bois, le cacao. La bouche est encore bien structurée, arrondie, ample, harmonieuse, avec de la puissance et du volume, bien marquée par l'alcool. Certainement le plus expressif et le plus séduisant de tous, le plus complexe également.

    Château Léoville Las Cases 1997
    Nez très crémeux, boisé, vanillé. L'attaque est ronde, le milieu de bouche se durcit un peu, pour devenir plus strict, voire sévère dans la finale. Beaucoup de longueur, calibrée de façon cylindrique. Classicisme, classicisme ... Je le trouve un peu guindé, trop boisé, manquant singulièrement de relief par rapport à  son presque homonyme, dont le charme baroque me séduit de façon récurrente.

    Au final, une dégustation d'un relativement bon niveau, malgré la petitesse du millésime affiché, dont le mérite est quand même de proposer des vins suffisamment évolués qui permettent de patienter avant d'ouvrir les autres. Lagrange affirme ses prétentions face aux deux Léoville quand même au dessus du lot, dans un style différent, voire opposé, qui possède chacun ses adeptes.
    Mon tiercé: Barton pour son romantisme échevelé, Lagrange pour tout ce qu'il a encore à  dire, Las Cases pour le respect de son rang, Beychevelle pour sa facilité, Saint-Pierre pour sa séduction immédiate, Talbot pour son respect du millésime. Comment, ça fait plus de 3?

    Olif

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  • Pari Languedoc Roussillon


    Date: le 26/10/2004 à 18:30


    Organisé par Richard Logier, ex-sommelier à  la maison de l'Aubrac, et les Caves du 41, cette grande dégustation fut l'occasion de faire monter à  Paris les canassons du 41 pour une présentation de leurs poulains à  la presse et aux restaurateurs.
    LPV, grâce à  un allié de choix dans la place, ne pouvait manquer la couverture de cet événement, et, pour être sûr de ne rien rater, a diligenté une quadruple délégation belgo-jurasso-bassenormando-francilienne.

    L'occasion d'un aperçu de ce qui se fait de mieux dans le Sud actuellement. Le Languedoc-Roussillon va t'il gagner son Paris ?

    Marathon gustatif avec 22 domaines présents et pas moins de 80 vins présentés (probablement plus car certaines bouteilles ne figuraient pas sur la liste distribuée à  l'entrée). Le temps imparti et un certain degré de saturation des papilles ne m'ont pas permis de goûter à  tout, ayant même été contraint à  faire l'impasse sur quelques domaines parmi les plus prestigieux (Mourgues de Grès, Clos Marie, Roc d'Anglade, Grandes Costes, Haut Buis, Grimaudes/Perrières, Les Creysses). Quel cruel manque d'entraînement ! Je me sens comme un marathonien qui abandonne au dernier kilomètre !  Hors délais!

    Les domaines seront présentés dans l'ordre totalement subjectif de mon propre parcours, guidé par l'accès aisé vers l'un ou l'autre des vignerons, la foule se pressant parfois autour de certaines tables.

    Château de Jonquières
    On attaque par des retrouvailles avec François de Cabissole et ses vins du Château de Jonquières. Mise en bouche avec le Château de Jonquières 2003 blanc, frais et fruité, vif et minéral de par la présence de chenin dans l'assemblage. Poursuite avec le Domaine de Jonquières 2001 rouge, aux arômes de fraise écrasée, de cassis, un peu animal, un très joli vin dont on peut profiter sur son fruit. La grande cuvée, Château de Jonquières 2000 rouge, est un vin mûr, dense, sur des notes de fruits noirs chocolatés.

    Mas Bruguière
    Par le biais d'une légère translation sur la droite, nous voilà  d'emblée plongés au coeur du Pic Saint Loup. Les Muriers blanc 2003, assemblage de marsanne et roussanne, évite l'écueil de la lourdeur et garde une acidité fraîche bienvenue. L'Arbouse 2003 est un vin au fruité croquant et aux tanins à  mâcher dans la finale. La grenadière 2002 laisse entrevoir de belles promesses, mais l'échantillon goûté est malheureusement légèrement défectueux (bouchon).

    Peyre Rose
    Marlène Soria est bien présente avec ses deux vins fétiches, dans le millésime 1998. Clos des Cistes 1998 est superbe, fidèle à  son image, avec ses notes chocolatées prenantes, sa matière dense et ses tanins accrocheurs. Pas uniquement un vin d'hédoniste, car on y ressent un véritable effet terroir. Syrah Léone 1998 est plus charmeuse, plus fondue, et possède peut-être à  ce stade un peu plus de fraîcheur que Clos des Cistes.

    Domaine Clavel
    En poursuivant la translation, on tombe sur le domaine Clavel, présent avec ses plus beaux fleurons.
    Mise en bouche sympathique avec Le Mas 2003, friand à  souhait, puis on passe aux choses sérieuses avec Les Garrigues 2002, syrah et grenache à  part égale, très mûr, mais frais en même temps. Fraîcheur que l'on retrouve également sur la Copa Santa 2002, dans un style inhabituel pour elle, plus léger et séducteur dans sa jeunesse.

    Escale en Terre Inconnue, pour suivre l'évolution des vins de Robert Creus, grâce à  qui nous avons obtenu nos tickets d'entrée.
    Les carignans de Léonie 2002 ayant été ramassés sous la pluie, la puissance du vin en a été un peu atténuée, sans que l'on puisse pour autant parler de dilution. Un bel animal qui s'est roulé dans de la poussière de cacao, avec une pointe de gaz accidentelle, accentuant le sentiment de fraîcheur jusque dans une finale qui se drape de douceur. Los Abuelos 2002 et 2001 sont deux beaux vins de grenache, marqués par des notes de griotte à l'alcool. Le 2001 possède indéniablement un petit côté Porto sec, évoluant plus sur le noyau de cerise et le kirsch. Sylvie 2002, quant à  elle, elle enroule ! Quelle puissance ! Mais quelle douceur en même temps ! Une matière opulente et superlative pour une syrah hors des sentiers battus. Too much ?

    Canet-Valette
    Comment ne pas succomber aux charmes et au sourire de Sophie Valette, que l'on imagine sans peine en Shéhérazade dans les Une et Mille Nuits 2001. D'une finesse remarquable, sur des notes de moka chocolaté, elle est le prélude idéal au grand vin du domaine. Plus de densité dans Maghani 2000, et toujours ces notes chocolatées ! Encore plus de profondeur et de complexité dans Maghani 1999, sur de jolis arômes viandés, presque de poulet rôti, et toujours ces notes chocolatées !
    Tout le domaine se situe sur un terroir argilo-calcaire, à  Cessenon sur Orb. Comme quoi, il n'y a effectivement pas que des schistes à Saint-Chinian ! Une révélation pour moi que les vins de ce domaine qui ne m'avaient jamais autant emballés par le passé!

    Clos des Fées
    Grand moment que cette rencontre avec Hervé Bizeul, fidèle lecteur de LPV, contributeur occasionnel, qu'une réserve bien compréhensive empêche d'intervenir plus.
    Retrouvailles avec Les Sorcières 2003, dégustées récemment, et toujours le même bonheur de vin gourmand ! Les Vieilles Vignes 2002 et Le Clos des Fées 2002 possèdent une fraîcheur mentholée évidente, avec une matière légèrement plus dense et serrée logiquement retrouvée sur le deuxième cité.
    Et puis un moment d'intense émotion, inoubliable, une rencontre avec La Petite Sibérie 2002 ! Un vin qu'il faut avoir goûté au moins une fois, pour apprécier sa chair inimitable, son grain merveilleux, sa densité de texture mais en même temps sa facilité d'accès. Un moment d'émerveillement, qui méritera un petit rappel en fin de dégustation, en guise d'apéritif, à l'invitation d'Hervé Bizeul. Et qui supportera parfaitement de passer derrière un Banyuls de la Rectorie !

    Mas d'Espanet
    Un domaine perdu en pays d'Oc, situé à  une trentaine de kilomètres de Nîmes, au milieu de nulle part, entre les Coteaux du Languedoc et les Costières. Mais un domaine qui vaut le détour !
    Blanc, rouge, rouge, blanc ! C'est l'ordre de dégustation que nous impose Denys Armand. Pour le plaisir, L'Eolienne 2002, un blanc frais et fruité, alliant viognier, grenache et sauvignon, et Les Lens 2001, du fruit gourmand et croquant. Plus sérieux, riche et complexe, Bois du Roi 2000 : cacao, fruits confiturés, flan au caramel et épices. Très beau ! Et enfin, Camille 2002, un vin hors norme, exhalant la poire William, un peu fermentaire, puis évoluant dans un registre oxydatif. Long et immense, un vin coup de coeur ! Assemblage grenache blanc et sauvignon, élevage en fût, dont 50% neuf.

    Mas Jullien
    Une rencontre avec Olivier Jullien, ça ne se refuse pas ! Surtout quand il s'agit aussi de goûter au pré-assemblage des Etats d'âme 2003, une petite bombe de fruits frais, sur fond de réglisse, et au Mas Jullien 1999, à  la texture serrée, doté d'une grande profondeur.
    Un vigneron exigeant, qui se remet sans cesse en question, notamment sur l'élaboration des vins blancs, qui devraient être approchés différemment dans leur conception dorénavant.

    Petite translation vers la table du Domaine des Grécaux, tout proche géographiquement également du Mas Jullien, puisque situé à  Montpeyroux, pour goûter à  deux très beaux vins, Terra Solis 2002, au nez légèrement réduit de prime, mais libérant par la suite un fruité séducteur, et Héméra 2001, marqué cassis, au grain serré et dense, qui devrait être explosif lorsqu'il se lâchera un peu.

    Domaine de la Garance
    Rencontre sympathique avec Pierre Quinonero, dont la femme est jurassienne, l'occasion de tester enfin les désormais célèbres Armières 2001. Un 100% carignan d'école, typé cassis, comme à  son habitude, mais pas seulement ! S'y ajoutent pour une plus grande complexité et un plus grand bonheur, des notes d'épices, de garrigue et de cacao. A la fois puissant, fin et élégant, ce qui n'est pas forcément paradoxal. Superbe !
    Ensuite, deux vins de grenache noir mutés, une originalité languedocienne inspirée du Roussillon, Bruixas et La Solera 1999/2001, dont la robe évolue vers des nuances de pruneau et le nez évoque un joli rancio.

    Juste le temps de se retourner, et nous voilà  de retour en Roussillon, au Domaine Gauby. Lionel Gauby y présente une gamme assez complète des vins produits au domaine, dont les fameux 2003, déjà  tellement vantés par certains. Je pense que se situera là  un beau sujet de controverse, car le changement de style amorcé ici, progressivement, depuis le millésime 2000 saute désormais aux yeux et aux papilles. Changement de méthodes culturales, avec une biodynamie intelligente, proche de la terre et de l'environnement, visant à  redonner vie à  un microcosme naturel en pratiquant la polyculture, qui permettra de revenir à  une « autarcie levurienne » spécifique, un peu à  la manière d'un Courtois en Sologne. J'en entends déjà  ricaner,  mais ce credo en un respect profond de l'environnement est tout à  fait respectable. Cela se ressent déjà  nettement sur les vins. Les 2003 possèdent une acidité remarquable et un équilibre résolument différent de tous les autres vins présents ici. Si je ne craignais de tomber dans la caricature, je dirais "équilibre septentrional", et je pense savoir pourquoi ils plaisent tant à  certain dégustateur bien connu!
    Déjà  bien ressentie sur Les Calcinaires 2003, cette acidité domine pour apporter de la fraîcheur à  la Cuvée VV 2003, qui s'ouvre pourtant sur de légères notes de réduction.
    La Muntada 2003 présente vraisemblablement encore un peu de volatile au nez (elle est en cours d'élevage) mais délivre de subtiles notes de chocolat chaud, Poire Belle-Hélène pour Le Seb . De belles promesses, en tout cas !
    La Cuvée VV 2002 et La Muntada 2002 sont déjà  dans un style approchant.
    Magnifique Coume Gineste Blanc 2002, sur les fruits blancs, poire et pomme, mais à  la minéralité argileuse affirmée, malgré un côté riche et opulent. Un équilibre maîtrisé, sans lourdeur aucune.
    Et pour terminer, Le Soula 2002 rouge, un joli vin gourmand, plus classique dans l'esprit.
    Convaincu, mais pas totalement séduit, je pense que j'aurais besoin de les regoûter, tous ces vins, tranquillement et pas au cours d'un marathon.

    L'heure tourne, les papilles s'usent et faiblissent, mais il serait dommage de ne pas faire connaissance avec Alain Chabanon et ses vins.
    Trelans blanc 2002, assemblage original de vermentino et chenin, est un superbe vin plein de fraîcheur, en cours d'élevage, un peu fermentaire, pomme, poire et scoubidou! Le chenin a de l'avenir dans le Languedoc! S'ensuivent Fontcaude 2000 aimable, aux tanins civilisés, Esprit 2001 plus animal (syrah et mourvèdre), mais au fruité préservé, Les Boissières 2000 , pur grenache, élevé 30 mois en barrique, et Le Merle aux Alouettes 2001 , 70% merlot, très mûr, long, déjà  arrondi. Un domaine qui confirme son excellente réputation!

    Passage rapide au stand du Domaine Alquier, pour goûter un joli Blanc 2002, puis La Maison Jaune 2003, au beau fruité typique du millésime, et Les Bastides 2003, encore boisé, aux tanins serrés.

    Il est presque temps de conclure avec une ultime dégustation, au Domaine de la Rectorie/Préceptorie. Terres Promises 2002 de la Préceptorie, Coume Pascole 2002 de la Rectorie, séduisent, mais peut-être pas autant que le Maury Aurélie Pereira de Abreu 2003, et surtout le Banyuls 2003 Léon Parcé, aux extraits de mandarine et orange confites. Une douceur inouïe pour clore la journée.

    Enfin pas tout à  fait, puisque, pour répondre à  l'invitation d'Hervé Bizeul, nous ne nous faisons pas prier pour retourner goûter à  La Petite Sibérie 2002 !

    S'il fallait tirer quelques enseignements de cette dégustation-marathon, ce serait la qualité d'ensemble des domaines sélectionnés, avec beaucoup de beaux, bons, voire grands vins. Les blancs m'ont, d'une manière générale, très agréablement surpris par leur fraîcheur et leur équilibre. Le chenin a vraisemblablement un bel avenir ici! Les rouges 2002 sont particulièrement aimables, moins concentrés que les 2003, diablement plaisants. Les valeurs très sûres n'ont pas déçu, même Gauby, en ce qui me concerne, car je pense que l'avenir confirmera la grande qualité de ces vins, moins accessibles et séducteurs actuellement.
    Coups de coeur personnels pour 2 domaines aux vins épatants, une découverte et une confirmation: le Mas d'Espanet, qui devrait continuer à  faire parler de lui dans les années à  venir, et le domaine Canet-Valette, dont les vins m'ont vraiment réjoui. Et enfin, la Terre Inconnue, tout à  fait à  sa place dans cette dégustation de prestige. Comment, ça fait 3? Encore raté!

    Olif

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  • En passant par Reverolle (CH): cave de rêve, dégustation de rêve!

    Date: le 14/11/2004 à 23:15

    Reverolle! Un petit village perdu sur la rive droite du Léman, à  une encablure de Lausanne, sur les hauteurs de Morges. Si votre route personnelle vous y conduit un jour, n'omettez pas de passer par Vufflens-le-Château, vous vous trouverez nez à  nez, au sortir d'un virage, avec un château de conte de fées perdu au milieu des vignes. Un endroit un peu surréaliste comme la Suisse sait encore souvent en offrir.

    La Cave de Reverolle, cavedereve sur le web, un endroit qui ne paye pas de mine vu de l'extérieur, tout juste si une enseigne signale l'endroit! A l'intérieur, c'est le paradis de l'amateur. Il suffit de descendre les marches qui mènent à la cave pour comprendre que le bon goût règne à  cet endroit. Un bon goût qui doit pour beaucoup à  Pierre Muller, dont la sélection de vins frôle l'irréprochabilité. Vins suisses, vins français, vins italiens, tous de grande réputation. Quelques trésors disséminés dans des recoins de la cave, des vieux millésimes esseulés, un rayonnage de «rescapées», des fins de lots, et de l'autre côté de la rue, dans l'entrepôt, des montagnes de caisses et de cartons soigneusement empilés sur plusieurs étages et rangés de façon très précise dans des allées numérotées. Une organisation méthodique, efficace, helvétique!

    Pour stimuler le désir de l'amateur, de dégustations sont régulièrement organisées par Pierre Muller, assorties d'offres promotionnelles. En cette mi-novembre 2004, honneur à  la Bourgogne, essentiellement millésimée 2002. Et deux vignerons invités qui n'ont rien de bourguignon, mais qui viennent élargir les horizons de cette journée: Romain Papilloud, digne représentant du Valais, et Didier Barral, une certaine vision du Languedoc, idéaliste et très pure.

    Dégustation en trois parties, donc, qu'il fallait bien aborder dans un sens ou dans l'autre.

    Honneur donc au national de l'étape, j'ai nommé Romain Papilloud, une déjà  vieille connaissance (plus d'un an!) faite grâce à  LPV et sa cohorte de fiers valaisans. L'occasion de regoûter à  une gamme que je connais déjà  mais qui m'éblouit toujours autant.

    Fendant Grand Cru Amandoleyre 2003
    La preuve qu'il était possible de vinifier un beau fendant bien sec dans cette caniculaire année 2003. Vif et minéral, il me séduit par son caractère tranchant, le plus pur qu'il m'ait été donné de goûter dans ce millésime en Valais, n'en déplaise aux partisans du « petit sucre »!

    Petite Arvine 2002
    Un vin d'école, dont la typicité n'a d'égale que la pureté! Attaque mordante, sur les agrumes, vivacité, finale saline, une petite arvine sur le fil du rasoir, avec tout ce qui fait la séduction de ce cépage lorsqu'il est bien vinifié sur des terroirs adaptés.

    Amigne 2003
    Le « petit sucre » sur l'amigne ne me dérange pas du tout, tellement il s'accommode ici de l'acidité pour parvenir à  un bel équilibre. Jolis arômes de châtaigne, d'amande, de massepain. J'adore!

    Cornalin 2003
    Quel séducteur! Riche et concentré, ses notes fruitées de cassis se mêlent à  une jolie touche d'amande. Du volume, de la concentration, de la fraîcheur, tout concourt pour que ce vin soit divin dans quelques années.

    Syrah Barrique 2002
    Un cépage qui a de l'avenir en Valais, dont j'ai déjà  goûté quelques beaux spécimens, mais qui ne m'a encore rarement autant séduit que cette magnifique bouteille de 2002, épicée et poivrée, délivrant un fort joli fruité (fraise écrasée, cassis) et dont la très belle matière n'est en rien masquée par la barrique, qui ne fait qu'apporter l'étoffe sans pervertir les arômes.

    Après une telle entrée en matière, il fallait que la suite « assure »! Direction la Bourgogne, avec une sélection éclectique de beaux domaines, certains très réputés, d'autres qui se sont avérés être de jolies découvertes.

    Pouilly-Fuissé 2002, Terroir de Fuissé, Olivier Merlin
    On attaque par les blancs, avec un beau domaine de Pouilly, dont cette même cuvée, millésimée 1998, goûtée récemment, est un véritable bonheur. Ce 2002 séduit moins, du fait d'un boisé trop marqué, exotique, trop travaillé. La bouche est grasse, riche, puissante, exotique, avec des notes d'agrumes et d'ananas. Il faut lui laisser du temps, en espérant qu'il digère harmonieusement tout ce bois.

    Saint-Aubin 1er cru En Remilly 2002, Marc Colin
    Beaucoup plus frais et minéral que le précédent, citronné, il possède une matière plus aiguisée, séductrice, vive et longue. Pur et minéral, sans aromatique extravertie, un chardonnay comme je les aime!

    Meursault 2002, Albert Grivault
    Le nez est un peu fermé et s'ouvre progressivement sur des notes de fruits mûrs (agrumes). La bouche est ample, entre gras et vivacité, avec un léger côté exotique, mais très peu marqué. Un vin tout en retenue, avec un potentiel certain, pour ne pas dire énorme.

    Beaune Les Fleurs Blanches 2002, domaine Tollot-Beaut
    Place aux rouges et retrouvailles avec le domaine Tollot-Beaut, pour un Beaune Village déjà  relativement souple et agréable, caractérisé par une note fumée marquée, probablement due au barriquage. On sent pourtant le vin encore prisonnier de cette gangue de bois qui donne une finale légèrement amère.

    Volnay Les Grands Poisots 2002, Joseph Voillot
    Un grand charmeur, sur le fruit, la confiture de framboise. Une belle acidité fraîche, une grande facilité, mais un petit manque de longueur. Pas immense, mais bon!

    Pommard 1er cru Grand Clos des Epenots 2002, De Courcel

    La robe sombre, colorée, tranche d'avec le style du précédent. Beaucoup d'extraction, de boisage aussi, donnant le sentiment d'un grosse matière épicée et poivrée, un peu rêche, avec des tanins qui décollent un peu les gencives en finale. Un monstre, mais pas dans le style que je préfère.

    Nuits-Saint-Georges 2002, Frères Lécheneaut
    Le premier nez est boisé, mais cela s'estompe vite, laissant la place à  des notes fruitées et épicées. De la longueur, de l'acidité, de la fraîcheur, de bien belles promesses pour un vin en élégance et en dentelles.

    Nuits-Saint-Georges 1er cru Clos des Argillères 2002, Dureuil-Jenthial
    Situé à  Rully, en Côte Chalonnaise, ce domaine possède maintenant des vignes en Côtes de Nuits. Un nez très mûr, m'évoquant le pamplemousse, possédant donc de la fraîcheur. La bouche est bien enrobée, riche, néanmoins acidulée, très élégante. Un vin qui a de la classe!

    Vosne-Romanée 1er cru les Suchots 2002, Confuron-Cotedidot
    Robe sombre. Nez dense et profond, un peu poussiéreux, avec des notes de cacao. De la puissance enrobée en bouche, bien calibrée. Belle matière à  attendre!

    Charmes-Chambertin 2002, Perrot-Minot
    Nez légèrement grillé, révélant un grain très fin, serré, ample et large, long. Grande densité, digne d'un grand cru, et grande bouteille en devenir, cueillie dans sa phase embryonnaire.

    Chambolle-Musigny 2001, G. Barthod
    A souffert de passer derrière le Charmes-Chambertin, lui, le vin fin et délicat, fruité et souple. A boire pour le plaisir, de préférence avant un Chambertin!

    Chambolle-Musigny 1er cru Les Fuées 2001, G. Barthod
    La matière est plus soutenue, mais la bouteille vient juste d'être ouverte au sortir de la cave. La température de service trop fraîche fait ressortir les tanins et la rend un peu difficile à  juger.

    Morey-Saint-denis 1er cru Les Chaffots 2000, H. Lignier
    C'est un 2000, cela se sent, le nez est plus fondu, ouvert, fruité, floral, chocolaté. D'un abord assez aisé en bouche, il possède encore des tanins bien ressentis et est loin d'avoir dit son dernier mot, même s'il peut déjà  s'apprécier.

    Troisième et ultime étape de ce tour de table, la rencontre avec Didier Barral et une dégustation commentée de ces vins. Personnage très disert, homme de conviction, profondément respectueux de l'environnement, il se laisse volontiers aller à  exprimer son credo et fustiger ceux qui ne sont pas à  l'écoute de la nature, entre autres la génération des productivistes (dont son père!), embobinés par les sirènes de l'industrie chimique. Des arguments empreints de bon sens et des phrases bien senties à  l'encontre des Bordelais (en général), des Alsaciens (pas tous!) et des Bourguignons (« même si on les aime bien, ce sont de petits artisans ! »). Fou rire intériorisé car nous étions en compagnie d'un vigneron bourguignon incognito! Apologie du sans soufre, en quête de la «buvabilité»: son vin est fait pour être bu, et même en cas d'abus, doit faire le moins de dégâts possibles sur l'organisme! Et si j'ai bu une grande partie de ses paroles, je me laisserais volontiers mieux convaincre, preuve gustative à  l'appui!

    Faugères Tradition 2001
    60% Carignan, 30% grenache, 10% cinsault. Vendange non éraflée. Récolte bien mûre, cela se sent, donnant un vin légèrement réduit au nez, mais charnu, frais, fruité et rond, qui glisse tout seul.

    Faugères Jadis 2001
    50% Carignan, 40% Syrah, 10% Grenache. Quelle texture! Une chair grenue, comme quand un petit frisson parcourt l'échine, frisson de plaisir évidemment, là  où la peau est la plus fine! Un vin quasiment orgasmique! Mais je sais me tenir en public!

    Valinière 2001, Vin de Table
    Déclassé, comme en 2000, pour excès de volatile. 80% Mourvèdre, 20% Syrah. La matière est dense, animale, plutôt fourrure, et le grain très serré. Un cheval fougueux qu'il va falloir dompter pour le mériter et, pour cela, à  mon avis, faire preuve de beaucoup de patience.

    Blanc 2002, Vin de Pays de l'Hérault
    80% Terret blanc et Terret gris, complété par Viognier et Marsanne. Sans soufre également, avec las conséquences que cela implique sur sa robe, plutôt soutenue, légèrement brunie même. Son caractère oxydatif lui permet de passer sans problème derrière les rouges, même Valinière. Arômes de pomme caramélisée, presque tatin, et une structure veloutée caressante. Un vin qui ne peut pas plaire à  tout le monde, vu son caractère, mais j'aime plutôt bien. On se demande pourquoi!

    Après-midi éclectique mais passionnante, le reflet d'une gamme de vins très riche et d'une sélection judicieuse de la part de Pierre Muller, faisant littéralement de la petite cave de Reverolle une vraie cave de rêve.

    Olif

    http://www.lapassionduvin.com

  • Les 20 ans du CAVE S.A.!

    Date: le 17/12/2004 à 13:31

    20 ans! Le bel âge! ça se fête! Le Club des Amateurs de Vins Exquis a donc réuni ses clients, ses sympathisants, ses amis, pour une double rencontre dans les locaux de l'Hôtel Beaurivage, un palace genevois situé au bord du lac Léman, que certains n'hésitent pas à  appeler encore Lac de Genève, ce qui fait ricaner gentiment les Vaudois!

    Une véritable institution locale, que ce Club très particulier, basé à  Gland, dans le canton de Vaud, petite ville dont le nom peut prêter à  sourire, mais ne comptez pas sur moi pour tomber dans la grivoiserie, je ne mange pas de ce pain-là !

    Créé en 1984 à  l'initiative de Jacques Perrin, ce Club avait pour but d'offrir à  ses adhérents la possibilité d'acquérir les meilleurs vins au meilleur prix. Et d'inciter les gens à  la découverte, en créant une lettre d'information mensuelle, ainsi qu'une revue passionnante, Vinifera, et en organisant régulièrement des dégustations de haut niveau. Une véritable reconnaissance mutuelle s'est établie entre la majorité des vignerons, dont certains au nom prestigieux, et le CAVE, qui les a soutenus, à  une époque où il n'était peut-être pas aussi évident de s'imposer. Et de fait, ils ont répondu présent lorsqu'il s'est agi de commémorer cet anniversaire et de proposer à  la clientèle une dégustation de prestige, suivie d'un repas de gala.

    Le GJP n'a donc pas hésité à  fourbir à  nouveau ses costards-cravates, tout juste revenus du pressing après la Paulée de Meursault, et à  franchir la frontière, pour se mêler à  la foule helvétique qui se pressait dans les salons du Beaurivage.


    Le port de la cravate, une spécialité du GJP!


    Une foule venue de différents horizons: de Suisse évidemment, de la France savoyarde et jurassienne voisine, mais aussi du Luxembourg, l'occasion de faire connaissance avec un des invités d'honneur de cette manifestation, le Président du Grand Jury Européen, j'ai nommé François Mauss. GJP et GJE, même combat?




    La dégustation

    Chaque vigneron proposait à  la dégustation en général deux cuvées, ce qui portait à  une quarantaine le nombre de vins à  déguster. Plus de rouges que de blancs, et nous attaquons un tour préliminaire en ne goûtant que les vins blancs, ou presque, puisqu‘un ou deux nous auront échappé avant le passage aux rouges. Les vins sont commentés par domaine et non dans l'ordre de la dégustation, par souci de clarté.

    Egly-Ouriet

    Presque une évidence de débuter la dégustation avec une petite flûte de Champagne, surtout en provenance de ce beau domaine à recommander vivement.

    - Les Vignes de Vrigny: un Champagne non dosé, 100% Pinot Meunier. Récolte à  maturité, élevages longs sur lies (3 ans au minimum), une philosophie à  laquelle j'adhère totalement. Et le résultat est à  la hauteur. Un très beau vin, élégant, fin et racé, vif mais équilibré avec justesse.

    - Brut Tradition: Assemblage de Pinot Noir et Chardonnay en Grand Cru. Un Champagne tendu et minéral, au bel équilibre et à  la bulle particulièrement fraîche. Très convaincant!

    Domaine des Comtes Lafon

    Sympathique mais brève rencontre avec Dominique Lafon, pressé d'aller goûter les vins d'André Ostertag et de tailler une bavette avec lui. Juste le temps d'évoquer la Paulée de Meursault et le passage au domaine, et hop! le voilà  parti! Les vins sont, quant à  eux et fort heureusement, restés dans nos verres.

    - Mâcon Milly Lamartine 2003: fruité et crayeux, un vin dont la (relative) mollesse me semble caractéristique de certains 2003.

    - Meursault Clos de la Barre 2000: nez d'une grande distinction, sur les agrumes bien mûrs. La bouche est racée, élégante, minérale et d'une belle longueur. Un bien beau classique!

    Domaine Ostertag

    André Ostertag est également présent, un fidèle du CAVE S.A. depuis le début, "recruté" par Dominique Lafon.

    - Pinot Gris Muenchberg 2001: le nez est riche, intense mais en bouche, la minéralité est affirmée, confinant presque à  l'austérité, mais d'une grande pureté. Très, trop jeune, il devrait faire une bouteille magnifique dans de longues années.

    - Riesling Fronholz 2002: minéral, avec pour moi de petites notes pétrolées, et très mûr, une partie des raisins ayant même botrytisés, il allie richesse et fraîcheur, intégrant superbement son sucre résiduel. Encore un magnifique vin vers lequel je reviendrai à l'heure de l'apéritif!

    Domaine Georges Vernay

    Ce domaine emblématique de Condrieu a remonté un petit bout du Rhône pour faire découvrir deux de ses cuvées emblématiques. Christine Vernay, qui préside maintenant aux vinifications, est une vigneronne exigeante, adepte du classicisme en appellation Condrieu.

    - Condrieu Les Chaillées de l'Enfer 2002: nez archétypique de viognier sur la pêche blanche, presque too much, un peu artificiel, donnant l'impression au Seb de prendre sa douche avec du Tahiti Douche à  la pêche! En bouche, c'est par contre de la pêche de vigne à  croquer! Peut-être un effet millésime?

    - Côtes du Rhône Sainte-Agathe 2002: une curiosité, presque, puisqu'il s'agit de vignes de syrah plantées sur l'appellation Condrieu! Le vin est un peu atypique également, avec un nez presque pharmaceutique, et en bouche une acidité marquée. Encore une fois dû au millésime?

    Marie-Thérèse Chappaz

    Toujours un plaisir que de revoir Marie-Thérèse, venue elle aussi en amie, mais dont les vins sont déjà  épuisés depuis longtemps, même au CAVE S.A.!

    - Petite Arvine 2003: nez lactique, presque fromager, mais une belle structure malgré le petit sucre imputable au millésime (Marie-Thérèse s'en excuse d'ailleurs chaque fois qu'elle sert un verre!), mais qui commence à  se digérer. La tension minérale est quand même bien là , même si la finale saline est encore masquée.

    - Grain Pinot 2003: un joli Pinot Noir, très caramel au lait, qui possède un joli fruité et qui se laisse boire avec délectation.

    Château de Roquenégade, Corbières

    Une véritable découverte pour moi, que les vins de Frédéric Juvet, pourtant un ami de la première heure du CAVE. Un vigneron jovial et sympathique, qui fait des vins à  son image.

    - Roussanne 2002, Vin de Table: Frédéric Juvet aime la roussanne et ne se prive pas de la vinifier seule, même si cela lui retire le droit à  l'appellation. Un vin très agréable, fruité, sur la poire William, qui possède un joli soyeux en bouche et beaucoup de fraîcheur, malgré une rondeur bien marquée. Finale légèrement alcooleuse.

    - Corbières rouge 2001: très légèrement animal au nez, c'est un vin corsé, qui allie puissance et douceur épicée. 45% grenache, 45% syrah, 10% carignan.


    Simon Maye et fils

    Un grand plaisir que de retrouver Axel Maye, après la visite au domaine de ce printemps, et l'occasion de converser longuement avec lui puisque ce sera mon voisin de table lors du repas.

    - Petite Arvine 2003: le nez est lactique, mais on retrouve le côté tranchant et salin de la petite arvine, tous les sucres ayant été digérés.

    - Syrah 2002 barrique: le boisé est encore légèrement perceptible, mais le fruité épicé est poivré s'exprime déjà  bien. Une très belle réussite!

    Domaine de la Janasse

    Le Rhône était plutôt bien représenté, ce jour-là , avec cet autre très beau domaine plutôt méridional.

    - Châteauneuf du Pape 2002: un vin immédiat et accessible, presque souple, à  boire. Une victime du millésime, mais un vin plus qu'honorable. Les Rhodaniens ne se déplaçant pas sans biscuit, nous aurons l'occasion de goûter, en fin de repas, un VV 95 en magnum, absolument superbe.

    - Côtes du Rhône Les Garrigues 1999: un simple Côtes du Rhône, dont les vignes jouxtent l'appellation Châteauneuf. Très ouvert au nez, sur la cerise chocolatée (c'est un 100% grenache!), il possède des tanins un peu stricts et rustiques mais se laisse bien boire du fait d'un bel équilibre. Un vin franc du collier!

    Tardieu-Laurent

    Encore du Rhône, avec quelques échantillons de cette célèbre maison

    - Gigondas 2001: une très jolie syrah à  la robe noire, au nez poivré et épicé, un peu animal (fourrure), et à  la texture dense et serrée.

    - Châteauneuf du Pape 2001: un vin d'une grande densité et d'une chair admirable, très soyeuse, reposant sur la triade animal-griotte-chocolat.

    Peyre-Rose

    Troisième rencontre de l'année avec Marlène Soria et son millésime 1998, toujours avec le même plaisir.

    - Clos des Cistes 1998: le nez commence à  m'être très familier (poudre de cacao, griotte, avec de la minéralité) mais les tanins sont un peu trop marqués, presque sévères, le vin étant servi trop frais et la bouteille venant juste d'être carafée.

    - Syrah Léone 1998: des tanins plus fondus et un vin qui se laisse mieux approcher que les Cistes. L'élégance de Léone n'a d'égale ce jour-là  que celle de Marlène!


    Pago de Los Capellares

    Une vraie découverte que ce domaine espagnol qui nous propose 3 vins à  la dégustation, d'un très bon niveau.

    - Ribera del Duero 2003: un vin passé 3 mois en barrique, à  la robe noire et au fruité charnu. La rondeur des 2003 a également touché l'Espagne.

    - Tinto Crianza 2001: 90% tinto fino, 10% cabernet sauvignon. Une matière beaucoup plus serrée.

    - Tinto Réserva 2000: texture crémeuse, gros volume initial terminant sur une grande acidité.

    Dugat-Py

    Une rencontre avec la famille Dugat-Py, ça ne se refuse pas, tellement c'est exceptionnel! Il paraîtrait même que c'est seulement la troisième fois qu'ils se déplaceraient dans une manifestation de ce genre! Malheureusement, peu de temps pour entreprendre un dialogue tant la foule se presse pour goûter leurs vins.

    - Gevrey-Chambertin Coeur de Roy 2002: le nez est grillé de façon très élégante, témoignant de son élevage. Le boisé est encore bien perceptible en bouche, mais pas envahissant, se mettant au service d'une matière dense et immense. Il faut laisser le temps au temps!

    - Gevrey-Chambertin 1er cru 2002: un cran au-dessus dans la subtilité du toucher de bouche et la précision millimétrique de définition du grain. Un vin qui éclabousse les autres de toute sa classe! Personnellement, je suis conquis! On est en droit de faire la fine bouche devant le prix, mais ces vins-là  sont quand même des vins d'exception.

    Sociando-Mallet

    Fidèle parmi les fidèles, Jean Gautreau avait fait le déplacement depuis la Gironde et veillait au service de Sa Majesté!

    - La Demoiselle de Sociando 2002: souple et agréable, aimablement ouvert et fondu, c'est plutôt une bonne surprise dans un registre assez simple, pour un second vin parfois décrié.

    - Sociando-Mallet 2001: nez intense de cabernet récolté bien mûr, alliant poivron, bois noble, havane, tabac blond. Une puissance maîtrisée avec des tanins encore marqués et beaucoup de longueur. Un grand potentiel pour un très beau vin.

    Domaine Armando Parusso

    Une petite plongée dans l'univers des vins italiens que je connais fort mal. Des vins d'homme !

    - Barbera d'Alba Ornati 2002: des tanins acérés qui ressortent dans une grande acidité finale. Un vin dissocié dans une phase bien peu séductrice.

    - Barolo 1997: de la myrtille à  profusion dans un ensemble puissant mais plutôt harmonieux.

    Daumas-Gassac

    Passionnante rencontre avec Roman Guibert, représentant le célèbre domaine languedocien aux accents bordelais.

    - Daumas Gassac 2002: un premier échantillon très certainement bouchonné, mais pas de l'avis de tous, ne permet pas de porter un jugement sur le vin. Roman finit par ouvrir une seconde bouteille et cela n'a effectivement rien à  voir ! Premier nez animal, j'y retrouve la fraîcheur caractéristique des 2002 languedociens que j'ai eu l'occasion de goûter cette année. Très bon !

    - Daumas Gassac 2001: un vin plus dense et serré, vraisemblablement plus fermé, également, qui illustre bien la différence entre les deux millésimes. A attendre !

    Domaine des Sablonnettes

    Un domaine angevin dont on commence à  parler beaucoup et qui a fait le déplacement transversal jusqu'à  Genève, après une première étape à  Chambéry pour présenter sa gamme à  des Savoyards fin connaisseurs. Vignerons exigeants, Christine et Joël Ménard sont les seuls à  proposer à  la dégustation des liquoreux. Nous clôturons donc notre parcours par le passage à  leur stand.

    - Coteaux du Layon Les Erables 2001: nez très confit, évoquant (par auto-suggestion ?) le sirop d'érable, mais dans lequel je retrouve aussi une petite note que je qualifierais de poussiéreuse, mais qui pour certains est minérale, apportée par le terroir. La même impression que lors des LPViades en mai dernier, lorsque nous avions goûté les vins de ce domaine. La structure est splendide mais je ne peux m'empêcher d'être perturbé par cette sensation poussiéreuse.

    - Coteau du Layon Rablay 2002, Le Vilain Canard: une parcelle déclassée par L'INAO et qui ne pourra bientôt plus revendiquer l'appellation Coteaux du Layon. Et pourtant, comme dans le conte, le vilain canard est probablement un magnifique grand cygne ! Présentant de la volatile au premier nez, il développe une puissance et une intensité magistrales, magnifiquement équilibrées par un beau support acide.

    Le repas

    Après cette longue dégustation apéritive, il fallait bien se restaurer! Sur les 700 invités à  la dégustation de l'après-midi, il n'en restait plus que 200 pour se régaler lors d'un somptueux repas concocté par le chef du Beaurivage.

    Ayant laissé le stylo au vestiaire, j'insisterai essentiellement sur la qualité des mets proposés et surtout la perfection des accords.

    Après un parfait Champagne Brut non dosé d'Egly-Ouriet à l'apéritif, l'acidité marquée du Pinot Gris Muenchberg 1996 d'André Ostertag s'est parfaitement mariée avec les grosses langoustines rôties en kadaïf et chiffonnade de basilic. Le classicisme de l'accord entre les coquilles Saint-Jacques rôties au noix et le Meursault-Charmes 1997 du domaine des Comtes Lafon n'en était pas moins exceptionnel. Sur le filet de canette au miel d'épices, il fallut se partager entre la cuvée Emile Peynaud 2001 de Daumas-Gassac et la Cuvée Jean Gautreau 1995 de Sociando-Mallet. Choix cornélien, mais comme l'a souligné François Mauss, le propre de ces grands vins d'exception, c'est que l'on peut passer de l'un à  l'autre de façon quasi-naturelle et harmonieuse, et vice-versa.


    Emile Peynaud 2001 vs Jean Gautreau 1995: la pléthore de munitions laisse rêveur !


    Cela ne nous a nullement empêchés de revenir sur le blanc en accompagnement du vieux Gruyère affiné 30 mois : le Païen 2002 de Simon Maye en a surpris plus d'un dans l'assemblée ! Et pour terminer avec le crumble d'ananas confit, rien de mieux que le Côteaux du Layon La Bohême 1999 du domaine des Sablonnettes.

    Un sans faute !

    Amateurs de vins exquis, bienvenue au club !


    Olif


  • Grands blancs!

    Date: le 24/12/2004 à 19:08

    Prat-Ar-Lier ou Pont-Ar-Coum? Même si la liaison Ouest-Est n'est pas des plus rapides, le Jurassien pas encore totalement crétin ne crache pas sur une bouffée d'iode en provenance de l'Atlantique. C'est même une tradition au GJP  (Grand Jury Pontissalien), que d'organiser des soirées huîtres. Souvenez-vous:
    la guerre de sécession autour d'une poignée d'huîtres, ou encore, bien avant, la transhumance des huîtres, un quasi-pêché de jeunesse écrit sur LPV!

    La principale originalité de cette soirée, outre son comité plus restreint, venait de la provenance des huîtres et de la façon de les accommoder. Infidélité à Gillardeau pour commémorer les non moins excellentes huîtres d'Yvon Madec, de Prat-Ar-Coum, en souvenir des dernières vacances estivales en Finistère Nord.

    Des huîtres en trois services, cela faisait un moment que j'en rêvais!

    Au naturel, d'abord, panaché de plates n°3, à la saveur iodée et saline, riche et puissante, et de Spéciales creuses n°3, charnues, aux jolis arômes de noisette. Et puis des huîtres en gelée, une recette inédite glanée sur le web, une gelée élaborée avec un fumet de Saint-Jacques et du vinaigre échaloté, une grande première réussie à merveille. Et, enfin, des huîtres gratinées au Champagne, un grand classique toujours aussi réjouissant. Pour ceux qui goûtaient moyennement les huîtres, mais aussi les autres, une assiette de Saint-Jacques servies sur un lit de salade mélangée clôturait le repas. Fromage, dessert, et puis au lit! Ce qui nous a quand même menés fort tard dans la soirée!

    Et avec tout ça, pour rester en phase avec la fine pellicule de neige qui recouvrait alors les sommets montagneux, des blancs. Des grands, des tranquilles, d'autres moins, mais que des blancs! A part deux rouges. Et un Porto ! Rouge aussi! Que des grands blancs, surtout, piochés dans les régions septentrionales limitrophes, de façon totalement délibérée et volontaire. Champagne, Bourgogne et Alsace. Un grand quart nord-est qui a quand même trouvé le moyen de faire l'impasse sur le Jura ! Pourtant l'autre région des grands blancs, si mes souvenirs sont exacts !

    Les vins ne sont pas servis à l'aveugle et les commentaires sont un peu laconiques, je n'avais pas beaucoup envie de bosser ce soir-là !

    Les Vignes de Vrigny, Egly-Ouriet
    Pour se faire le palais en ouvrant les huîtres, une petite gorgée de cet excellent Champagne 10% Pinot Meunier qui allait avoir le privilège d'entrer dans la sauce.

    Cuvée William Deutz 1996
    Un Champagne de race, à la bulle d'une finesse qui n'a d'égale que son élégance. Beaucoup de vivacité, une acidité par encore parfaitement fondue, mais beaucoup de tenue, voilà un vin qui mérite quelques années de cave pour s'assagir et s'exprimer pleinement.

    Crystal 1990, Roederer
    Le nez est intense, riche, brioché, vineux, développant par la suite des notes de mirabelle et d'amande finement grillée. Gras et mordant à la fois, il est superbement équilibré par sa bulle. Très grande bouteille, achetée il y a maintenant plusieurs années, et à qui j'ai laissé le temps de s'épanouir dans ma cave.

    Les Oliviers 2001, J.L. Denois
    Assemblage de Marsanne-Roussanne en Vin de Pays d'Oc. Un joker du Seb! Très beau toucher de bouche, soyeux, partant légèrement sur l'oxydation.

    Meursault-Blagny 2001, domaine Martelet de Cherisey
    Un deuxième échantillon en provenance de ce domaine repris en 1999, et dont les vignes étaient auparavant exploitées en fermage par Louis Latour. Minéral et tendu, un Meursault comme je les aime!

    Meursault-Charmes 1999, domaine René Monnier
    L'antithèse du précédent, gras et boisé, un peu outrancier. Son gras est néanmoins plaisant.

    Bienvenue-Batard-Montrachet 1999, domaine Leflaive
    Curieusement (?), le premier nez pétrole légèrement, style fond de cuve, mais pas celle du grand-père du Seb. Arômes terpéniques, donc, qui évoluent rapidement vers un joli grillé. En bouche, c'est confondant de pureté, bouleversant pour le Seb, bouleversifiant pour François. Alors Bienvenue, Bâtard, au Panthéon des grands vins!

    Riesling Altenberg de Bergheim 1999, M. Deiss
    Les notes terpéniques de ce riesling font relativiser celles du vin précédent! C'est surtout très mûr, opulent, riche, mais d'une grande longueur et d'un très bel équilibre qui permet toutes les audaces culinaires, en l'occurrence avec les Saint-Jacques ce soir-là , sans que le résiduel ne vienne gêner à aucun moment.

    Zeroo Default, Domaine Schueller
    Parce que François avait encore une petite soif, il a fallu redescendre à la cave chercher une autre bouteille joker! Et derrière l'Altenberg, ce Zero Defaut n'en avait toujours pas, de défaut, si ce n'est qu'il est plus sec, plus minéral, plus tendu, mais avec du fruit derrière (de la pomme séchée).

    Vosne-Romanée La Colombière 1999, Fabrice Vigot
    Un beau vin, légèrement fumé, jouant plus sur l'élégance et la finesse que la concentration. Une découverte!

    Gevrey-Chambertin VV 2002, S. Esmonin
    A l'aveugle, celui-là ! La robe est éclatante, le nez révèle un boisé finement grillé qui prend pour l'instant le dessus sur une matière très concentrée qui possède beaucoup de race. Personnellement, j'aime beaucoup!

    Fonseca Vintage Port 2000
    Un des nombreux trésors qui garnissent la cave du Seb. D'une richesse époustouflante, il sublime le vieux Stilton déniché pour l'accompagner, puis se la joue sur du velours avec le gâteau au chocolat et aux épices. C'est riche, gras, intense, sans jamais être lourd ni alcooleux. Une très grande bouteille, assurément, même si en l'occurrence elle était petite (50 cl).

    Une vraie soirée de Noël avant l'heure, histoire de clôturer une année particulièrement faste avec le GJP. Et de faire passer celle qui s'annonce. Ce soir, 24 décembre, cela risque d'être moins pointu, je vais dans la belle famille!

    Olif et le GJP, from Pontarlier (25)

    http://www.lapassionduvin.com

  • Un anniversaire qui fait Tâche!

    Date: le 08/03/2005 à 16:51

    35 ans, on ne se sent pas encore tout à  fait vieux même si on n'est déjà  plus trop jeune, alors, ça se fête! Cela fait quelques années que les miens sont derrière moi, mais ce n'est pas une raison pour laisser les potes dans la détresse de mettre une année de plus au compteur. Surtout quand ce copain dispose d'une cave dont je n'aurais même pas osé rêver quand j'avais 35 ans et qu'il est tout disposé à  marquer le coup de façon indélébile. Et, pour sûr, on s'en souviendra encore longtemps, des 35 ans du Seb!

    Cuvée William Deutz Rosé 1996
    Beaucoup de classe et d'élégance dans ce champagne rosé très vineux qui a eu pour seul tort de passer en vedette américaine. Peut-être encore un peu fermé, également. Pas un champagne d'apéritif car il lui manque un côté incisif et appétant, mais une néanmoins très belle bouteille à attendre un peu en cave.

    Champagne Veuve Clicquot Vieille réserve 1995
    Là  encore un Champagne très riche mais au nez somptueusement ouvert, sur la viennoiserie, la bonne petite brioche bien ronde et encore toute chaude d'un boulanger artisanal. La bulle est vive et fine, apportant le peps nécessaire à  l'équilibre de ce très beau champagne dont les arômes persistent longuement en bouche.

    Chassagne-Montrachet 1er cru Morgeot 1994, Domaine Leroy
    Un magnifique vin de chardonnay dont les effluves résonnent encore dans mes narines! Une intensité et une richesse hors du commun, où l'on sent à  la fois la complexité du cru et l'apport du vieillissement, la grande maturité du raisin et le soin apporté à  la vinification. C'est par sa structure et sa texture qu'il impressionne encore le plus. Je me demande si j'ai déjà  bu un vin aussi parfait! Mais une perfection qui ne lasse pas, qui n'exige pas que l'on soit à  la recherche du moindre petit défaut! Juste un instant que l'on a envie de prolonger. Une perfection tout simplement parfaite! Un des plus grands vins blancs que j'ai eu l'occasion de boire en cette année 2005 débutante. Un des plus grands vins, toutes couleurs confondues, tous millésimes confondus, depuis que je déguste du vin, même. C'est vous dire si c'est bon!

    Puligny-Montrachet 1er cru Les Combettes 2000, Domaine Jacques Prieur
    Un sparring-partner de 1er choix pour le Chassagne de Leroy et ce vin a beaucoup plu, parce qu'il fait preuve d'une séduction assez immédiate, avec ses arômes d'agrumes, d'ananas, et possédant en outre beaucoup de fraîcheur. Dans une phase plutôt primaire, voire primo-secondaire, il a, je pense, besoin de temps pour se magnifier, et il en a les moyens. Même si le Chassagne l'a un peu éclaboussé de toute sa classe!

    La Tâche 2000, Domaine de la Romanée Conti
    Si l'on excepte la Conti 1979 que j'ai à  peine eu le temps d'entregoûter lors de la Paulée de Meursault, il s'agit de la première bouteille de ce domaine mythique, le rêve de tout amateur de Bourgogne, que j'ai l'occasion d'apprécier pleinement. J'avais bel et bien égaré mon stylo mais n'avais pas non plus l'envie de prendre scolairement des notes, juste me laisser porter par l'instant. Carafée 2 heures avant le repas, servie en accompagnement d'un tournedos Rossini (l'accord de choix, paraît-il!), cette Tâche est bien ouverte lorsqu'elle se présente dans nos verres. On y décèle la pureté du fruit derrière de francs arômes de pétales de roses fanées. Fanées, mais avec encore un sacré éclat! La netteté dans la structure, la finesse dans la définition, l'élégance dans la longueur, la classe qui parle, sans épate, sans poudre aux yeux. De la finesse, toujours! L'âme d'un grand terroir!
    Ce moment fut grandiose et beau, à  peine troublé par une petite goutte de ce précieux nectar qui tomba de la carafe. Et bien vous me croirez si vous voulez, mais il y a eu ni tache, ni Tâche sur la nappe!

    Je ne sais comment ce vin se comportera dans 25 ans, probablement très bien, mais il aurait été dommage de ne pas profiter d'un petit aperçu de son potentiel actuel, avant que je sois moi-même un peu trop vieux!

    Château La Conseillante 1970 (magnum)
    Autre temps fort de cette soirée, l'ouverture de ce magnum de la Conseillante, une des grandes réussites du millésime, si l'on en croit les critiques autorisés, juste histoire de voir si un vin de Bordeaux vieillit mieux ou moins bien qu'un solide gaillard du Haut-Doubs. Toujours surprenant, la capacité d'évolution d'un vin dans un grand contenant! La robe de ce 1970 en magnum n'est pas celle d'un vin très évolué, ses arômes n'ont pas encore basculé complètement dans le tertiaire, mêlant des effluves de havane, de cèdre, de bois noble et d'épices, la structure du vin est encore loin de souffrir le moindre creux en bouche et possède beaucoup d'allonge. Une sensation d'harmonie totale, un instant d'émotion rare où l'on reste suspendu sur son petit nuage, le verre aux lèvres.

    Je ne sais comment ce vin se comportait, il y a 25 ans, probablement très bien, et il est dommage de ne pas l'avoir goûté à  cette époque-là , pendant que j'étais moi-même un peu trop jeune!

    Chateau Pajzos 1991 , Tokaji dry, 100 % furmint
    Une originalité de plus à  mettre à  l'actif du Seb, ce Tokaji dry au nez surmaturé mais sec en bouche et un peu oxydatif! Idéal sur le fromage, même s'il a été un peu éclipsé par les monuments d'avant, permettant de se refaire la bouche avant d'attaquer les sucreries.

    Ruster Ausbruch 2001, Feiler-Artinger
    Un liquoreux autrichien de la région du Burgenland, résultat de l'assemblage de 4 cépages : Chardonnay, neuburger, weissburgunder et welschriesling. 10 % alcool, beaucoup de fraîcheur, avec des notes d'ananas confit, et une certaine légèreté qui n'est pas sans évoquer celle de l'Ode à  L'instant Présent d'André Ostertag. Un très beau liquoreux, gourmand à  souhait, à  cueillir sur son fruit, le mariage idéal avec un délicieux gâteau à  l'ananas de Mr Poix-Daude.

    Après tout cela, on a encore goûté à  un ou deux trucs fortement alcoolisés, mais ma mémoire faisait défaut depuis longtemps!

    Vivement les 36 ans du Seb! 36 ans, ça se fête aussi, non?

    Olif

  • L'Alchimie des Vins Etonnants à Pontarlier

    Date: le 12/03/2005 à 08:44

    Pontarlier, ville-étape du tour de France des vins étonnants! Avant Evreux, même! Le grand prix de la montagne!


    Quand l'alchimiste des saveurs de Pontarlier reçoit le caviste étonnant du Web, à  l'initiative du GJP, la soirée étonne et détonne ! Prévu de longue date, et déjà  reporté une fois, ce rendez-vous a tenu toutes ses promesses, par l'originalité des vins proposés par Eric Reppert, par celle de la cuisine de Pierre-Ivan Boos, avec subtile recherche d'accords, et enfin par l'intérêt suscité chez des dégustateurs allant du novice complet au plus confirmé, mais souvent prisonniers d'une approche très traditionnelle et classique du vin.

    Soirée très enneigée pour la saison (nous sommes début mars), mais qui n'a pas refroidi les ardeurs des participants, même ceux venant des pays tropicaux. Et l'horaire étant à  peu près respecté, on attaque par un petit verre apéritif ! Plusieurs, en fait!

    Prima Donna 2004, Prieuré La Chaume, Vin de Pays de Vendée
    60% Chardonnay, 40% Pinot Noir vinifié en blanc, une curiosité en provenance d'un nouveau vignoble vendéen, entièrement planté il y a quelques années et situé à  Vix. Très aromatique (sapide ?), sur les fruits blancs et des arômes encore fermentaires, il est à  la fois vif, frais, tendu et gras, témoignant de sa grande richesse qui ne procure aucune sensation de lourdeur. Simple et désaltérant !

    Les Zunics 2001, Frères Couillaud, Vin de Table
    Le Muscadet du XXIème siècle? Assemblage inédit et « zunique », surtout dans cette région, de Petit Manseng, Viognier, Chardonnay, Sauvignon gris et Muscat à  petits grains, ce vin a tout pour dérouter, même le dégustateur le plus averti. La robe est dorée, le nez très mûr, limite surmaturé, développant d'intenses notes de fruits exotiques, de papaye, de mangue, sur des notes un peu oxydatives. La bouche ne suit pas le nez dans ce registre très aromatique et se révèle sèche, plutôt stricte, avec un beau support acide. La marque du petit Manseng, assurément, qui s'exprime plutôt bien hors de son royaume, toujours à l'Ouest, mais bien plus au Nord!

    Péchigo 2000, Chenin Moelleux, Vin de Table
    Direction Sud-Est, cette fois, du côté de Limoux, pour un cépage habituellement rencontré plus à  l'Ouest. Dans un registre demi-sec, moelleux, un vin très riche qui s'épanouit dans le verre sur des notes oxydatives de pommes au four, de cire et d'encaustique, avec en bouche la patine d'un vieil escalier en bois bien ciré. Une grande douceur!

    Bel Canto 2003, Merlot, Prieuré La Chaume, Vin de Pays de Vendée
    Retour à  l'Ouest, pour un vin à  la robe noire à  reflets violines, qu'on verrait bien dans le Sud! Le nez est floral, sur la violette, et je ne peux m'empêcher d'y associer des notes métalliques, qui pourrait évoquer la Négrette. Ou le Ragoûtant, puisqu'on est de nouveau en Vendée! Perdu ! Il s'agit d'un beau Merlot, qui possède une attaque soyeuse et riche, mais dont la finale est particulièrement amère. Une amertume qui persiste longtemps en bouche et qui déroute un peu. Il s'agit ici du premier millésime et je pense que ce domaine est porteur de beaucoup de promesses. Thierry Michon risque bientôt de ne plus être tout seul à  produire des choses hors normes en Vendée!


    Après cette mise en bouche très appétissante, les vins suivants seront servis sur le repas, Pierre-Ivan ayant travaillé quelques accords.

    Le Nombre d'Or 1998, Blancs de Blancs, L. Aubry
    Avec l'amuse-bouche, une petite brochette de fruits de mers accompagnée d'une tête de crevette frite, tout à  fait comestible et qui croustille sous la dent, ce très beau et très original Champagne, constitué d'un assemblage de 7 cépages, dont certains se perdent dans la nuit des temps. Chardonnay, Pinot Noir, Pinot Meunier, Arbanne, Petit Meslier, Fromenteau et Enfumé. Tout un programme qui est à l'origine d'un vrai Champagne de table, riche et complexe, vineux, développant de jolis arômes de fruits blancs frais sur fond très tonique grâce à  une bulle fine et vive. Un vrai vin plaisir qui a remporté un franc succès ce soir-là !

    Ineptie 2002, Domaine des Belles Pierres, Vin de Table
    Roussane, Viognier et Muscat à  petits grains récoltés en surmaturité, lorsque le millésime le permet, donnent un vin riche et gras, comportant un peu de sucre résiduel, ce qui fut à  l'origine de sa non-homologation en AOC. Beaucoup de maturité, donc, dans ce vin à l'équilibre pourtant plutôt sec, les 7 g de SR ne suffisant pas à  en faire un vin moelleux. Puissance et douceur, sans l'once d'une lourdeur, font de ce vin un idéal compagnon d'une cuisine plutôt épicée et relevée, se mariant parfaitement avec l'entrée que nous avait concocté l'Alchimiste des Saveurs, un Tataki de bonite au sishimi, gomasio et vinaigrette à  l'huile de sésame!

    Pour accompagner les deux vins rouges, servis simultanément, des Joues de porc braisées au cumin et genièvre, Quinoa et poêlée de racines hivernales, fondantes à  souhait, firent merveille.

    Z de L'Arjolle 2002
    Le Zinfandel du Sud de la France, travaillé expérimentalement au domaine de L'Arjolle en collaboration avec l'INRA de Montpellier. Un vin du Sud, épicé, à  la robe burlat, mais au boisé encore trop marqué, la structure pêchant un peu par manque d'opulence, sur une matière acidulée et maigrelette. La petite sucrosité finale ne suffit pas à rétablir l'harmonie d'un vin qui me semble encore bien dissocié à  ce stade.

    Chenançon noir 2002, La Tour de Penedesses
    Un autre cépage expérimental, fruit du croisement entre le Grenache et le Jurançon noir, qui n'est que très peu cultivé. Beaucoup d'originalité, pourtant, et une matière riche et opulente, une vraie liqueur de fruits noirs épicés et poivrés, crémeuse à  souhait, qui prend le temps de s'installer en bouche jusque dans la finale qui comporte un soupçon d'amertume, à  la manière d'un vieux Carignan. Beaucoup plus convaincant que le Z, servi en parallèle.

    Djebel 2001, Hautes Terres de Comberousse
    Pour accompagner le fromage, un Saint Marcellin aux écorces d'orange confites, avec mesclun d'herbes à  l'huile d'archide grillée, un véritable OVNI, comme le nomme Eric Reppert, du Rolle passerillé sur pieds, élevé sur lies fines sans ouillage pendant 3 ans. On retrouve bien là  un registre oxydatif caractéristique de fruits secs, de figue, d'épices, de miel de châtaignier. Son côté moelleux, presque liquoreux, le rend très séduisant et forme un joli accord avec le fromage.

    L'Archaïque 2001, Domaine du Grand Lauze
    Du Mourvèdre vendangé tardivement, en surmaturité, affichant 185 g de sucre résiduel, et exhalant une grande concentration de fruits noirs, cassis et myrtille, sur des notes évoquant le rancio et le tabac blond. Un vin assez étonnant, finalement, ce qui ne surprend guère lorsque l'on connaît le thème de la soirée! L'idéal pour clôturer, en fait, et sublimer un Soufflé renversé au chocolat, voile de sucre au poivre à  queue et glace de lait!

    Une soirée à  inscrire dans les annales, une vraie réussite, liée autant à  la qualité et l'originalité des vins présentés que par celle du menu les accompagnant. Un genre d'alchimie étonnante, quoi!



    Olif

  • Balade initiatique au cœur de la Côte des Blancs

    Date: le 23/04/2005 à 15:39

    Orchestrée par Jacky Rigaux, à la demande du CAVE S.A., cette soirée-dégustation d’anthologie a permis de toucher au sublime en proposant de découvrir quelques perles de la Côte des Blancs sur la Côte, à Gland (CH) . En dehors de la Bourgogne même, in situ, il n’y a guère qu’en Suisse que l’on puisse goûter à autant de merveilles en même temps! Par chance, le Jura est situé à égale distance des deux, ce qui permet de basculer aisément d’un côté ou de l’autre selon les opportunités!

    Présenté comme un philosophe du terroir par Jacques Perrin, le maître à penser du CAVE, Jacky Rigaux s’est fendu d’un petit speech introductif fort clair et enrichissant, permettant d’appréhender de façon assez simple la complexité de la notion bourguignonne de terroir. Présentation évidemment accommodée à la sauce Olif, ce que j'en ai retenu, en fait!

    Au départ était le Néant! Il y eu un jour et il y eu une nuit et Dieu décida de créer la Bourgogne, d’emblée, histoire de ne pas boire de l’eau jusqu’au 7ème jour!

    Nooon! COUUUUPEZ...!

    En fait, ce n’est pas du tout ça! L’histoire de la Bourgogne, c’est une histoire humaine et géologique, remontant déjà à l’Antiquité, avec des noyaux d’élite autour de Gevrey et Meursault, identifiés comme tels du temps de Romains. L’anticlinal de Gevrey, qui a fait ascensionner le Jurassique moyen et privilégié l‘émergence de sols calcaires, se prolonge par le synclinal de Volnay, assorti de davantage de marnes argileuses recouvrant la couche calcaire. Des terroirs beaucoup plus propices à la production de grands blancs, concentrés dans cette zone au Sud de Beaune avec le Montrachet comme colline idéale, à l'exception de la zone similaire du Charlemagne, sur la montagne de Corton, issue de la jonction du synclinal et de l‘anticlinal, et comportant le même type d‘argile. La variété des terroirs se fait par le jeu des failles et des courants d’air, différenciant ainsi des zones parfois très proches géographiquement. Les bons moines n’ont-ils pas parlé d’emblée de notion de « climat », faisant référence autant à la géologie qu’à la climatologie?

    Si ce qui fait en partie le charme de la Bourgogne est d’abord constitué par son Histoire et ses Terroirs, il ne faut pas perdre de vue que ce qui est essentiel pour l’amateur pressé et hédoniste (non, ce n’est pas une tare!), à savoir le contenu du verre, l‘est aussi pour l‘amateur de Bourgogne. Rien ne vaut alors de passer aux travaux pratiques avec quelques échantillons prestigieux de ce qui peut être produit sur ces grandes terres à blanc!

    Dégustation non à l’aveugle, par paires en principe comparables, sauf deux vins qui ont été servis isolément.

    Meursault Les Tessons, Clos de Monplaisir 2002, Domaine Roulot
    Robe jaune pâle. Nez très pur, finement grillé et toasté, où perce la minéralité à l’agitation. Un côté grillé qui évoque un peu le style des vins de Coche-Dury, le « mercaptan de bois » comme j’ai pu entendre, ou plus exactement l’autolyse des levures, une certaine forme de réduction s‘harmonisant à l‘aération, plus qu’un boisage excessif (seulement 15 à 18% de bois neuf sur ce vin). L’attaque est franche, vive, possédant une jolie tension minérale. Un petit joyau, véritable modèle de précision et de netteté aromatique.

    Meursault Bouchères 1er cru 2002, Domaine Roulot
    Avec les Bouchères, on rentre dans le « bon ventre de la pente », ce milieu de coteau qui va être à l’origine des plus belles parcelles, d’abord en 1er Cru puis en Grand Cru. La robe est également jaune pâle, mais un peu plus soutenue que celle du vin précédent, légèrement dorée. Le nez est très mûr, sur les agrumes, le citron. La bouche est ample et déjà grasse, avec une structure large non dénuée de vivacité, terminant sur une acidité citronnée qui apporte la longueur. Vinification identique au précédent, hormis un pourcentage de bois neuf s’élevant jusqu’à 30%, et une structure radicalement différente, que l’on peut juger plus complexe et profonde que celle des Tessons, mais pas plus belle! Un exercice au cours duquel la notion de terroir devient palpable, et en plus les vins sont bons!

    Meursault Perrières 1er Cru 2000, Comtes Lafon
    Le plus prestigieux des 1ers Crus de Meursault, celui qui aurait pu (ou dû?) être classé en Grand Cru, par un des plus grands domaines de l’appellation.
    La robe dore légèrement. Le nez est retenu, frais et minéral. La bouche est d’une grande pureté, minérale, ample et progressive, allant crescendo, presque cristalline. La longueur est exceptionnelle. Un vin magnifique à un stade encore embryonnaire.

    Meursault Genevrières 1er Cru 2002, Domaine Bouchard Père et Fils
    Un autre 1er Cru vedette, dans un beau millésime. Nez très mûr, sur les agrumes, les fruits exotiques, un peu anisé. La bouche est ample et grasse, opulente, minérale et citronnée en finale, avec de la fermeté. Dans une phase primaire accessible, ce très beau vin diffère totalement des Perrières dans son expressivité, même en intégrant la différence de millésime et de producteur.

    Meursault Les Narvaux 1999, Domaine d‘Auvenay
    Retour sur un « village » , mais lequel! Un des quatre ou cinq capables de rivaliser en terme de vieillissement avec un 1er Cru, et par un domaine d’anthologie, de surcroît! Le nez envoûte, riche, gras et frais en même temps, archétypique du canon murisaltien, qui associe, d’après Jacky Rigaux, gras et minéralité. La bouche est d’une précision exemplaire, avec un toucher délicat, en dentelle, mais d’une grande densité. On le sent qui résiste, qui ne se livre pas encore complètement, mais la longueur est déjà phénoménale. Un vin qui ne fera que s’épanouir dans le verre, d’un niveau exceptionnel!

    Puligny-Montrachet 1er Cru Le Cailleret 1998, Domaine de Montille
    La robe est jaune pâle, le nez citronné, un peu sur le zeste. Pur et cristallin, vif et tendu, sur le fil, la finale s’élargit un peu sans trop s’écarter de la ligne. Un vin d’une grande beauté épurée! Prolongement naturel du Montrachet, Le Cailleret a l’avantage de se révéler plus vite que son illustre voisin.

    Puligny-Montrachet 1er Cru Les Demoiselles 1998, Michel Colin-Deléger
    La robe est très dorée. Le nez reste frais, mais présente un côté oxydatif net, miellé, avec des arômes de vieille cire. Il était pourtant plutôt réductif à l’ouverture, justifiant un carafage long de plus de 5 heures. La bouche est grasse, visqueuse et veloutée, puis termine sur des amers prononcés, dans une sensation un peu alcooleuse.Un bon vin, d'un style différent, mais un cran en dessous du précédent.

    Chassagne-Montrachet 1er Cru En Rémilly 1997, Michel Colin-Deléger
    Un premier cru situé dans le prolongement du Montrachet, avec le même sous-sol, mais dans l’amorce de la combe, donc pas soumis aux mêmes conditions climatiques. Le nez est très riche, un peu miellé, dans un registre superposable au Puligny précédent du même domaine. La structure manque d’un peu d’amplitude et de longueur et le vin paraît moins abouti que tous ceux goûtés préalablement.

    Chassagne-Montrachet 1er Cru Rémilly 1997, Verget
    La robe est jaune soutenu et le nez épanoui, alliant des arômes de cake aux zestes d’agrumes et de miel. La bouche est large et ample, longue et persistante, possédant une très belle acidité pour le millésime. Un beau vin à maturité!

    Corton Charlemagne 1999, Domaine Leroy
    L’intrus de la soirée, puisque un peu à l’écart de la Côte des Blancs. Nez très pur, sur la réserve, avec une petite pointe de minéralité empyreumatique, à peine teintée d’hydrocarbure. On est loin d’un Riesling mais pour Jacky Rigaux, cette petite touche terpénique est la marque du terroir du Charlemagne. En bouche, on nage dans l’opulence, mais une opulence non démonstrative, avec une profondeur et une densité exceptionnelles qui n’ont d’égales dans le superlatif que la longueur. Beaucoup de viscosité, et une acidité magnifique, pour un équilibre qui frôle la perfection. Un des sommets de la soirée, assurément, même s’il reste encore deux vins à venir, et pas des moindres!

    Bâtard-Montrachet 2002, Michel Niellon
    Nez puissant, presque un peu démonstratif, sur les fruits blancs caramélisés. La bouche est riche et enrobée, un peu flan au caramel, avec une touche miellée. Un petit côté oxydatif indéniable, mais une minéralité marquée et une belle acidité persistante. Un vin riche et puissant!

    Montrachet  2000, Comtes Lafon
    Nez très pur, encore sur le fruit, pêche de vigne (?) et fruits blancs. En bouche, une grande droiture minérale et une acidité prédominante, qui induisent une longueur et une persistance exceptionnelles, se perdant dans de beaux amers finaux. A un stade embryonnaire, il promet énormément, pour qui aura la chance de tremper ses lèvres dans ce nectar dans une dizaine d’années, quand ce terroir majuscule, aux caractéristiques idéales, à mi-pente, exposé plein Est, se révélera dans le vin.

    Pour Jacky Rigaux, le terroir, c’est une philosophie, un choix de vie! Il y a des soirs comme cela, où on l’on a envie de se prendre pour un grand philosophe!
    Une dégustation dont on ressort en tout cas ébahi et heureux, pour avoir touché à l‘indicible! Avec la même extase que celle de l’alpiniste qui contemple la vallée depuis le sommet.

    Olif, escaladeur de grands sommets bourguignons!




  • Grand vin du Marquis de Léoville, l'Intégrille!


    Date: le 26/04/2004 à 23:45

    Ou presque! Pas exactement une intégrale, mais pourtant, c'était un véritable marathon auquel nous étions conviés à l'Oenothèque de Leytron, à l'initiative d'une poignée de Passionnés du Vin.com, qui ne se rendaient pas compte de l'ampleur de la tâche.
    Initiée en janvier 2003, cette dégustation orgiaque aura mis 13 mois à se concrétiser, même pas la durée de gestation d'une éléphante!

    Retour sur la genèse de l'événement:

    16 janvier 2003, 7 heures 48. Un Valaisan bordeauphile lance l'idée d'une petite verticale de Léoville Las Cases avec 8 millésimes présents dans sa cave. 3 de ses compatriotes surenchérissent dans la foulée, apportant 9 millésimes supplémentaires.

    7 novembre 2003, 14 heures 27. Le projet, jusque-là en sommeil, refait surface. La vitesse supérieure est enclenchée, mais le moteur tourne encore au ralenti. Un autre Helvète se joint au groupe.

    10 décembre 2003, 9 heures 43. Notre Valaisan, trépignant d'impatience, fait jouer de l'accélérateur. Le moteur commence à monter en régime. Un Parisien spécialiste des vieux millésimes se joint au groupe et à partir de là , tout s'emballe. Dans les jours qui suivent, 5 millésimes se rajoutent aux autres pour porter le total à 17 le 15 décembre 2003. Un Jurassien pas encore totalement bordeauphobe fait acte de candidature pendant qu'un autre vieux millésime fait son apparition.

    20 décembre 2003, 18 heures 54. La date du samedi 24 avril est arrêtée. La dégustation se déroulera en Valais, à l'origine du projet, dans les locaux de l'Oenothèque de Leytron.

    6 janvier 2004, 17 heures 23. La dégustation prend encore plus fière allure par l'apport de 3 millésimes anciens d'anthologie et encore 3 autres qui viennent compléter la série. A la date du 13 janvier, nous en sommes à 24 millésimes différents, allant de 1934 à 2000.

    5 avril 2004, 9 heures 18. 10 autres bouteilles sont venues s'ajouter à la longue liste ce qui nous porte à 32 millésimes, dont un 47 en double exemplaire, mise négoce et mise Château.

    9 avril 2004, 11 heures 34. Visiblement insatisfaits du nombre de bouteilles, nos amis Helvètes décident d'introduire Léoville-Barton 2000 en pirate pour un face à face avec son homologue.

    Dites 33, Monsieur le Marquis! En fait, le compte n'est pas tout à fait bon: 32 millésimes seulement, 33 bouteilles, 1 magnum, 1 intrus, 9 heures de dégustation quasi non-stop! Et ce n'est pas tout! Le lendemain, 5 tubes de dentifrice (celui pour rendre les dents blanches!), 5 boîtes d'Alka-Seltzer, 25 sachets de Bicarbonate de soude! Cette folle journée restera dans les Annales comme celle de tous les records!

    17 avril 2004. Toutes les bouteilles sont arrivées saines et sauves à l'Oenothèque de Leytron, dissimulées dans des paquets jaunes de la Poste Helvétique ou dans le coffre de voitures frontalières. Elles ont une semaine pour se remettre du décalage horaire et se présenter sous leur meilleur jour.

    C'est parti!

    Samedi 24 avril 2004, 12heures 30. Les premiers participants commencent à arriver à l'Oenothèque de Leytron. Les visages sont souriants et détendus, une manière conviviale d'évacuer le stress et la pression. La fébrilité commence à poindre lors de l'installation des bouteilles pour la photo.

    - Mets plutôt celle-là  ici!
    - En ligne droite ou en arc de cercle?
    - Et le magnum, il est mieux où? Devant ou derrière?
    - T'aurais pas vu la 48?
    - Elle est cachée par la 59!

    Crépitements des flashes, aucun doute, ce sont des stars! Les bouteilles, pas nous! Et poseuses en plus!


    Samedi 24 avril 2004, 13heures 30. Les photos à peine terminées, c'est l'heure d'entamer le débouchage et le carafage de certains exemplaires. Tous les sommeliers présents sont recrutés pour cette tâche, ce qui a finalement occasionné beaucoup de boulot à notre ami Fabien. Enfin, ça y'est! Toutes les bouteilles sont ouvertes, tous les dégustateurs sont là , ouvrez le ban, sonnez trompettes, ça va commencer!

    Participent à cette séance, Paski55, Claudius, Yves Zermatten, Alain Winemega, JérômeM, Fabien, Dominique Fornage, un dégustateur Valaisan confirmé et réputé, ainsi qu'un autre Valaisan, ami de longue date de Paski, qui préfèrera sans doute garder l‘anonymat, puisque j'ai complètement oublié son nomgrinning smiley, et votre serviteur, Olif. Xavier « Oeno.ch » qui met les locaux à notre disposition, ne peut malheureusement se joindre à nous, car réquisitionné par l'Armée Suisse à l'occasion de la célèbre Patrouille des glaciers, mais il réussit tout de même à déserter 5 minutes pour nous faire une petite visite-éclair.

    Samedi 24 avril 2004, 12heures 40.Création officielle du Las Cases'Group from Leytron.

    Après moult hésitations, les vins sont finalement servis par séries, dans l'ordre initialement prévu, ou presque, séries qui seront pour certaines fractionnées de manière à ne pas avoir trop de verres simultanément.

    Première série: celle des petits!

    1977: robe grenat encore brillante, légèrement tuilée, nez assez fin, empyreumatique, qui s'étiole assez rapidement. La bouche est un peu mince et manque de consistance.

    1987: robe grenat homogène, premier nez pas tout à fait net (champignon moisi?) qui laisse place à des notes « entre deux », pas complètement tertiaires, de cigare et de prune. Attaque franche, mais vin de demi-corps, manquant de longueur. Probablement passé.

    1991: robe grenat sombre, nez relativement peu expressif, légèrement moka. Plus corpulent que le précédent, je lui trouve une relativement belle concentration pour le millésime, mais tout est relatif! Pour Dominique Fornage, on sent les progrès réalisés en vinification malgré une matière initiale relativement pauvre.

    1992: robe tuilant légèrement, nez marqué par des faux-goûts (pansement, iode, vieux champignon). Demi-corps, longueur correcte, finale acide. Maigrelet!

    1993: robe d' un encore bel éclat. Nez évolué qui libère progressivement des notes empyreumatiques agréables, plutôt moka. En bouche, je lui trouve pourtant des tanins sévères et austères. Plus de matière et mieux structuré que les précédents mais pour moi un millésime sans charme.

    1997: robe juvénile, mais nez finement torréfié, sur le moka, l'arabica. La bouche est séduisante et fondue, équilibrée, même s'il semble surtout tenir grâce à son bois. Un 97 charmeur, séduisant, assez typique de son millésime, et bien évidemment très controversé. A prendre pour ce qu'il est, un vin de plaisir, sans côté racoleur à mon avis.

    Deuxième série: celle des intermédiaires!

    1979: robe grenat évoluée, arômes tertiaires empyreumatiques, légèrement cacaotés, structure encore vive et fraîche, finale un peu courte, mais c'est un vin d'une compagnie très agréable. Plutôt une bonne surprise, même s'il ne faut pas l'attendre indéfiniment.

    1978: robe brillante, ne faisant pas son âge. Nez un peu sur la réserve, très élégant, se révélant par petites touches encore fruitées (prune). Bouche ample, ronde, harmonieuse, étonnamment concentrée. Une très belle bouteille encore loin du déclin.

    1983: robe grenat soutenu, nez intense, sur la réduction (écurie), s'harmonisant à l'agitation. Bouche ample et ronde, bien structurée, finissant sur des tanins un peu amers. Tout à fait correct sans que l'on puisse conclure à un grand vin.

    1994: robe sombre, nez sur la réserve, mais la bouche est vive et fraîche, sans verdeur, bien construite, avec une longue finale. Beau vin, encore très jeune, un des meilleurs 94 que j'aie bu.

    1999: s'il me fallait qualifier un vin de putassier et grossier, ce serait celui-là ! Le nez est très boisé, toasté. La matière est crémeuse, mais avec impression de dilution ou d'assèchement en milieu de bouche. La rétro se fait sur les tanins du bois. Je n'aime guère!

    Troisième série: celle des vénérables anciens!


    1934: l'ancêtre! Robe tuilée mais encore soutenue. Le nez est un peu éteint. En bouche, on retrouve pourtant de la vivacité, sur des notes de prune et de cacao. Respect pour l'aïeul, de l'âge du beau-père de Fabien!

    1947, mise négoce (Cruse): fin septembre, au petit matin, en plein sous-bois à la saison des champignons. Bolet? Tricholome? Non, finalement, liège! Et dire que le bouchon était venu en entier!

    1947, mise Château: robe tuilée mais sombre, nez concentré, puissant, un peu empyreumatique. Un peu d'austérité, une acidité encore marquée, beaucoup de tonus en fait, le rendant très agréable à boire, malgré un durcissement rapide à l'air. Loin d'être passé, une bouteille à consommer rapidement après ouverture.

    1948: poussière de cacao au nez, mais une fraîcheur réjouissante. La matière est somptueuse, les tanins, quoique légèrement poussiéreux, sont très civilisés et délivrent de belles notes empyreumatiques de chocolat. Longue finale toujours vive. Quelle jeunesse! Un superbe vin!

    Quatrième série: celle des robes sombres et denses!

    1985: carafé en dernière minute, le nez s'ouvre peu à peu et le vin se révèle par petites touches. Bien fondu, à maturité, c'est une bouteille très agréable dans un registre plutôt élégant.

    1986: austère, avec des tanins sévères et séchards, il est soit complètement fermé, soit victime d'un problème de bouteille, pardon de magnum. Une déception!

    1988: nez encore fermé, légèrement brûlé, avec un petit côté végétal (poivron) mais bien mûr. Volume imposant, grosse structure et retour du fruit en finale.

    1989: nez fin et racé, et pourtant, grosse concentration, tanins un peu massifs, volume imposant, de la mâche en finale. Une bouteille superlative qui fait malgré tout preuve d'un bel équilibre, un grand vin en devenir.

    Cinquième série: celle des jeunots!

    1995: très fruité (fruits noirs), fine touche boisée, belle structure, plus en élégance qu'en puissance. Classique mais peu expansif.

    1998: nez torréfié, sur le cèdre. Gras et opulent, avec des tanins charnus, enveloppant bien la bouche. Trop facile? D'un style international? Peut-être, mais c'est bon et on sent quand même la race!

    1996: si le boisé est encore présent, le grain est très fin, les tanins sont serrés et la structure fraîche en bouche. Longueur exceptionnelle! Un monstre, à attendre longtemps!

    Sixième série: le match des 2000!

    Je n'étais pas favorable à cette petite digression mais finalement, je ne le regrette pas! Elle nous a fait mesurer combien inconsciemment, nous avions appréhendé le style Las Cases, puisque tout le monde (ou presque) a identifié les vins à l'aveugle.

    LLC 2000: fruits noirs, crème de fruits, liqueur de fruits! De l'alcool, donc, un peu, mais une texture un peu serrée, presque guindée, légèrement poussiéreuse. Un vin d'aristocrate, à boire le petit doigt en l'air!

    LB 2000: gras, riche et opulent, il libère un fruité explosif, sauvage, presque exubérant. Les tanins sont veloutés, d'un soyeux rare. Un côté bohème, débridé, baroque diront certains, qui le rend déjà diablement séducteur. Du fait d'une acidité élevée, il sera considéré comme le plus bourguignon dans l'esprit. Je fonds littéralement!

    Septième série: celle des «légendes»!

    1961, mise négoce (Nicolas): avec celui-là , la légende en a pris un coup! Robe tuilée, nez dérangeant, iodé, évoquant le varech à marée basse. Quelques notes tertiaires finissent par apparaître par vaguelettes successives. Décevant!

    1982: robe sombre, juste évoluée sur les bords. Très beau nez, chocolaté, fruité, puissance et concentration, une grande jeunesse du fait d'une belle acidité. J'aime beaucoup mais c'est un vin très controversé!

    1990: si la robe est belle, le nez est désagréable, marqué par des notes iodées et du bouchon. Un rendez-vous manqué!

    Samedi 24 avril 2004, 20 heures. Fin de la première manche, départ direction Uvrier, à l'Hôtel des Vignes, pour la dernière série qui sera servie en accompagnement du repas. Cela ne fera pas de mal de se remplir l'estomac avec des choses consistantes.

    Petit intermède avec un Johannisberg 1962 de Provins Valais, apporté par Dominique Fornage, une bouteille ayant défié le temps pour livrer une expression étonnamment originale et de toute beauté de ce cépage (le sylvaner) qui a trouvé en Valais une terre d'accueil exceptionnelle.

    Retour ensuite à nos Moutons, euh...à nos Marquis, pour un délicieux et (trop) copieux repas. Les dernières bouteilles furent les plus difficiles à apprécier à leur juste valeur par bon nombre d'entre nous arrivés à saturation. De pourtant bien grands millésimes qui méritèrent une séance de rattrapage le lendemain midi.

    Menu du Samedi 24 avril

    Foie gras au torchon servi sur un pain maison aux lardons
    Fines tranches de coquille d'agneau fumé accompagnées d'une salade de taboulé
    Melon de Cavaillon et jambon de Parme
    Salade asiatique aux ailerons de poulet

    ****

    Petit risotto aux morilles et aux pointes d'asperges

    ***

    Magret de canard au Chutney de mangue
    Pommes paillasson
    Bouquetière avec les légumes du moment

    ***

    Chariot de fromages

    ***

    Fraises marinées à  la Dôle et quenelle de glace vanille bourbon

    Huitième série: ceux du repas!

    1973: robe sombre, évoluée, presque couleur brique. Joli nez tertiaire cacaoté, évoquant les beaux grenaches. Bouche souple et fondue, très agréable. Un vin d'hédoniste!

    1971: évolué, il se caractérise par une petite note de verdeur et une acidité marquée, trop pour ce qui reste de matière.

    1970: souple et harmonieux, dans un registre superposable aux précédents, il se comporte bien mieux que dans mes souvenirs. L'acidité, également présente, est mieux équilibrée.

    1975:encore du fruit (petits fruits à noyaux), une structure droite, rectiligne, avec des tanins encore bien marqués et peut-être un peu d'austérité due au millésime. La matière est belle et la tenue à l'air remarquable (il n'aura pas bougé d'un iota le lendemain midi, il se sera même amplifié). Pour amateur encore patient!

    1966: nez tertiaire magnifique, cacao, pruneau, sous-bois. L'harmonie d'un beau Bordeaux à maturité. Une très belle bouteille que j'ai beaucoup appréciée malgré la lassitude qui commençait à s'installer.

    1955: encore beaucoup d'allant, de la rectitude presque, même s'il s'exprime moins agréablement que le 66. Il ne dépare pas dans cette ultime série, même si les papilles demandent bientôt grâce!

    1959: probablement un des sommets de la soirée et de la journée. Encore très sur le fruit (cerise) avec un petit côté noyau, il est très tonique, presque autant que son conscrit valaisan. Une grande bouteille dans un grand millésime!

    Dimanche 25 avril, 0 heure. Les valeureux rescapés de ce marathon décidèrent d'un commun accord de clôturer la soirée. Rude journée qui a vu un des favoris abandonner en cours d'épreuve, au début du 8ème round, pour raison médicale, et où un deuxième a été quasiment porté à bout de bras et de paupières pour arriver à franchir la ligne d'arrivée, terrassé à la fois par un hoquet opiniâtre et un sommeil du juste. Je me demande si pour la prochaine verticale, il ne faudra pas exiger un certificat médical au départ de l'épreuve.(aaa)
    A l'heure de se coucher, tout le monde arborait fièrement un sourire estampillé « Las Cases », les dents joliment colorées de tous les tanins de la journée. De quoi faire de beaux rêves au pied des montagnes valaisannes, toujours coiffées de leur blanc bonnet.

    Dimanche 25 avril, 0 heure 15.Dissolution officielle du Las Cases'Group from Leytron! C'est la fin d'une belle aventure qui se poursuivra néanmoins jusqu'à la fin d'après-midi, sur une terrasse surplombant la ville de Sion, de quoi réviser encore un peu!

    C'est fini!

    Si je devais résumer cette verticale en quelques mots, je dirais que le Grand vin du Marquis de Léoville est effectivement un grand vin, qui s'en tire cependant de façon irrégulière suivant les millésimes. Plus grand ou aussi grand que les plus grands, je ne sais, mais pour qui a eu le bonheur de tremper ses lèvres dans un 1947, un 1948, un 1959, un 1966, un 1978, un 1989, un 1996, un 1998, voire un 2000 (même si sur ce coup-là , Barton m'a plus impressionné!), cela ne fait aucun doute! Monsieur le Marquis est bien une légende bordelaise!

    Olif

     

  • La Superbe 2003, Domaine Mongeard-Mugneret: un Super Grand Ordinaire !

    Bourgogne Grand Ordinaire. BGO ! 3 initiales quasiment infamantes ! 250 ha de production, du Lyonnais jusqu’au Yonnais, une AOC régionale depuis 1937, dans laquelle le Gamay se taille la part du lion, en association avec le Pinot noir, voire le César ou le Tressot dans l’Yonne. Les blancs, quant à eux, peuvent comporter de l’Aligoté, du Chardonnay, du Pinot et, dans l’Yonne, du Sacy.

    Situé à Vosne-Romanée, le domaine Mongeard-Mugneret possède quelques-uns des plus beaux Premiers Crus et Grands Crus du secteur. Vincent Mongeard préside aux vinifications de ce beau domaine familial, privilégiant la finesse dans l’expression du terroir. Mais ce n’est pas parce qu’on fait de beaux Echezeaux et Grands Echezeaux qu’on doit négliger la production de base ! Deux cuvées de ce genre existent ici, un Bourgogne Passetoutgrains, dénommé le Libertin, et un Bourgogne Grand Ordinaire comme on aimerait en boire plus souvent, La Superbe, qui porte plutôt bien son nom

     

    Gamay et Pinot Noir, dans des proportions 75 /25, voilà la recette de ce Grand Ordinaire à la robe plutôt soutenue, colorée, aguichante. Le premier nez, d’abord assez végétal, mais dans le bon sens du terme, du végétal croquant, sans verdeur, procurant une sensation de rafle mûre (même si paradoxalement la vendange est égrappée en totalité), évolue par la suite sur de jolies notes fruitées ! La bouche est bien charnue, gouleyante, fruitée, légèrement réglissée, croquante, craquante, avec ses petits tanins soyeux et un volume plus que satisfaisant.

     

    lasuperbe

     

     

    Un petit vin plaisir, franc, fruité, qui ne se prend pas au sérieux, bien loin de la sacro-sainte hiérarchisation des terroirs bourguignons. A petit prix, autour de 7 € prix caviste, même si d’aucuns pourront déjà trouver cela cher pour de l’Ordinaire, aussi grand soit-il!

    En tout cas, une voie alternative à suivre en Bourgogne, à développer même, pour booster l’entrée de gamme et être concurrentiel face aux autres régions dans cette échelle de prix. Mais surtout, comme ici, faire preuve de fantaisie, se débrider un peu, oser, innover, et, peut-être aussi, changer le nom de l’appellation, trop péjoratif, quitte à revenir en Vin de Pays.

    Plus personne ne roule à l’ordinaire, maintenant, non ?

     

     

    Olif

     

     

     

  • Cigales, cyprès et garrigues, côté Jardins!

    Date: le 26/06/2005 à 11:47

    Portes ouvertes aux Jardins de Saint-Vincent, chez Stéphane « Saint-Vernier » Planche, en ce jeudi 16 juin 2005! Porte ouverte sur la rue de la Liberté, en plein cœur d’Arbois, car la chaleur estivale est au rendez-vous, ce qui a pour effet de laisser remonter du Grand Sud des senteurs de garrigue et de cyprès, sur fond de chant de cigales, grâce aux vins de la nouvelle génération de « furieux » du Sud de la France. Des nouveaux vignerons, mais aussi des plus anciens, aux noms plus connus, tous produisant des vins dans un esprit de total respect de la nature et de l’environnement.

    Une porte ouverte mais d’accès limité, selon le principe qui prévaut ici, 20 personnes, 20 heures, 20 €! Même si le maître de céans verrait d'un bon oeil une soirée à 50 personnes, 50 heures et 50 € ! Mais bon, 50 heures, ça nous mènerait un peu tard dans la nuit!

    Nous saluerons la participation "en coulisses" de Madame Brignot, qui est venu apporter une petite touche féminine callygraphique au tableau noir de l'entrée. Les filles, ça écrit quand même mieux que les garçons, d'une manière générale!




    Ce soir-là, quelques "furieux" du Jura se trouvant dans l'assistance, il y avait pas mal de choses à goûter, alors on attaque tout de suite!


    -Domaine du Grand Jacquet, L'amelier 2004, VDP du Vaucluse 
    Robe couleur Malabar. Nez très amylique, chewing gum, bonbon anglais. De la fraîcheur, avec un petit côté perlant. Rigolo!

    -La Begou, vin de table, Maxime Magnon
    Carafé longuement car fermé à l'ouverture(!), et présentant des notes de réduction qui se sont estompées au moment de la dégustation, car le nez est net, assez pur. La texture est lisse et large, riche et puissante, avec une sensation chaleureuse, et en même temps une grande douceur (6 à 7 g de SR).

    -Blanc 2003, Didier Barral
    80% Terret blanc, 20 % Viognier. Robe jaune, à peine trouble. Nez puissant, alcooleux, complexe, gras et riche en bouche, mais non dépourvu de minéralité, il est aussi un peu oxydatif en même temps. Longue finale qui n'en finit pas de revenir. Un équilibre costaud, où l'alcool se perçoit sans être totalement dominant. Une expérience gustative qui a ses adeptes, particulièrement intense en 2003. Je crois que 2004 sera un peu plus «raisonnable»!

    -Vin de Table Ribeyrenc 2004, Thierry Navarre
    Un cépage oublié du Languedoc, l'Aspiran, ou Ribeyrenc, remis au goût du jour par Thierry Navarre, qui est un des derniers à en posséder. La robe est rubis très clair, presque groseille. A peine animal, foxé au premier nez, il délivre par la suite un bien joli fruité, avec un toucher de bouche très soyeux derrière une attaque franche, minérale, presque métallique. La finale est acidulée et fraîche, un peu abrupte, mais revenant bien sur le raisin. Un vin carré et original!

    -Rose rouge 2002, Domaine de Peyre Rose
    La robe est rubis, à reflets carmin, plutôt soutenue pour un vin rosé. Un soupçon de réduction transitoire laisse la place à des notes de fraise écrasée, de griottes, de petits fruits à noyaux. Bien charpenté, avec beaucoup d'allonge. Un grand séducteur en phase fruité flamboyante!

    -Corbières La Démarrante 2004, Maxime Magnon
    60% Carignan, 40% Cinsault. Robe burlat soutenu. Nez très fruit, un peu chocolat et torréfaction, mature et frais, gourmand, avec des tanins qui accrochent, et probablement un peu de volatile. Pour démarrer la gamme de Maxime Magnon, dans la bonne humeur!

    -La Luna 2004, Vin de table, Bruno Duchêne
    Un micro-domaine situé à Collioure, travaillant très proche de la nature. Cette cuvée La Luna, élaborée avec 100% de Grenache, s'offre sous une robe plutôt colorée. Le nez est puissant, chaleureux, alcooleux, mais également un peu végétal. La bouche est concentrée, à la rusticité tannique loin d'être désagréable. Finale légèrement piquante, marquée par une pointe de volatile.

    -La Rozetta 2004, Maxime Magnon
    Une cuvée 100% Carignan à la robe colorée et brillante. Le premier nez est un peu animal, fourrure, puis évolue sur la poudre de cacao. La bouche, soyeuse en attaque, part un peu dans tous les sens, avec une acidité marquée en finale, manquant encore un peu de liant. La fraîcheur qui se dégage permet d'entrevoir l'avenir radieusement, une fois que tous les éléments se seront mis en place.

    -Domaine Roche Buissière 2003, Vin de Pays des Coteaux des Baronnies
    La robe est très colorée. Légèrement réduit à l’ouverture, le nez imprègne ensuite de son fruité épicé, légèrement animal, croquant et frais. Simple et franc!

    -Sauvage de Kokopeli 2003, Bruno Duchêne
    Retour vers les blancs, même si la robe est encore à peine trouble. Le nez est intense et complexe, sur la mirabelle, la pomme, le miel, laissant présager d’une grande douceur en bouche. Que nenni! La bouche est sèche, stricte, droite et longue. Un style surmaturé sec, toujours aussi déroutant, plutôt réussi! Grenache gris et blanc + macabeu, élevé sous voile pendant 2 ans!

    -Mas Valensole, grenache passerillé élevé sous voile

    Encore un truc décapant, signé Le Seb, produit dans un coin perdu du Gard. Robe acajou clair, superbe nez très fin, dans un registre fruits secs, café, moka. Bouche douce, caressante, évoluant par petites touches successives révélant l’alcool présent dans le vin, sans pour autant apporter de la lourdeur.

    -Vin de Paille 2003, Domaine de la Tournelle
    Invité surprise de dernière minute, on ne pouvait refuser un petit verre de Paille apporté par Pascal Clairet. Il s’agit d’une cuvée ouillée, celle déjà goûtée sur fût au domaine en juin 2003. Un équilibre inhabituel pour un Paille, privilégiant la fraîcheur, malgré la grande richesse constitutionnelle du millésime (raisins cueillis début août, pressés début octobre!).

    Place au mâchon, concocté par un autre traiteur arboisien, Maître Jean-Claude profitant d’un repos bien mérité. L’occasion de déboucher quelques flacons de vins de soif, et de profiter de quelques bonus apportés par Jean-Marc Brignot, de passage dans la rue et qui ne s’est pas fait beaucoup prier pour se joindre à nous, n’hésitant pas à aller chercher quelques flacons de sa production chez lui, dont un fort joli Trousseau 2004, cuvée du Puceau, le vin qu’il ne fera qu’une seule fois dans sa vie, puisque le voilà maintenant dépucelé du Trousseau!
    Et, lors d’un petit « after » avec les moins pressés des participants, son Foudre d’escampette, pétillant naturel à base de chardonnay, derrière lequel il n’était pas possible de boire autre chose, si ce n’est un Brut de Selosse. Plus, cela aurait été trop, et notre sobre chauffeur nous a enjoints à monter dans sa carriole, direction le Haut-Doubs.

    La Der de l’année scolaire, qui s’est terminée en beauté, vivement la rentrée prochaine!

    Olif

  • Le Jaja des pas Beaux-Beaux!

    Dimanche 19 juin 2005. C’est l’été, ou presque! La fête de la Musique n’a pas encore chanté, le coucou si, ce qui dans le Haut-Doubs signifie la fin de l’hiver.

    Une foule, très clairsemée et peu prévoyante, se disperse dans les allées du Casino local, pas pour jouer, mais pour compléter à la dernière minute les achats en vue du barbecue dominical. Les rangs se resserrent à l’approche de l’unique caissière réquisitionnée. La file d’attente s’allonge. Le temps de jeter un regard amusé sur la clientèle de l’endroit. Prendre un peu de distance pour un semblant d’étude sociologique. Observer le panier de la ménagère et la clientèle du dimanche matin.

    Ce gars-là m’attire franchement l’œil, par son look détonnant, et aussi parce qu’il stationne devant le rayon Vins du magasin. Un rayon qui ne susciterait guère l’intérêt du Passionné.com, mais à l’évidence, ce quidam ne doit pas surfer bien souvent!

    Torse nu, une chemise à carreaux en grosse laine jetée sur les épaules, un pantacourt élimé, dévoilant des mollets fusiformes, et des chaussettes noircies qui retombent sur des mocassins usés jusqu’à la corde, voilà pour l‘aspect extérieur. Le visage buriné et anguleux, souligné par une fine barbichette, le cuir tanné par de longues heures passées en plein air sous le soleil, et les mains calleuses, aux replis légèrement crasseux, évoquent le bourlingueur vivant d’expédients au jour le jour, plutôt que le simple clodo.
    Les yeux fichés sur les étiquettes, il épluche, inspecte, tâte, soupèse, ausculte. Empoigne une bouteille, la repose, se tourne vers une autre, à la forme inhabituelle, rectangulaire, revient vers la précédente, se concentre, fronce le sourcil, se livrant probablement à un petit calcul intérieur, et finit par la retenir, chargeant deux exemplaires dans son panier rouge.

    Chante Clarette rosé, mis en bouteilles aux Chais Baucairois! En bouteille, mais plastique, du cul au goulot, bouchon à vis, évidemment, à la manière d’une bouteille de Coca Cola. Pourquoi celle-ci, et pas le Rosé d’Espagne en Tétrabrik? Ou encore le Fines grappes Rosé, toujours vendu dans du plastique? Une histoire de packaging? De prix? 1 ou 2 centimes d’€, ça peut avoir son importance, sur un vin à moins de 2 €! Qui pourra nous le dire? Il y aurait peut-être matière à une étude de marché!

    Et dire qu’il y en a ici qui hésitent entre Montrose, Calon Ségur et Cos d’Estournel, au moment de faire leurs courses!

    Olif

  • Petite anthologie des cépages jurassiens

    24/08/2004 19:07             


     

    Le Jura est un très ancien vignoble constitué d’une mosaïque de cépages ; certains sont universels, comme le Chardonnay ou le Pinot noir, d’autres très ancrés dans une tradition locale, parfois uniquement retrouvés dans la région, comme le Savagnin, le Trousseau ou le Ploussard. Petit passage en revue des forces en présence, histoire de mieux cerner les différents aspects de ces merveilleux breuvages que l’on produit dans le Jura !

    Le Trousseau, roi de Montigny!
                       


    Ce cépage rouge, à l’origine des plus grands vins d’Arbois de la même couleur, mérite une plus ample connaissance et une meilleure reconnaissance. Son origine est ancestrale ; on en retrouve la trace depuis 1731 en Franche-Comté, mais il existait probablement antérieurement, peut-être importé dans le Jura par des immigrants savoyards ou valaisans entre 1650 et 1700.


    Le  Troussot figure en cinquième position de la liste des bons cépages établie par le parlement de Besançon en 1732. Il était cultivé un peu partout dans la région où il prenait des noms locaux tel que Trousseau à Montigny et Arbois, Triffaut à Besançon,  Trusseau ou Trussiau encore ailleurs. Ah ! ce patois local ! On le trouve même jusqu’en Argentine sous le nom de Pinot gris du Rio Negro !

    Son nom viendrait du mot ancien « Toursel», qui signifie « paquet», et c’est l’aspect troussé de son raisin et de son cep qui en serait à l’origine, et non pas le vin rouge de garde réservé au financement du trousseau des filles, comme les vieux vignerons se plaisent à le raconter, l’œil brillant !

    Il produit un vin rouge de qualité et de bonne garde, à la robe pourpre et aux saveurs riches, souvent un peu confiturées. Son terroir de prédilection : les sols calcaires de Montigny-les Arsures, autoproclamée à juste titre capitale du Trousseau. Sur les 80 hectares plantés dans le Jura, on en trouve plus de 52 ha en Arbois, dont la moitié à Montigny, seul vignoble qui voit s’accroître la proportion de ce cépage.

    Le Ploussard, l’âme de Pupillin
                 


    Il s’agit de l’un des trois cépages rouges qui donne droit à l’appellation Arbois ou Côtes du Jura, même si on le retrouve souvent étiqueté «Rosé». Raisin noir à jus blanc, de débourrement précoce, il concurrence le savagnin sur ses terres de prédilection, les marnes bleues et rouges du Lias et occupe à lui seul une surface de 300 hectares, soit la moitié de la superficie plantée en rouge dans le Jura.


    Son nom, véritable sujet de controverse, s’écrit et se prononce de façon différente selon qu’on se situe à un endroit ou un autre du département. Et pour ne pas froisser la susceptibilité des vignerons locaux, mieux vaut utiliser le bon nom au bon endroit ! Etymologiquement, le Ploussard tire son nom de la prunelle, dont les grains ont la même couleur, parfois la même forme, et qui se prononçait de façon très différente en patois local selon que l’on habitait à Salins (pleusse ou plesse), Arbois (plusse) ou Poligny (plousse ou pelosse) !
    Le  Poulsard, quant à lui, dériverait du latin "pulsare", pousser violemment, probablement parce que les raisins poussent très vite, mais certains penchent pour une coquille faite par un auteur breton, dans un ouvrage relatant son «Voyage dans le Jura» en 1801.

    Vraisemblablement cultivé dans nos contrées depuis le XIVème siècle (i l s’agissait alors de Polozard!), on est en droit de penser qu’il est originaire de la région ; il fut inscrit dans la liste des bons cépages publiée en 1732 par le Parlement de Besançon et son identité est fortement jurassienne, même si l’on en retrouve un peu dans le Bugey sous le nom de Mescle («Meiklle» en patois, ce qui signifie mélange, car il s’agit ici d’un Poulsard gris, intermédiaire entre le blanc et le rouge, à moins que le nom ne provienne du latin mespilum, la nèfle !). Le Jura, décidément, terre d’une bataille étymologique et vocabularienne !

    C’est pourtant le terme de  Poulsard qui sera retenu en première place dans les décrets d’AOC, au grand dam des habitants de Pupillin, consacrée Capitale mondiale du Ploussard en 1990, car c’est ici que ce raisin s’épanouit le mieux. Pupillin, qui est le seul village pour l’instant à avoir le droit d’accoler son nom à celui de l’appellation Arbois.

    «A Arbois le nom, à Pupillin le bon !», dicton traduisant bien la reconnaissance d’un terroir spécifique à Pupillin, mais pas forcément très apprécié du côté d’Arbois ou de Montigny !

    Généralement peu colorés du fait d’une peau de raisin très pauvre en anthocyanes, les vins de Ploussard prennent en vieillissant une teinte pelure d’oignon qui les a longtemps apparentés à un vin rosé alors qu’il s’agit bel et bien d’un rouge à la robe très claire. Ce sont des vins fruités, frais et gouleyants, néanmoins aptes à une belle garde, très à l’aise sur les charcuteries régionales.

    Pour conclure, je laisserai volontiers la parole à Lucien «Bacchus» Aviet, vigneron d’une infinie sagesse, apte à réconcilier tout le monde :

    « Ploussard ou Poulsard, l’important, c’est d’en boire ! »


    Le Savagnin, emblème de Château Chalon !
                       


    «  Ouaiche grand ! Ça va bien ? Savagnin ! »


    Difficile de ne pas commencer ce chapitre par l’intro du Rap Comtois*, le nouvel hymne des Francs-Comtois branchés, composé par Aldebert et la Madeleine Proust, alias Laurence Semonin, la mémoire humoristique du parler comtois, en VHS, en DVD et en tournée dans toute la France.**

    Le  Savagnin, ou  Traminer, présent de longue date dans le Jura, aurait été importé d’Allemagne lorsque la Comté était Germanique. Le Traminer tire son nom du village italien de Tramin mais les ampélographes discutent encore pour savoir s’il y est né ou bien s’il y a seulement été cultivé !

    Pratiquement rencontré exclusivement en Franche-Comté, en ce qui concerne l’hexagone, on le retrouve sous le vocable de Sauvignin à Besançon en 1732 (dans la fameuse liste des bons cépages du Parlement),  Sauvanon à Arbois et  Sauvoignon à Salins en 1774. Son nom évoluera dans le temps en fonction des prononciations locales, pour devenir Sauvignin, Savignon naturé ou encore Savignien en 1880. Le terme de  Naturel (ou encore Naturé) fut également utilisé au XVIIIème siècle et c’est d’ailleurs sous le nom de Naturé que Frédéric Lornet commercialise sa cuvée de Savagnin ouillé.

    Savagnin et Vin Jaune ! Une histoire pieuse dans laquelle les chanoinesses de Château Chalon ont très certainement joué un grand rôle ! Est-ce par l’intermédiaire de l’une d’elle, née en Andalousie sur les bords du Guadalete, au pays du Jerez, ou bien d’une autre, née en Albigeois, sur les bords du Gaillac, au pays du Perez***, ou encore d’une troisième, originaire de Hongrie et complètement toquée, que la recette du vin de voile est arrivée jusque dans nos contrées? Le mystère demeure et le voile s’épaissit !
    La forte souche du  Savagnin se plaît sur les marnes bleues du Lias, saupoudrées en surface de petits éléments siliceux et calcaires. Son rendement est de 30 à 45 hl/ha. Ce cépage résiste plutôt bien aux premiers frimas de l’hiver et on avait l’habitude ancestrale de le récolter assez tardivement, aux premières gelées ou aux premières neiges, qui survenaient souvent dès la fin octobre à l’époque.
    Ce cépage jurassien à forte personnalité n’a donc pas fini de révéler tous ses secrets, qu’on le consomme non ouillé en blanc, non ouillé en jaune, ouillé, surmaturé, que sais-je encore ?

    A titre d’exemple, la nouvelle cuvée «Solstice» de Pascal Clairet du domaine de la  Tournelle, en Arbois,  Savagnin récolté en surmaturité, apparaît dans le millésime 2001 comme un vin très riche et aromatique au nez, presque exubérant, alors que la bouche se révèle sèche, longue, bien structurée mais stricte. Une nouvelle facette de ce cépage passionnant!



    * « Le 2-5 », rap comtois, d’Aldebert et Laurence Semonin,
    ** « La Madeleine Proust fait le Tour du Monde », spectacle en tournée dans toute la France.
    *** Prénom Jérôme, chantre des vins du Sud en général, et de Gaillac en particulier, sur LPV, le site des passionnés de vin et de single malt. Gaillac où on élabore également de façon ancestrale un vin de voile avec du Mauzac, le cépage local.

    Le Chardonnay, le cépage du renouveau jurassien?
                   


    Présent dans le Jura depuis le XIVème siècle, il n’a fait que naturellement traverser la plaine de Saône pour trouver un terrain propice sur les contreforts du Revermont. La concurrence y était peut-être moins rude qu’en Bourgogne!


    En terme de surface, il représente actuellement environ la moitié du vignoble jurassien. Son nom lui viendrait d’une petite commune du Mâconnais où il proliférait abondamment. Pour se démarquer, les Jurassiens l’appelaient différemment selon son aire de production: il fut Gamay blanc à Lons le Saunier et L’Etoile,  RoussetteMoulan, et  Melan à Poligny,  Melon à Arbois,  Salins et Dole,  Luisant à Besançon,  Pineau blanc en Haute-Saône.
    Beaucoup de ses patronymes ne jouèrent guère en sa faveur! De là à penser que les Arboisiens avaient attrapé le melon ! Ce terme viendrait pourtant du latin mel, mellis, le miel, que ses arômes évoquaient alors!


    Reconnu comme cépage à arracher en 1732 dans la fameuse liste du Parlement de Besançon (si c’est pas misère!), il fut repêché par une ordonnance de 1774. Heureusement que certains en avaient gardé sous le manteau ! Surnommé «le vin blanc bâtard» par les gens d’Arbois, on considérait qu’il rendait le vin blanc "passable" lorsqu’il était assemblé au Savagnin ! J’en connais quelques-uns qui devraient s’étrangler en lisant cela!

    Ce mal-aimé du XVème siècle prend sa revanche avec éclat actuellement, permettant au Jura de s’étalonner sur les autres régions de production, notamment la Bourgogne si proche, qui n’en finit pas de faire de l’ombre malgré le différentiel d’altitude négatif!
    De débourrement précoce, il n’est pas difficile à implanter, même en région semi-montagneuse, mais il se révèle pleinement sur les coteaux argilo-calcaires d’Arbois et du sud Revermont. La Mailloche, les Bruyères, Curon, la Bardette et les Grands Teppes, entre autres, démontrent de façon éclatante tout le potentiel de ce cépage sur ses terroirs de prédilection, lorsqu’il est travaillé par des vignerons talentueux, qui cherchent à le révéler et à exprimer sa capacité à rivaliser en finesse avec les meilleurs, y compris ceux de la Bourgogne voisine.

    Le Pinot Noir, un Bourguignon dans le Jura!
                   


    Apparemment présent dans le Jura depuis la fin du XIVème siècle, sous le nom ambigu de Savagnin noir, il vient tout comme le Chardonnay de la Bourgogne voisine.


    Surnommé  Maurillon en raison de sa couleur noire, on ne sait s‘il faut l‘appeler  Pinot (du latin «pinus», le pin), ou Pineau (du grec « pinein »,  boire).

    Si le vocable  Pineau est très typé Charente, on le trouvait pourtant en Haute-Saône, tandis qu’à Salins,  Arbois ou Poligny, on préférait Petit Noirin, ceci afin de ne pas le confondre avec le Gros Noirin , pourtant complètement différent! Besançon penchait pour Noirum mais dans le sud Revermont, on le qualifiait de Savagnin noir pour profiter de l’analogie avec la star des cépages jurassiens.

    Classé en deuxième position sur la liste des bons cépages en 1732, juste derrière le Poulsard , mais très critiqué du fait de sa maturité précoce, on le considère comme « peu recommandable » au XIXème siècle et certains vont même jusqu’à préconiser l’arrachage de ce «raisin des mouches», surnom qui avait le mérite d‘être très évocateur! Le record de précocité vient tout juste d’être battu en cette caniculaire année 2003 où le ban des vendanges a dû être donné le 19 août pour récolter les raisins de Pinot noir qui commençaient à se transformer en confiture !
    Ce qu’on lui reprochait, en fait, c’était de ne pas produire des vins aussi bons qu’en Bourgogne lorsqu’il était vinifié seul! Sous l’égide du Dr Guyot, plusieurs expériences furent faites afin de rivaliser avec le modèle bourguignon, sans grand succès alors. Mais les Jurassiens, en bons Francs-Comtois à la tête de bois, persévèrent encore jusqu’à nos jours et finissent enfin par en tirer quelque chose, de ce fichu cépage! Il n'y a qu'à goûter les cuvées de Pinot noir de Jean-François Ganevat, par exemple, pour s'en convaincre!

    Il représente actuellement environ 10% du vignoble en rouge et on l’utilise fréquemment en assemblage avec les autres cépages jurassiens pour produire des rouges colorés et charpentés.


    Foirard, Pourrisseux, Gueuche et autres cépages ancestraux !
                       


    Beaucoup d’autres cépages furent cultivés dans le Jura, avec plus ou moins de bonheur. Certains ont totalement disparu en raison de leur fragilité, de leurs défauts, de leur manque de qualité, que sais-je encore ?! De véritables dinosaures dont les noms à eux seuls sont un poème et méritent un petit coup de projecteur; il n’est pas exclu que certains d’entre eux fassent un jour leur réapparition dans un assemblage purement jurassien, pour ne pas dire jurassique !


    - Le Foirard blanc, ou Gueuche, était à l’origine d’un vin vert et acide, estimé pourtant des moissonneurs qui appréciaient son côté rafraîchissant. Je n’ose envisager les origines exactes de son nom! Il ne faisait peut-être pas toujours bon se rouler dans la paille à cette époque!

    - Le Chasselas, importé de Suisse Romande, a préféré retourner chez lui aussi discrètement qu‘il était arrivé!

    - Le Pourrisseux ou Peurion, assez spécifique du Jura, donnait plutôt un bon vin blanc mais sa grande fragilité, comme son nom le laisse supposer, a eu raison de son implantation locale.

    - Le Gueuche Noir  ou Gouais ou Foirard noir, pendant en rouge du premier cité, donnait des vins «plats, acides et de mauvaise constitution » . Les mauvaises langues aimeraient pouvoir prétendre qu’on en trouve encore dans le Jura, mais ceci n’est qu’une légende !

    - L’Enfariné, fréquemment recouvert d’une pellicule blanchâtre, d’où son nom, fut candidat à l’arrachage en 1731. D’après un dénommé Chevalier, il est aussi «désagréable que le nom est déplaisant; son vin léger est acerbe et peu coloré». Il eût pourtant pu être apprécié en assemblage dans un millésime comme 2003 pour corriger naturellement l’acidité qui faisait défaut aux vins!

    - L’Argant, classé dans les meilleurs plants en 1774, connut son heure de gloire au XIXème siècle en raison de sa bonne résistance au mildiou.

    - On peut encore citer le  Gamay noir, le Petit Beclan, le Valais noir et le Gros Béclan, autant de cépages qui ne sont pas passés à la postérité jurassienne.

    Qui a osé dire que le Jura manquait de variété(s) ?





    Olif



    Références bibliographiques :

    « Vins, vignes et vignobles du Jura », de la famille Brisis, éditions Cêtre.
    « Poulsard ou Ploussard » de Françoise Danrigal

     

  • Olifix chez les Bretons

    Date: le 15/07/2004 à 08:38

    « Sea, cidre et chouchen »

    En 2004 pendant JCF, toute la Gaule produit du vin. Toute ? Non, une région résiste encore et toujours au lobby viticole, lui préférant la saveur du cidre et du chouchen.
    Balayée par les embruns, la Fin des Terres n'est pourtant pas une lande aride. On y trouve à profusion du chou-fleur, de l'artichaut, de l'échalote et de la pomme de terre. Sans parler des produits de la mer qui ne sont jamais meilleurs que consommés sur place, au naturel. Ordralfabétix, c'est du passé, le poisson breton n'arrive plus de Lutèce par char à boeufs ! On le pêche sur place !
    Mais du vin, que nenni ! C'est finalement pour le passionné.com l'endroit idéal pour s'exiler et faire un break. Dépaysement, beauté des paysages, excellence des produits frais et surtout, aucun vignoble à  visiter !

    Des vacances, des vraies, loin de la passion, loin du vin, loin de la Passion du Vin !
    Enfin, pas tout à  fait ! A t'on vraiment envie de se passer de la passion, d'ailleurs ? Bien sûr que non !
    D'abord, les Bretons aiment le vin et, s'ils n'en produisent pas, ils en commercialisent beaucoup, notamment pour la clientèle anglaise qui débarque par vagues du ferry de Roscoff. Pour preuve, les Wine Center, Wine Seller et autres Wine and Beer qui fleurissent dans un large périmètre autour de la petite cité corsaire. Pourtant, je ne sais pas pourquoi, mais je ne me suis pas senti concerné !
    Ensuite, dur dur d'accompagner huîtres, poissons et crustacés d'un verre de Chouchen !

    Alors, juste comme ça, quelques notes de dégustation vite fait sur les vins dégustés lors du séjour, et qui avaient fait le voyage depuis le Jura pour la plupart. Et aussi une petite sélection d'adresses, diverses et variées, pour ceux qui comme moi succomberaient aux charmes du Léon, pas Zitrone ni Barral, mais du pays léonard qui s'étend grosso modo de Locquénolé à Plouescat sur la côte du Finistère Nord, jusqu'à Landivisiau dans les terres. Tout ça servi en vrac, s'il vous plaît !

    Bergerac sec, Les Verdots 2000, David Fourtout
    Nez très agrumes, fruits exotiques. En bouche, malgré une belle acidité, une matière très grasse s'impose. Un vin riche et opulent, au boisé superlatif qui devrait néanmoins se fondre car après une longue aération, il s'équilibre sur son côté acidulé qui le rend bigrement séducteur.

    Dunes de Keremma
    Bordant la baie lagunaire de Goulven, un ensemble unique et sauvage de 8 kilomètres de long, une véritable réserve ornithologique, qu'il fait bon arpenter à marée basse pour se rendre sur les récifs éparpillés tout le long de cette côte du Pays Pagan, en faisant bien attention à l'heure de remontée des eaux.

    VDP, Porte de Méditerranée, Solstice rosé 2003, Domaine Viret
    Rosé de saignée de la même cuvée en rouge, d'où une robe assez soutenue, groseille bien mûre. Nez de caramel au lait et vinosité marquée. Curieux comme il me rappelle les rosés du Valais bus courant juin alors qu'il n'a pourtant pas grand chose à voir, à commencer par les cépages.

    Mas de Daumas Gassac blanc 2001
    Un vin blanc gourmand sur des fruits blancs à  croquer, pêche blanche notamment. Idéal pour les poissons d'été.

    Anjou blanc 2001, Château de Suronde
    Même s'il faut encore l'attendre, d'après Francis Poirel, je n'ai pas pu résister ! Un nez puissant, intense et profond, complexe et parfumé, incitant à la méditation. Je ne trouve pas les nuances précises pour le caractériser mais il est très typique d'un vin peu soufré (cire, encaustique, miel ?), sans trace aucune d'oxydation. La bouche impressionne par sa chair et sa longueur. Magnifique ! Aurait mérité un homard mais n'a eu droit qu'à une (excellente) barbue cuite au four.

    Hermitage blanc 1998, Guigal
    A maturité probablement, un beau vin profond qui joue curieusement dans le même registre organoleptique que l'Anjou de Suronde. Plus gras, peut-être, un peu plus de matière, mais si peu ! Une longueur extraordinaire qui permet d'accéder sans aucun problème dans la 4ème dimension. Aurait également mérité un homard, mais ce n'était pas encore le jour !

    Plage des Blancs Sablons
    Changement de sujet, petite excursion le long des côtes du Finistère pour terminer sur cette magnifique plage, juste au nord du Conquet, 2 kilomètres de sable blanc entre 2 pointes rocheuses, un endroit où il fait bon s'allonger en attendant les vagues.

    Graves blanc 2000, Château de Chantegrive, Cuvée Caroline
    Marqué sauvignon, sur les agrumes mûrs et le bourgeon de cassis, il lui manque un petit quelque chose pour faire partie des meilleurs, probablement du fait d'un petit déséquilibre acide.

    Côtes du Ventoux rosé 2003, Domaine de Fondrèche
    Une belle robe saumon, assez soutenue. En bouche, un petit côté légèrement piquant (du gaz ?) lui donne de la vivacité et du tonus. Bien équilibré, presque aérien malgré une vinosité marquée.

    Les Vignes de Merlin, à  Saint-Pol de Léon
    La cave à ne pas manquer, sur la place de la cathédrale de Saint-Pol de Léon. Un vrai caviste, arborant fièrement moustaches et tablier à l'effigie des Coteaux du Languedoc. Des références (domaine Leflaive, Jaboulet, Vieux Télégraphe,...) y côtoient des jolies découvertes (Terres Salées de Ch. Barbier, domaine de Puydeval,...). Et puis un collector, un vin qu'on ne trouve qu'ici, un petit bonheur de vin de copain, au nom qui incite à le boire, le Pif à Pinpin. Une cuvée réservée de vin de pays d'Oc, sélectionnée pour les Vignes de Merlin par le domaine de Creyssels, situé à Mèze, au bord de l'étang de Thau. Une production d'environ 5000 bouteilles que tout le monde s'arrache à Saint-Pol. Existe aussi en version familiale !
    Pinpin, c'est évidemment le caviste, et je sens qu'il ne va pas tarder à  amener son grain de sel sur LPV.

    La Galettière, à  Saint-Pol de Léon
    Une toute petite adresse, avec une toute petite carte, mais pour la gentillesse de l'accueil en cette journée torrentielle, parce que nous avons été les premiers clients « officiels » et aussi parce que l'on peut accompagner les aumônières de crêpe de Pif à Pinpin servi au verre.

    Océanopolis, à  Brest
    Le lieu incontournable à visiter les jours de grande pluie. Mais alors, que de monde ! Une mine de choses à apprendre, sur la mer en général, mais un peu scolaire, quand ce n'est pas le parc d'attractions qui prend le dessus. Mention particulière tout de même aux manchots, dans l'aquarium de la zone polaire, de sacrés cabotins ceux-là !

    Le Pif à  Pinpin 2003, Vin de Pays d'Oc
    Une gorgée de fruits croquants et croustillants, un vin rouge sincère et craquant, qui fait claper la langue et donne envie de s'en resservir une lampée. La seule entorse de la semaine au régime poisson et coquillages, blanc et rosé !

    Muscadet de Sèvre et Maine sur Lies 2002, Henry de Brières
    Une marque assez diffusée en GD, il me semble, le vin idéal pour accompagner quelques huîtres de Prat-Ar-Coum.

    Les Viviers de Prat-Ar-Coum, à  Carantec
    Tenus par Alain Madec, le frère d'Yvon. Parce que c'est le paradis pour l'amateur d'huîtres qui ne sait laquelle choisir et quelle grosseur, parce qu'elles ne quittent leur bac d'eau salée que pour terminer dans l'assiette. Plus frais, ça n'existe pas !

    Captain Crêpes, à  L'Aber Wrac'h
    Parce qu'il fallait bien emmener les enfants dans une crêperie, mais aussi pour les grandes baies vitrées s'ouvrant sur l'aber, somptueux paysage dans le soleil couchant, et pour le Parmentier de Saint-Jacques aux saveurs de Guéméné, accompagné d'un joli Chardonnay d'Oc de Robert Skalli.

    Chardonnay d'Oc 2003, Robert Skalli
    Un très agréable vin blanc, beurrant légèrement, comme un P'tit Lu, avec beaucoup de fraîcheur.

    Clos de L'Hermite blanc 2001, Vin de Table
    Belle bouteille à l'attaque vive, tonique, dont le corps se développe crescendo, gagne en volume pour acquérir un peu de gras en finale. Un vin avec de la chair, qui se densifie avec l'âge. C'est l'Hermite qui a eu droit au homard au naturel, mais il le valait bien !

    Domaine Mourgues de Grès rosé 2003, Les Capitelles
    « Travaillé » 3 mois en fût, comme un blanc, ce rosé allie richesse de constitution et fraîcheur malgré tout. Son côté légèrement gras en fait un vrai vin pour la table.

    Domaine Mourgues de Grès 2003, Les Galets rosés
    De couleur plus soutenue que son grand frère, presque groseille, il est frais, fruité et gouleyant.

    Cabernet d'Anjou 2003, V. Ogereau
    Dégusté aux Vignes de Merlin et sachant garder de la fraîcheur malgré le moelleux caractéristique des cabernets d'Anjou et leur légère sucrosité. En 2003, une cuvée passerillée sur pieds a pu voir le jour du fait des conditions climatiques particulières. La dernière de ce style remontait à 1996.

    Vin de Pays des Côtes de Pérignan 2002, Les Terres salées, Christophe Barbier
    Un vignoble situé à Fleury d'Aude, planté sur des anciens marais salants, ce qui apporte des notes iodées, salines et marines au bourboulenc. L'attaque est vive, la matière consistante, avec à peine de gras. Longue finale saline, très belle. Une découverte signée Pinpin, tout comme le suivant !

    Vin de Pays de l'Aude, Domaine de Puydeval 2002, Morillon blanc
    Un chardonnay sudiste très parfumé, sur les agrumes légèrement acidulés, à l'élevage bien maîtrisé. Equilibre subtil entre gras et acidité, sur le fil, évitant la lourdeur, qu'une aération prolongée voit néanmoins resurgir le lendemain midi.

    Restaurant Le Cabestan, Carantec
    On approche de la fin de l'histoire, il fallait donc un banquet final ! Ce fut au Cabestan, une bonne adresse, qui jouxte la Cambuse, la version bistrot et bar à huîtres, mêmes locaux, même cuisinier. Le service était quand même un peu longuet ce soir-là ! La carte des vins est un peu restreinte en blanc, hormis la Loire, avec une Coulée de Serrant 1995, à 120 euros sur table.

    Côtes de Provence 2000, Blanc de Côtes, Clos Mireille, Domaines Ott
    Un beau blanc de Provence, élégant et raffiné, fruité mais pas trop, idéal pour accompagner le poisson que l'on sert au Cabestan.

    Voilà , c'est tout, ce n'est déjà pas si mal ! Je n'ai pas goûté de Chouchen, comme je m'y étais (presque) engagé, mais j'en ai rapporté une bouteille, Chouchen d'Armor, qui vient des Vignes de Merlin, et que Pinpin m'a certifié être le meilleur de tous. Peut-être que je compléterai ce compte-rendu un jour si j'en ai le courage !

    Kénavo!

    Olif


     

  • Irouléguy, le vin qui colle aux basques

    Date: le 14/07/2003 à 11:43

    Irouléguy, le vin qui colle aux basques

    Petite chronique d'un séjour dans le pays de Saint-Jean de Luz, entre mer, montagne, vin et gastronomie locale.
    C'est les vacances ! Prendre son temps, prendre LE temps !

    Prendre le temps de surfer sur la vraie vague, pas seulement sur un PC ni même sur la vague du succès comme LPV !
    Prendre le temps de randonner sur les sommets des Pyrénées, les premiers du côté Ouest, ceux dont les pieds baignent dans l'Atlantique et qui s'apparentent plus à de la montagne à vaches, comme le Jura cher à mon coeur !
    Prendre le temps de découvrir un vignoble méconnu et ses vins ancrés dans une longue tradition séculaire ! Gloire soit rendue une fois de plus à des moines, ceux de l'abbaye d'Orréaga (Roncevaux) qui ont trouvé comment, au XIIème siècle, tirer parti des ressources du sol pour rendre leurs repas et leurs messes plus agréables.
    Prendre le temps d'apprécier une gastronomie riche et goûteuse, orientée vers la mer mais pas seulement ! Ah ! l'axoa, la piperade et le gâteau basque !
    Enfin, prendre le temps d'aller à la rencontre d'un peuple fier de ses racines, à la forte identité, communicatif, chaleureux et sympathique, surtout lorsqu'il laisse ses bombes aux vestiaires ! La tendance actuelle est de tagger jusqu'à les rendre illisibles les noms français des villes basques sur les panneaux de signalisation. Charmant !

    Concernant les activités physiques, outre celles déjà citées, les plus courageux pourront s'adonner au sport favori de nos amis alsaciens, à qui je demande, ainsi qu'aux autres de bien vouloir me pardonner : Pelote, re-Pelote et Tix te Ter !

    Sinon, s'il reste encore du temps, et même s'il n'en reste pas, se consacrer à sa progéniture, se mettre à sa hauteur et participer à ses jeux, comme cette bataille de boules de sable qui nous a fait passer pour des simplets sur la plage d'Anglet ou encore cette bataille de petites crottes de moutons séchées qui nous a fait passer pour des demeurés au sommet de la Rhune. Le bonheur de redevenir enfant !

    Sanpere : Saint-Pée sur Nivelle, terminus ! Au bord du lac éponyme et quasiment au pied de la Rhune.
    La Rhune ! Parmi les sommets importants dans une vie de randonneur, la Rhune compte pas pour des prunes ! 4204 m, ce n'est pas rien ! Même si cela ne représente que la distance parcourue par le petit train à crémaillère depuis le col Saint-Ignace jusqu'au sommet. Les plus courageux, eux, montent à pied. Le panorama *** sur la côte Atlantique, ça se mérite ! Et pour redescendre, ce n'est pas difficile, il n'y a qu'à se laisser rouler, comme faisait mon copain Guy !
    Justement, en parlant d'Irouléguy, petit flash back sur la deuxième étape du voyage, Saint-Jean Pied de Port.

    Donibane Garazi : petite ville du vignoble, encaissée dans la vallée de la Nive, au nom basque qui sonne plutôt bien. Les coteaux sont ici extrêmement pentus et la vigne y est plantée en terrasse. Le paysage est de toute beauté, incitant à la marche et à la randonnée. Les rues escarpées de la vieille ville regorgent de boutiques et l'on peut y dénicher, entre autres, l'enseigne des Vignerons du Pays Basque ainsi que l'échoppe du domaine Brana, qui a pignon sur petite rue et qui commercialise, outre les vins et liqueurs de la propriété, une jolie sélection de vins du Sud-Ouest, Jurançon, Cahors et Madiran en tête.
    Les autres domaines remarquables (Arretxea, Ilarria, Etxegarraya) sont beaucoup plus difficiles à trouver du fait d'une production beaucoup plus confidentielle.Il faudrait pour cela se rendre au domaine, ce que je n'ai malheureusement guère le temps de faire. La meilleure solution, gagner la ville la plus fameuse de la Côte.

    Biarritz : la célèbre cité balnéaire de la Côte Basque est fidèle à son image chic et branchée mais est plutôt extraordinairement calme en ce début juillet. Un bonheur que de flâner dans les rues sans se sentir agressé par la foule ! Au détour d'une petite rue, en face des Halles, je tombe sur la caverne d'Ali Baba : le Cellier des Halles, grand comme un mouchoir de poche et qui recèle d'innombrables trésors. Toutes les références en Irouléguy y sont, le but de ma visite, mais j'ai également failli repartir avec du Rhône (Réméjeanne, Richaud,etc.), du Bergerac (Tour des Gendres, Verdots), du Languedoc (Roc des Anges, Aurel,etc.), du Cims de Porrera et même du Côtes du Jura de Berthet-Bondet! Accueil de tout premier ordre par des passionnés qui animent également un site Internet à la gloire du vin local.

    [www.vinsdici.com]

    Une visite s'impose, tant sur le site qu'à  la cave.

    Irulegi, le grand nom d'un petit vignoble : 200 ha de vignes dont 148 pour la coopérative des Vignerons du Pays Basque à Saint-Etienne de Baïgorry, le reste se partageant entre 6 autres domaines. Ma mission a consisté à rassembler, non pas l'intégrale des vins produits dans la région mais un échantillonnage que j'ai souhaité le plus représentatif possible, afin de me faire une petite idée de l'expression de ce vignoble. Les comptes-rendus sont livrés dans l'ordre de la dégustation qui s'est effectuée sur une semaine, au gré de mes humeurs et du menu du jour.

    - Herri Mina 98, Jean-Claude Berrouet : il s'agit d'un vin blanc vinifié au domaine Brana par Jean-Claude Berrouet, oenologue de Pétrus, s'il vous plaît, et originaire de la région où il possède un petit carré de vignes. Pour l'instant, ce vin n'existe qu'en blanc mais une cuvée de rouge ne devrait pas tarder à voir le jour.
    Gros manseng, petit manseng et courbu, un air de ressemblance avec le Jurançon tout proche. Sur la pomme reinette au nez, ce vin possède une grande droiture minérale sur une grosse structure acide, avec une pointe de gras en milieu de bouche et une finale qui revient sur l'acidité. Très proche d'un beau Jurançon sec.

    - Domaine Brana 2001 : le blanc du domaine, qui représente en fait le premier vin, la cuvée Ilori étant l'entrée de gamme. La robe est or pâle, le nez légèrement acidulé, aux senteurs discrètes de pomme. En bouche, là encore, on est sur une grande base acide, qui confine un peu à la dureté et à l'austérité, apte à entraîner une striction des mâchoires chez les personnes sensibles. On sent ce vin très jeune, comparé au précédent et, de fait, il nécessite à mon avis un vieillissement de quelques années pour s'exprimer de façon plus harmonieuse. Ce côté très minéral m'évoque bien sûr le Jurançon mais aussi certaines cuvées de chenin de Loire par l'acidité marquée, très mordante.

    - Domaine Brana, cuvée Ilori 2001 : ces Jonquilles offrent une robe très pâle. Ici encore, l'acidité est marquée mais son côté très fruité en fait un vin déjà très expressif, moins minéral que le précédent, que l'on peut boire allègrement.

    - Xuri d'Ansa 2002, les Vignerons du Pays Basque : 40% petit manseng et 60% gros manseng. Nez sur les agrumes, fin et distingué. Un boisé délicat vient nourrir le vin et étoffer sa matière, sans être envahissant, lui donnant un côté séducteur immédiat, assagissant son acidité et le rendant plus accessible à mon palais. Très beau!

    - Omenaldi 99, les Vignerons du Pays Basque : 60% tannat, 30% cabernet franc et 10 % cabernet sauvignon. Cuvée haut de gamme élevée en fût de chêne. Une robe sombre, de légères notes boisées au nez, le vin se la joue ensuite fruit et épices. Les tanins sont un peu sévères et amers (le tannat ?) mais on note là une grande originalité.

    - Les terrasses de l'Arradoy 2000, les Vignerons du Pays Basque : sélection d'une parcelle plantée sur les coteaux de l'Arradoy. 20% CF, 30% CS, 50% T. Le nez est sur le poivron, l'attaque est plutôt souple et la finale un peu courte et acide. Un vin assez simple.

    - Domaine Ilarria, cuvée Bixintzo 2000 : la robe est noire, opaque. S'ouvrant sur un nez de fruits mûrs et d'épices, il développe déjà une certaine rondeur et les tanins sont bien polissés. Belle longueur et très joli vin.

    - Harri Gorri 2001, domaine Brana : cela signifie Pierre Rouge en Basque. Une entrée de gamme d'un rouge soutenu, sur le poivron pas trop vert (majorité tannat assemblé avec du cabernet franc). De bonne constitution, c'est un vin simple et franc, idéal pour accompagner quelques grillades l'été.

    - Domaine Arretxea, cuvée Haitza 2000 : une robe noire comme de l'encre ! Nez joliment fruité et épicé avec une note torréfiée légèrement brûlée. Les tanins sont très légèrement amers mais enrobent bien le palais, de façon homogène, dense et charnue. Très belle bouteille qui mériterait encore un ou deux ans de cave pour s'affiner.

    - Château de Mignaberry 2000, les Vignerons du Pays Basque : robe rouge grenat intense et nez superbe alliant fruits rouges, épices et boisé torréfié encore un peu marqué mais de toute beauté. En bouche, les tanins sont un peu sévères et poussiéreux. La finale, que l'on aurait souhaitée plus longue, présente de la mâche et une légère astringence. Tannat majoritaire (65%), complété par du cabernet franc (20%) et sauvignon (15%), il faut l'attendre encore un peu pour qu'il intègre mieux son bois mais cela devrait donner une belle bouteille d'ici 2 à 3 ans.

    - Domaine Ametzia 2001 : ça bouge en Irouléguy ! Ce nouveau domaine signe avec ce 2001 son premier millésime. Et transforme l'essai d'emblée ! Robe noire et dense, nez tout en délicatesse, sur les fruits noirs et un léger poivron bien mûr. Bouche ronde, charnue et suave, avec de jolis tanins bien enrobés, déjà fondus, avec une pointe d'amertume très agréable. Longue finale rémanente. Splendide ! Jean-Louis Costera, un nom auquel il va falloir s'habituer.

    - Harri Gorri rosé 2001, domaine Brana : la pierre rouge rosée ! Robe rosée soutenue tirant un peu sur la brique. Nez discret, légèrement fruité, bouche gouleyante quand il est servi bien frais, la finale est néanmoins légèrement asséchante. Le tannat ne me semble pas le cépage idéal pour l'élaboration de rosés friands et élégants. Pour grosses chaleurs !

    - Txapa, domaine Brana : ce n'est pas du vin mais presque ! Apéritif élaboré par Jean Brana à la demande de la restauration, pour satisfaire la demande couleur locale d'une clientèle touristique avide de folklore, cette Txapa est constituée par l'assemblage de vins sélectionnés et de liqueurs de fruits. La robe est plutôt claire, rosé tuilé soutenu, le nez sur la griotte et la cerise à l'eau de vie (16,5°). Plutôt sympa, le cadeau idéal à rapporter à Belle-Maman !

    L'impression globale qui se dégage de cette dégustation, c'est que l'on produit de très belles choses en Irouléguy, pour qui aime la rusticité tannique du tannat. Les cuvées haut de gamme ne manque pas d'élégance lorsqu'elles sont arrondies par juste ce qu'il faut de cabernet. Les cuvées plus simples voient leur proportion de cabernet franc augmenter, leur apportant de la rondeur et un côté accessible immédiat au prix d'une exacerbation des notes variétales de poivron. Les blancs sont très intéressants, les rosés à mon avis beaucoup moins. Coup de coeur en blanc pour Xuri d'Ansa 2002 et en rouge pour le tout nouveau domaine Ametzia. Merci aux cavistes du Cellier des halles pour leurs conseils avisés.

    Ahetze : petit village perdu entre Saint-Jean de Luz et Guétary. Vous y trouverez, en pleine campagne, un endroit magique, la ferme d'Ostalapia, au charme fou, où vous pourrez manger des choses simples et bonnes en terrasse avec vue sur le massif de la Rhune. Un petit carré de vignes a même été planté dans le jardin, ajoutant à l'originalité de l'endroit. Il est prudent de réserver. 5 chambres vous attendent si vous souhaitez y faire étape.

    [www.ostalapia.com]

    Enfin, pour clore ce petit panorama sur le Pays Basque, en marge du vin mais pas forcément inutile, tour d'horizon de quelques plages :

    - Bidart, plage d'entrée de ville, en bordure de la RN 110 : couche épaisse de sable sec en attaque suivie de sable fin parsemé d'innombrables cailloux plus ou moins bien polis, agressant le pied. Ménage fait à la va-vite avec entassement d'une partie des déchets sur le parking. Quelques boulettes du Prestige traînent encore par-ci, par-là ! (sad smiley)

    - Anglet, plage dite des Cavaliers : sable un peu grossier en attaque qui devient plus fin au fur et à mesure qu'on approche de l'océan. Propre et bien entretenue, parking ombragé gratuit. (smiling smiley)

    - Hendaye, plage de ville : sable très fin, pur et homogène dès l'attaque. Cadre magnifique, un peu gâché par d'hideuses constructions modernes mais il subsiste ça et là de jolies maisons basques. Parking payant sur le front de mer. Attention, à marée haute, la plage est réduite à la portion congrue.

    Ah! le Pays Basque!

    Olif

    P.S.1: manquent à cette dégustation les notes sur le domaine Abotia, Etxegarraya et sur la toute nouvelle cuvée 100% cabernet franc du domaine Brana, Axeria. Ben oui! j'ai pas eu le temps de tout goûter! Quelques comptes-rendus complémentaires à suivre, donc!

    P.S.2: veuillez excuser les quelques jeux de mots, calembours ou à -peu-près qui émaillent ce texte, je n'ai pas pu m'en empêcher! Je n'ai pas mis de smileys, donc vous n'êtes pas obligés de rigoler!smiling smileysmiling smiley